Thierry Gouvenou, concepteur du tracé du Tour : "On va ‘rustiner’ le col de Portet"
- Publié le 19-10-2017 à 07h09
- Mis à jour le 19-10-2017 à 07h14
Thierry Gouvenou nous parle du Tour qu’il a dessiné et de ses nouveautés, comme ce départ "style cyclo-cross" dans les Pyrénées Au lendemain de la présentation du 105e Tour de France, mardi à Paris, Thierry Gouvenou, le concepteur du tracé et bras droit de Christian Prudhomme était dans le Nord, pour y présenter en détail une des étapes dont on sait qu’elle sera l’un des temps forts de la Grande Boucle 2018. Un Tour que ses organisateurs espèrent moins stéréotypé et fermé que le précédent.
"Oui, avoue Gouvenou. Même si le schéma paraît un peu difficile avec neuf jours de plaine au début, je pense que l’on va apporter quelques nouveautés, comme ces sprints bonus, de l’imprévu, ce qui devrait faire en sorte que le Tour ne se déroule pas trop mal. On est, comme en 2015, avec des risques possibles de perdre le Tour tous les jours. Ces neuf premiers jours sont taillés pour les sprinters, les puncheurs et les coureurs de classiques. Le vent, bien sûr, c’est aléatoire, mais s’il y en a vers Chartres et Amiens, on est sûr qu’il y aura de la bagarre. Il y a une dizaine de côtes dans les cent derniers kilomètres de l’étape de Quimper. Celui qui est bon en Ardenne, sera bon là-bas, c’est une étape pour des coureurs comme Gilbert, Van Avermaet, Sagan, Alaphilippe… Il y a aussi l’étape de Mûr-de-Bretagne. On a vite fait d’y perdre dix, quinze secondes. Au niveau du Tour, maintenant, c’est important."
Mais le meilleur est à venir, selon l’ancien coureur normand.
"L’étape qui va provoquer le plus d’écart, c’est celle des pavés, dit Gouvenou. On a d’abord trois nouveaux secteurs, puis, après 70 kilomètres, on reprend le parcours de Paris-Roubaix au niveau de Warlaing et là, on fait douze tronçons de Roubaix, pas les plus durs, mais quand même… Warlaing, 900 mètres de Mons-en-Pevèle (NdlR : sur les trois km habituels classés "5 étoiles" pour la difficulté), Bercée qui fait 2 km 700…, Camphin-en-Pévèle, un quatre étoiles. Le dernier, à Hem, est à huit kilomètres de l’arrivée, tracée à côté, mais pas sur le vélodrome. Le but, c’est de montrer que le vélo, c’est aussi les pavés et que pour être un grand coureur, il faut aussi être capable de s’en accommoder."
Puis viendra la montagne.
"On va perdre des coureurs dans la transition, dit-il. Certains vont payer cash leurs efforts de la plaine en arrivant en montagne. L’équation à résoudre, ce sera : comment on passe des pavés à la haute montagne en moins de quarante-huit heures ? Là, on risque d’avoir de la casse, après la tension nerveuse des dix premiers jours qui va user beaucoup d’organismes. On a voulu modérer la difficulté en ne plaçant pas, d’emblée, une arrivée au sommet."
Les organisateurs du Tour espèrent beaucoup, aussi, des équipes réduites à huit coureurs.
"Il leur faudra gérer un coureur de moins, poursuit le directeur de course du Tour. Comment le fait-on, en sachant qu’il y a le chrono par équipes, le vent, les pavés et ensuite la montagne ? On ne pourra pas mettre sept grimpeurs autour d’un leader, sinon on va morfler les dix premiers jours."
La deuxième partie du Tour 2018 s’annonce intéressante.
"On a de nouveaux cols, comme le col de Pré qui est magnifique, dit-il. Dans les Glières, il y a six kilomètres à 11 % de moyenne, ça n’existe quasi nulle part en France. La 3e étape dans les Pyrénées n’est longue que de 65 kilomètres. C’est la meilleure façon de mettre en avant un nouveau col, le col de Portet, qui sera une des plus hautes arrivées (2.215 mètres) de l’histoire du Tour. Ça ressemble à un Ventoux, on est sur 16 kilomètres à 8,7 %. Il n’a jamais été monté car la route s’est dégradée, on va la "rustiner" pour le Tour. Le départ de cette étape ne se fera pas dans le village mais au pied du col de Peyresourde. On aura un départ type cyclo-cross, les coureurs rangés dans l’ordre du classement général, les premiers en première ligne, les autres derrière. On aménagera une zone d’échauffement pour que les coureurs puissent se préparer. "
Enfin, le chrono final peut encore tout bouleverser.
"Le seul chrono individuel est dur, affirme Thierry Gouvenou, très athlétique avec quatre côtes, dont la dernière, même si elle ne fait que 900 mètres, à 10,2 %, présente un passage à 21 %."