Nick Nuyens débriefe la saison de Vérandas Willems-Crélan : "Ce n’était pas mal, mais je veux plus, beaucoup plus"
Nick Nuyens dresse un an de bilan pour son équipe, fait de bas et de hauts.
- Publié le 20-10-2017 à 10h54
- Mis à jour le 20-10-2017 à 11h07
Nick Nuyens dresse un an de bilan pour son équipe, fait de bas et de hauts.
Quelques heures avant que Wout Van Aert n’enlève à Ardooie son premier succès de la saison de cyclo-cross, Nick Nuyens, le manager de Vérandas Willems-Crélan, est revenu sur la première année d’existence de sa formation.
Dix mois après la création de votre équipe, êtes-vous un manager heureux ?
"Boh ( il réfléchit) … La saison est à diviser en plusieurs parties. On a débuté très bien avec les deux titres en cyclo-cross de Wout, le national et le mondial. C’était magnifique. Nous étions ensuite très motivés pour le début de la saison routière, mais jusqu’à la fin du mois d’avril, nous étions nulle part ! C’était désastreux, en tout cas, pas ce qu’on attendait."
Pourquoi ?
"On a eu des soucis, comme je suppose toute nouvelle équipe, on les a résolus assez vite, mais on était engagé dans une spirale négative. Nous n’avions pas eu beaucoup de temps, c’est vrai, pour préparer la saison, pour lancer l’équipe. Il y a un an, jour pour jour, elle n’existait pas encore et ensuite on s’est beaucoup focalisé pour que la transition se fasse sans problème pour nos cyclo-crossmans, dès le 1er janvier. Mais ce n’est pas une excuse. Ces soucis, je peux vous l’assurer, ce n’était pas les vélos ou le matériel, pas du tout. C’est un bruit qui a couru, mais nous sommes vraiment bien équipés. Quand une nouvelle équipe arrive et qu’elle ne commence pas bien, tout le monde le voit. En début d’année, nous n’avions aussi que douze coureurs, donc on ressent plus les blessés, les malades, les gars hors forme."
D’autant qu’il y avait la comparaison avec l’année précédente et la super saison de l’équipe continentale sponsorisée par Vérandas Willems.
"On avait une jeune équipe. Il fallait aussi que nos coureurs s’adaptent, qu’ils apprennent. Ils avaient fait une très bonne saison en 2016, peut-être un peu exceptionnelle. Nous espérions donc plus et mieux, mais, on n’était nulle part dans les grandes classiques mais aussi dans les courses moins importantes."
C’était la panique ?
"Non, cela ne résout rien, mais tout le monde se pose des questions. Heureusement, j’ai assez d’expérience. On a deux possibilités : ou on continue à essayer, à travailler, ou on arrête d’essayer et on baisse les bras. J’ai essayé des choses, on en a modifié d’autres, quelques personnes sont arrivées."
Quand est-ce que cela a changé ?
"Il y a eu une transition frappante en mai. Quand Wout et Tim Merlier sont venus sur la route. Ils ont obtenu tout de suite des résultats. Dès le Tour de Belgique, c’était de mieux en mieux. Nous avions une autre mentalité, un autre dynamisme. C’était tout à fait différent du printemps. Tout le monde était motivé. C’est bizarre, mais avec un vrai leader comme Wout, qui marche, ça transcende tout le groupe. Comme cela peut aussi, certainement, lui faire perdre pied. C’est aussi à ce moment qu’est arrivé Michel Elijzen, mon ancien équipier. Il avait l’expérience comme directeur sportif chez Lotto, Rabobank, Belkin, comme manager de la performance chez SEG, l’habitude de travailler avec des jeunes."
La saison ne s’est pas mal terminée, finalement…
"Je suis content, nous avons cinq victoires (NdlR : plus deux kermesses et un critérium) , on aurait pu en avoir plus si nous avions disputé des courses de 2e catégorie, mais ce n’était pas ma philosophie. Pour une première année, ce n’est pas mal, mais je veux plus, beaucoup plus."
On ne peut pas ne pas évoquer Timothy Dupont, qui d’ailleurs va vous quitter.
