Questions pour une championne: un retour gagnant pour Kim Clijsters ?
Revenir au sommet à 37 ans après sept ans d’absence. Info ou intox?
- Publié le 14-09-2019 à 08h29
- Mis à jour le 14-09-2019 à 08h44
Revenir au sommet à 37 ans après sept ans d’absence. Info ou intox? Passé l’effet d’annonce, de nombreuses questions se posent autour du retour sur le circuit de Kim Clijsters. On comprend l’envie de la championne limbourgeoise de relever un défi quasiment unique dans l’histoire du sport. Mais on a forcément le droit de se montrer sceptique sur sa réalisation. Tentative de décryptage.
Technique
Elle a le talent mais le circuit a évolué
Dans l’absolu, Kim a le talent pour revenir rapidement à un (très) bon niveau. Son jeu s’appuie sur une bonne première balle de service, sur des frappes puissantes – notamment en coup droit – et sur une excellente occupation du court, principalement lorsqu’elle est en position défensive (rappelez-vous ses grands écarts). Il est probable qu’elle retrouvera donc rapidement ses sensations dans ces différents secteurs. En réalité, le plus compliqué pour elle sera sans doute de retrouver le rythme de la haute compétition. Kim n’a sûrement pas perdu son talent naturel, son sens inné de la balle, son envie de se surpasser. Par ailleurs, son expérience du circuit va l’aider à relever le défi. Mais, depuis qu’elle a pris sa retraite en 2012, le tennis a évolué, y compris au niveau féminin. Certes Serena Williams a un an de plus au compteur et est toujours là, bon pied bon œil, mais elle n’a jamais réellement arrêté sa carrière. Elle n’a jamais quitté la jungle du WTA Tour et s’est toujours mesurée à la nouvelle génération. Pour Clijsters, ce sera clairement un voyage dans l’inconnu.
Physique
Comment retrouver la puissance athlétique ?
C’est évidemment la grande inconnue. Même si elle n’a jamais cessé la pratique sportive, Kim a quitté la haute compétition depuis sept ans. C’est une éternité. Pour retrouver son gabarit de championne, elle va devoir se soumettre à un entraînement de commando avec, en toile de fond, d’évidents risques de blessure. On la sait fragile au niveau du poignet, de la cheville, de la hanche. Et, à 37 ans, le corps ne réagit pas comme à 20 ans. “Mais je suis sûr qu’elle s’est déjà testée et qu’elle se sent capable de réussir. Le niveau du circuit WTA est actuellement assez moyen. Avec un bon encadrement, un calendrier adapté, je pense qu’elle pourra vite atteindre le top 30 mondial sans problème. La difficulté sera d’enchaîner plusieurs matchs face à de très bonnes joueuses”, nous confie Eric Houben, ex-préparateur physique de Justine Henin.
Mental
Le défi suprême
Mentalement, Kim a toujours été très solide. Depuis son plus jeune âge, elle baigne dans le monde du sport de haut niveau. Son père, Lei, était un pilier des Diables rouges, sa mère, Els, a été championne de gymnastique et son mari, Brian Lynch, est basketteur professionnel. Elle maîtrise donc parfaitement le challenge qui l’attend, à tous les niveaux. Reste à savoir si, comme à son époque de gloire, elle sera en mesure de consentir tous les sacrifices nécessaires. Voilà sept ans qu’elle a – plus ou moins – rangé les raquettes. Elle a trois enfants (Jada, 11 ans ; Jack Leon, 6 ans ; et Blake Richard, 2 ans) à la maison. Pour revenir à un très haut niveau, elle devra forcément mettre entre parenthèses une grande partie de sa vie de famille. Sera-t-elle prête à reprendre une vie de nomade et d’ascète ?
Inspiration
Des exemples à suivre : oui, mais…
Les come-back sont nombreux dans l’histoire du sport en général, et du tennis en particulier. Mais ils ne sont pas toujours gagnants. Sur le circuit masculin, on ne donnerait objectivement aucune chance à un joueur, fût-il très doué, de revenir au sommet après sept ans d’absence. Chez les filles, c’est un peu différent. Le niveau est moins élevé et l’évolution, moins rapide. Clijsters avait d’ailleurs réussi son premier retour en 2009. Mais elle n’avait quitté le circuit que deux ans et, à l’époque, elle avait seulement 26 ans. Les paramètres sont très différents. Autant on aurait parié sur la réussite de son come-back en double (un peu dans l’esprit de Martina Navratilova ou Martina Hingis), autant l’hypothèse d’un retour gagnant en simple apparaît fragile pour les observateurs avisés. Car si Kim a décidé de repartir en croisade, c’est évidemment avec des objectifs élevés et non pas pour faire de la figuration et quitter les tournois au premier ou au deuxième tour.
Motivation
Le plaisir plus que l’argent
Mais qu’est-ce qui fait courir Kim ? A priori, cet improbable come-back n’est pas lié à un besoin financier. Durant sa carrière professionnelle, la championne belge a gagné près de 25 millions de dollars sur les courts, sans parler de ses contrats de sponsoring et de merchandising. Et elle a plutôt bien réussi sa reconversion professionnelle, avec notamment une Académie qui porte son nom à Bree. Sa motivation est ailleurs. Kim est une joueuse, dans le sens plein du terme. Le tennis, c’est sa vie. Lors des différentes compétitions d’anciennes gloires qu’elle a disputées (notamment le tournoi des légendes du dernier Wimbledon), elle a ressenti de bonnes vibrations. Et elle s’est dit : pourquoi pas ? Tout laisse à penser qu’elle abordera donc sa troisième vie sur les courts sans pression, en privilégiant le plaisir. C’est bien. C’est sport. Mais osons croire que cela ne tournera pas au ridicule. Les amoureux de tennis n’ont pas oublié le côté pathétique du retour sur le circuit ATP de Björn Borg en 1991, après six ans d’absence.