Un jour, un Diable: Jan Vertonghen, un caractère bien trempé fidèle à son club de quartier
Chaque jour jusqu’au 13 juin, nous vous proposons de découvrir un Diable sous un nouveau regard. Aujourd’hui, Jan Vertonghen, qui a débuté sa carrière dans le club de son quartier, à Tielrode. Portrait.
- Publié le 05-06-2016 à 13h26
- Mis à jour le 05-06-2016 à 13h28
Chaque jour jusqu’au 13 juin, nous vous proposons de découvrir un Diable sous un nouveau regard. Aujourd’hui, Jan Vertonghen, qui a débuté sa carrière dans le club de son quartier, à Tielrode.
Les installations ont un peu changé. Mais l’âme du club est toujours la même. Il n’y avait à l’époque qu’un seul terrain, il y en a aujourd’hui deux grands et deux petits. Depuis le départ de Jan Vertonghen, le VK Tielrode, modeste club de 3e provinciale, n’a pas beaucoup changé. C’est à six ans, en 1993, que le petit Jan foule pour la première fois la pelouse du club de son quartier. Fan de football, il décide de s’y inscrire avec son grand frère Ward, un an plus âgé que lui. L’avantage, c’est que la maison familiale se trouve à quelques minutes, Jan pouvait venir à vélo ou même à pied pour s’entraîner.
"La famille est très importante dans le club, affirme Jurgen Maes, aujourd’hui encore manager sportif du club. Les trois frères ont joué ici : Ward, Jan et Lode. Mais il n’y a que le plus grand qui a évolué en équipe première. J’ai rencontré Jan lors de la saison 1995-1996 . C’était sa dernière année ici au club. Il jouait à l’époque au milieu de terrain."
Lors de ses années à Tielrode, Jan Vertonghen était un footballeur comme les autres.
"Sur le terrain, il était un leader, vu son talent et sa position, se souvient Maes. Mais en dehors, il était très calme. Il ne faisait pas plus de bruit qu’un autre. Un footballeur tout à fait normal, comme il y en avait beaucoup chez nous."
Mais rapidement , son talent explose au grand jour. En 1996, des recruteurs avaient entendu parler d’un très bon attaquant qui évoluait en U14 avec Tielrode.
"Le recruteur était venu pour Ward, le grand frère de Jan. C’était Urbain Haesaert (NdlR : aujourd’hui actif à Anderlecht), il travaillait à l’époque pour le Germinal Beerschot et l’Ajax. Et son regard ne s’est pas porté sur notre attaquant, mais sur notre milieu de terrain ! Il a flashé sur Jan lors de cette rencontre. C’est lui qui l’a découvert ici à Tielrode. C’est donc Jan, et non pas son frère, qui a été transféré au Germinal Beerschot la saison suivante. Jan était techniquement plus fort que son frère. Mais il n’était pas aussi robuste qu’aujourd’hui. C’était un petit et frêle joueur de football. Mais il avait déjà une incroyable vision du jeu. Il pouvait lire le jeu facilement. Il ne perdait jamais le ballon et il était solide. Et il possédait déjà la frappe qu’il a aujourd’hui. Il montait souvent et il marquait régulièrement."
Son caractère était aussi déjà bien trempé. "Il n’aimait pas perdre ! Même contre ses frères dans le jardin. Quand il avait quelque chose à dire, c’était toujours pertinent."
Après une simple rencontre, Urbain Haesaert était convaincu que Jan Vertonghen avait tout d’un grand. Mais lorsque la proposition de partir lui a été offerte, le Diable a hésité.
"Jan se sentait bien ici avec ses amis, dit Jurgen Maes. Il n’avait pas l’ambition de partir vers un plus grand club. C’était aussi un très bon étudiant. Il était en secondaire à Saint-Nicolas. Mais ses parents lui ont fait comprendre que c’était peut-être une superbe opportunité et qu’il devait bien y réfléchir. Et au moins essayer. Au final, partir jouer pour un club qui joue en D1, c’était une décision logique… Pour lui, cela n’a pas été facile de partir. Il n’avait que 12 ans. Ses amis allaient lui manquer et c’était toute une organisation."
Parce que les parents de Jan, Ria et Paul, ne savaient pas comment conduire leur enfant trois fois par semaine à l’entraînement. Le Beerschot a alors fait une proposition : le minibus du club viendrait le chercher, avec d’autres joueurs, directement à son école. Il ferait ses devoirs avant l’entraînement au club. Et il serait de retour tous les soirs au plus tard à 20h30.
"C’était une condition exigée par les parents, se souvient Urbain Haesaert. Jan voulait réussir dans le foot, mais aussi à l’école."
Avec ce transfert vers la grande école de formation du Germinal Beerschot, l’aventure de Vertonghen pouvait alors commencer. Et pourtant, devenir professionnel n’était pas le rêve de celui qui est aujourd’hui une star en Premier League.