"Il est déçu de sa saison et nous sommes déçus aussi. En 2016, il a gagné dix-sept courses, mais il devait y en avoir quatorze classées 1.2. J’ai volontairement décidé qu’on ne roulerait pas ces courses (NdlR : qui ne sont pas ouvertes aux équipes du World Tour mais bien aux formations continentales) . Nous sommes une équipe professionnelle, notre ambition est de vouloir progresser, je trouve qu’on ne doit pas rouler avec les amateurs. On est des pros qui roulent contre les pros. Ça doit être un rêve de sprinter contre Cavendish, Greipel, Kittel et pas contre des mecs du deuxième niveau. Ce n’est pas en allant rouler une catégorie plus bas qu’on trouve le moral. Si vous n’avez pas le moral chez les pros, vous n’avez pas choisi le bon métier. Timothy n’était pas content chez nous et nous non plus de lui. Il était encore sous contrat, mais on a trouvé une solution et il part chez Wanty. Quand ça ne marche pas, ça ne sert à rien de continuer à tout prix".
Au printemps prochain, Wout Van Aert va tenter l’aventure des classiques flandriennes.
"Je suis curieux et motivé de vivre cela. Wout fera ce qu’il veut, sans aucune pression. Il sera là pour apprendre, découvrir, gagner en expérience. Il faut que tout le monde soit conscient de cela. Il peut être une grande révélation dans les classiques printanières, mais les gens doivent comprendre que ce n’est pas normal. Avec lui, on trouve tout normal. On a vu avec Boom et Stybar combien ce n’était pas évident. En plus, lui, il va continuer à courir les cyclo-cross cet hiver, même si son programme sera allégé. Ensuite, il sera opposé à des gars qui se seront préparés spécifiquement, qui seront plus frais, qui auront beaucoup plus d’expérience de ces courses."
Qu’en attendez-vous ?
"Il n’a jamais vraiment roulé sur route chez les jeunes, or, il a déjà fait des trucs exceptionnels sur la route. Il a la motivation, la grinta d’un vrai champion. Il est déjà un des favoris de toutes les courses qu’il dispute. Il aime faire la course, la guerre, mais ce ne sera pas la même chose dans les classiques que dans les 1.1. Pourtant, il a la classe et les qualités pour gagner de grandes courses, j’en suis sûr. Il va courir jusqu’au Mondial de cross, fin janvier, puis il se tournera vers la route. Sa première course sera le Nieuwsblad et il ira jusqu’à Paris-Roubaix ou peut-être l’Amstel, si nous sommes invités à ces deux courses, avant de couper pour reprendre en mai pour préparer la saison hivernale suivante. Je le répète, s’il obtient des résultats au printemps, il faudra comprendre que c’est exceptionnel."
Les satisfactions : "Je suis très content de Stijn"
"Pour moi, dit Nick Nuyens, la révélation, ou plutôt la satisfaction, de 2017, c’est Stijn Devolder. Je suis très content de lui comme capitaine de route. Même s’il n’a pas obtenu de grands résultats, on l’a beaucoup vu, il a énormément travaillé. Ce n’est pas une grande g…, mais il a toujours essayé de garder le moral, de motiver ses équipiers. Il s’amuse bien. Il a l’expérience, évidemment, de toutes ces situations, bonnes ou moins bonnes. C’est quelqu’un qui est aussi important et le sera encore plus au printemps prochain, pour Wout Van Aert, en dehors et dans la course. Ça marche bien entre les deux. Je suis aussi content de Huub Duyn. Il a été régulier à son plus haut niveau, il a gagné pour la première fois chez les pros cette saison, à plus de trente ans, mais je suis sûr qu’il va encore s’améliorer en gagnant en confiance. Malgré un début de saison difficile, aussi à cause de plusieurs chutes, Dries De Bondt a bien roulé, je trouve. C’est un coureur qui continue toujours à attaquer, qui a une mentalité positive, qui ne baisse jamais les bras. "
Les déceptions : "Pas le début de saison espéré"
"Je ne veux pas personnaliser les déceptions", dit l’Anverois. "Forcément, tout le monde ne m’a pas satisfait. On n’a pas réussi le début de saison espéré, mais je ne veux pas dire que c’est à cause d’un tel ou d’un tel. Après, il a des gars qui ne vont pas rester. Contrairement à Gaëtan Bille, Christophe Prémont a fait ce qu’il devait faire, mais il voulait arrêter, il a un autre job. Pour Cordeel, j’ai hésité, c’est un bon mec et j’espère qu’il va trouver une équipe, mais je devais renforcer l’équipe et des coureurs, que je n’aurais peut-être pas conservés, avaient des contrats de deux ans. Il a fallu faire des choix. J’ai fait de bons transferts, je pense. On va accueillir Sean De Bie, Zico Waeytens, Stijn Steels, Tanner qui était déjà là en cours de cette saison, Senne Leysen et encore un jeune Belge qui va signer ces prochains jours (NdlR : le Flandrien Mathias De Witte, 24 ans, qui vient de l’équipe continentale Cibel). Je suis confiant pour l’année prochaine et pour le futur.Je ne rêve pas spécialement du World Tour , mais je veux grandir avec l’équipe. Ce qu’on a fait pour 2018, c’est déjà grandir."
Le bilan 2017
Europe Tour : 8e avec 1.990 points.
CQ Ranking : 33e avec 1.614 points.
PCS Ranking : 26e avec 1.046 points.
8 victoires
5 courses UCI, 2 kermesses, 1 critérium UCI : Tour du Limbourg (Wout Van Aert), Ride Bruges (Wout Van Aert), G.P. Cerami (Wout Van Aert), Rad am Ring (Huub Duyn), G.P. Jef Scherens (Timothy Dupont).
Kermesses : Desselgem (Timothy Dupont), Grammont (Dries De Bondt). Critérium : Oostrozebeke (Timothy Dupont). Podiums : 14 (4 hors UCI). Top 10 : 38 (8 hors UCI).
Meilleurs coureurs classement UCI
84. Wout Van Aert 696 pts 130. Timothy Dupont 503 pts 169. Huub Duijn (P-B) 397 pts 519. Tim Merlier 144 pts 710. Arjen Livyns 95 pts 716. Stijn Devolder 94 pts 995. Dries De Bondt 55 pts 1115. Aidis Kruopis (Lit) 44 pts 1174. Lennert Teugels 40 pts 1469. Gaëtan Bille 29 pts
L'image : "Je retiens mes coureurs pesant sur la course"
"Le moment que je retiens de cette première saison ? La Coupe Sels, c’était l’été, la période où on marchait bien, où mes coureurs pesaient sur les courses", dit Nick Nuyens. "Dans la finale, il y a eu un groupe de tête de sept ou huit coureurs avec quatre gars de chez nous. Malheureusement, Stijn a crevé, il y a eu des chutes et Wout a été repris à 50 mètres du but. Il termine deuxième. En Allemagne aussi, le jour où Huub Duyn gagne, nous avions trois coureurs sur les quatre échappés (NdlR : en plus du Néerlandais, il y avait Devolder et Van Aert) . Stijn a tout roulé en tête pour les deux autres; il s’est sacrifié pour qu’on gagne alors qu’avec son palmarès, il aurait pu revendiquer la victoire."
Le noyau 2018
Arrivent (6)
Sean De Bie (Lotto - Soudal), Senne Leysen (néo-pro), Stijn Steels (Sport Vlaanderen - Baloise), David Tanner (Aus/Élite 2), Zico Waeytens (Sunweb) et, plus que vraisemblablement, Mathias De Witte (Cibel - Cebon).
Restent (10)
Dries De Bondt, Stijn Devolder, Huub Duyn (P-B), Stan Godrie (P-B), Michael Goolaerts, Jappe Jaspers, Aidis Kruopis (Lit), Tim Merlier, Wout Van Aert, Elias Van Breussegem.
Incertain (1)
Arjen Livyns.
Partent (6)
Gaëtan Bille, Sander Cordeel, Timothy Dupont (Wanty - Groupe Gobert), Christophe Prémont (arrête), Stef Van Zummeren, Otto Vergaerde.
NOTRE AVIS : Après des débuts chaotiques et hésitants, l’équipe Vérandas Willems-Crélan s’est bien reprise dans la deuxième partie de saison. Pour 2018, qui verra les vrais débuts de Wout Van Aert dans les classiques du printemps, même si elle a perdu Dupont qui ne s’est jamais entendu avec ses dirigeants, elle s’est renforcée avec deux espoirs talentueux qui ont le niveau WorldTour, De Bie et Waeytens, deux coureurs de grande expérience, Steels et Tanner, et deux jeunes prometteurs, Leysen et De Witte.