"Non, lui, il voulait jouer en équipe première de Tielrode avec ses frères, rigole Jurgen Maes. C’était son souhait lorsqu’il était petit. Tous les enfants rêvent de devenir joueur professionnel. Mais chez Jan, c’était loin d’être concret comme idée. Le football était son hobby."
Et pour lui, il était difficile de ne plus voir ses frères. "Ce n’était pas dans les habitudes de la famille Vertonghen d’être séparé, dit Jurgen Maes. C’est une famille très soudée. C’est ce qui fait aussi leur force de caractère."
Une force qui lui permet d’être aujourd’hui un des meilleurs défenseurs de la planète. Une fierté pour le petit club de Tielrode.
"Jan Vertonghen est le symbole du club, conclu Jurgen Maes. Lorsque des nouveaux joueurs veulent s’inscrire, la plupart du temps c’est parce qu’ils veulent jouer dans le club de Jan Vertonghen."
Jan Vertonghen est le troisième en partant de la gauche parmi les joueurs debout...
"Il nous a offert des nouveaux vestiaires"
Vertonghen n’oublie pas ses origines et revient souvent rendre visite à son ancien club.
Son cœur n’a jamais vraiment quitté Tielrode. Dès qu’il en a la possibilité, Jan Vertonghen revient en Belgique dans son village, pour passer du temps avec ses proches. Outre sa famille, il aime passer faire un tour au club, revoir le terrain de ses premiers exploits.
"Jan montre toujours son intérêt pour Tielrode, dit Wim Van Puyvelde, le président du club. C’est une très agréable personne. Il a un grand cœur. Il n’a pas oublié son passé et ses origines. Nous sommes un petit village et tout le monde se connaît ici. Jan a toujours gardé cette mentalité. Il est toujours très accessible."
Et lorsqu’en 2013, Tielrode est en proie à des problèmes financiers, Jan Vertonghen n’a pas pu rester inactif. En quelque temps, il réussit à rassembler une belle somme, en mettant notamment son maillot de Diables Rouges signé aux enchères, ainsi qu’une vareuse de Moussa Dembélé et des chaussures de Thibaut Courtois.
"Nous devions investir, parce que nos vestiaires étaient délabrés, explique le président. Ils dataient toujours de l’époque où Jan jouait ici (NdlR : les années 90). Et puis nous avions beaucoup de nouveaux membres. Nous devons même encore en refuser aujourd’hui. Sans Jan, nous n’aurions pas pu grandir, ce que nous voulions faire avec tous ces nouveaux joueurs. Avec son action, Jan nous a offert des nouveaux vestiaires, qui se trouvent juste à côté du terrain principal dans des containers."
Jan Vertonghen est la fierté du VK Tielrode. Le tournoi du club, organisé fin mai, porte désormais son nom. "Quand il en a la possibilité, il vient remettre le prix lui-même, comme l’an dernier", dit Jurgen Maes, manager sportif du club.
Mais le rêve de tous les membres du club, c’est de voir un trio de frère évoluer dans leur équipe première. "Les trois frères ont toujours dit qu’ils voulaient jouer ensemble en équipe première, dit Maes. C’est notre rêve aussi."
"La porte est évidemment ouverte s’il veut revenir jouer ici pour l’équipe première, rigole Wim Van Puyvelde. Nous n’avons pas encore de projet pour le futur. Peut-être que grâce à lui, nous pourrons encore évoluer et grandir, mais c’est à lui de voir." (sourire)
En attendant un éventuel retour, le club compte décorer un mur de la buvette avec des photos de sa star. Histoire de lui donner une raison de plus de revenir au bercail, pour terminer là où tout avait commencé.
"Très touché par le décès de son papa"
En 2007, alors qu’il avait 19 ans, Jan Vertonghen a vécu le moment le plus difficile de sa vie. Son papa, présent à chaque instant pour lui, est décédé des suites d’une tumeur au cerveau. "Cela a été un moment très dur pour la famille, se souvient Jurgen Maes. Jan a été très touché par son décès. Je me souviens qu’il était resté deux semaines à Tielrode auprès de ses proches."
Paul Vertonghen était très actif dans le club. "C’est souvent lui qui venait conduire ses trois enfants. Il venait toujours regarder ses trois fils jouer."
Il était aussi bénévole à Tielrode. Raison pour laquelle, lorsque la commune a décidé de construire une nouvelle route pour atteindre le terrain du club, le président a proposé d’appeler cette route la drève Paul Vertonghen.
"C’était un message positif pour tous les bénévoles du club et pour les familles du village de Tielrode", dit Wim Van Puyvelde. Mais finalement, la rue a pris le nom de drève Sigfried Buytaert, un ancien bourgmestre de Tielrode. Le club aurait préféré rendre hommage à la famille Vertonghen…