1 jour, 1 Diable: Benteke, un Diable made in Belgium
Avant d’exploser en Angleterre, Christian Benteke s’est fait les dents sur les terrains belges.
- Publié le 02-06-2016 à 14h32
- Mis à jour le 02-06-2016 à 14h40
Avant d’exploser en Angleterre, Christian Benteke s’est fait les dents sur les terrains belges.
"Il travaillait son corps"
Arrivé à Genk juste avant ses seize ans, Christian Benteke intègre rapidement l’équipe première limbourgeoise. Le 16 février 2008, Hugo Broos décide de le lancer dans le grand bain lors d’un derby face à Saint-Trond. Titularisé à trois reprises durant cette campagne, il ne parvient pas à trouver le chemin des filets, mais délivre, tout de même, deux passes décisives.
À même pas dix-huit ans, la performance est considérable. "Il travaillait beaucoup son corps, en passant de longs moments dans la salle de fitness. Il a gagné en puissance", se souvient Pierre Denier, le fidèle adjoint du Racing.
La campagne suivante est bien plus difficile pour lui. Il ne figure jamais dans le noyau de Ronny Van Geneugden, pas vraiment charmé par ses qualités, et doit attendre la treizième journée de championnat pour monter… à une minute du terme d’un déplacement à La Gantoise. "Lui voulait jouer un maximum de matches, ce que je peux comprendre, mais je pense que s’il avait fait preuve de davantage de patience, il aurait bien fini percer chez nous. Pourtant, je n’imaginais pas encore qu’il allait accomplir la carrière qui est la sienne actuellement", poursuit-il. "À l’époque, c’était déjà quelqu’un de très calme, pas spécialement bavard, mais qui était toujours attentif aux conseils qu’on pouvait lui donner. J’avais déjà été marqué par son grand professionnalisme."
L’idylle naissante vire rapidement à la déception amoureuse, avec moins de cent minutes de jeu jusqu’à la trêve hivernale, ce qui pousse l’attaquant à chercher son bonheur ailleurs.
"On sentait qu’il avait un truc"
Échaudé par un faible temps de jeu, Christian Benteke quitte Genk durant le mercato hivernal et rejoint le Standard, où il avait déjà suivi une partie de sa formation."Quand j’ai appris l’intérêt des Liégeois, je n’ai pas hésité une seconde", dit-il.
Jeune espoir du football belge, il parvient à gagner un petit peu de temps de jeu au sein d’une ligne offensive particulièrement riche. À première vue, se faire une place entre Igor De Camargo, Dieumerci Mbokani et Milan Jovanovic n’était pas spécialement évident, mais il y parvient quand même avec cinq titularisations et trois montées au jeu, pour un total de trois buts et deux passes décisives. "Il était difficile de lui donner plus de chances car le club vivait le moment présent et donner du temps de jeu à un jeune en pleine lutte pour le titre n’était pas aisé. Mais nous avions rapidement compris que cet attaquant avait une grosse marge de progression", se souvient Igor De Camargo. "À l’entraînement, on sentait qu’il avait un truc. Grand et costaud, il n’était pas maladroit techniquement. Chaque jour, il nous donnait l’impression de progresser et avait toutes les qualités d’un attaquant moderne. J’appréciais surtout son comportement car il était attentif à tous nos conseils et je pense qu’il en récolte les fruits aujourd’hui."
L’attaquant belgo-brésilien s’attendait donc à le voir percer au plus haut niveau. "Ce n’était pas par hasard qu’il était en équipe première du Standard à dix-huit ans. Il n’était logiquement pas encore au maximum de ses possibilités, mais je vous le dis : il avait tout pour réussir."
"Marquer autant à 18 ans, c’est époustouflant"
Sa deuxième pige au Standard vire rapidement à l’échec. Versé dans le noyau B des champions de Belgique, il est prêté durant une saison à Courtrai. En la personne de Georges Leekens, il trouve (enfin) un entraîneur capable de lui donner toute sa confiance et, surtout, lui offrir une première campagne pleine chez les professionnels.
"Il avait déjà un potentiel au-dessus de la mêlée. Honnêtement, il était super fort", sourit Ibou Sawaneh, qui partageait l’attaque avec le Diable Rouge. "Il est aussi rapidement devenu mon ami. Toujours gentil, c’était une personne très simple et humble. Nous sommes d’ail-leurs encore en contact aujourd’hui."
Christian Benteke ne déçoit pas en Flandre. En trente-six matches, toutes compétitions confondues, il inscrit quinze buts et délivre neuf passes décisives. Il est particulièrement impressionnant durant les playoffs 1, avec cinq réalisations à son compteur personnel, dont trois face à Bruges et à Anderlecht. "Faire de telles choses à dix-huit ans, c’est époustouflant", poursuit Ibou. "Il était costaud et technique, ce qui est toujours spécial pour un joueur de son gabarit. Je pouvais lui donner la balle; je savais qu’il allait tout le temps en faire quelque chose. C’était une chance de pouvoir évoluer à ses côtés."
Et il n’a donc pas été étonné de le voir exploser en Premier League. "Sa voie, c’était d’aller vite. Il a tellement rapidement progressé que tout ce qui lui est arrivé ne m’a pas étonné. Et je pense aussi qu’il peut être l’une des bonnes surprises de l’ Euro !"
"On faisait des réunions juste pour lui"
Révélé au grand public à Courtrai, Christian Benteke est une nouvelle fois prêté, à Malines cette fois. Avec un jeu basé sur ses qualités, l’attaquant était censé confirmer ses excellentes dispositions. Une illusion car il ne marque que sept buts et déçoit la plupart des suiveurs. "Je ne sais pas ce qui se passe en coulisses, mais nous avons appris par la suite qu’il n’avait pas spécialement envie de venir chez nous", explique Xavier Chen. "Cette location avait été un petit peu forcée visiblement, donc je pense que ses prestations moins convaincantes étaient, avant tout, dues à un problème mental. Nous avions même organisé l’une ou l’autre réunion pour le mettre dans les meilleures conditions, sans véritable succès."
Et pour cause, les joueurs malinois étaient convaincus de ses immenses qualités. "Il était déjà bien plus qu’un joueur normal. Les gens étaient impressionnés de voir un attaquant du Standard débarquer à Malines. Oui, il avait de la pression, mais lui restait cool malgré tout. Je pense que Christian n’est pas quelqu’un d’angoissé. Ce que je retiens chez lui, c’est son humilité et je pense qu’il ne l’a pas perdue aujourd’hui. C’est quelque chose qu’il a en lui", poursuit le latéral droit. "Au final, il n’a pas fait une grande saison chez nous et je pense qu’il partage ce point de vue, mais nous avions tous remarqué son énorme potentiel. Physiquement et techniquement, il était déjà au-dessus du lot. Personnellement, je n’ai pas du tout été surpris de le voir percer aussi vite au plus haut niveau car le talent, il l’avait. Parfois, il ne suffit pas de grand-chose pour exploser. À Villa , il a été mis dans les meilleures conditions et a trouvé un coach qui l’a mis en confiance. Finalement, Malines n’était qu’un accident de parcours, dû, avant tout, à un problème mental."
"Difficile de garder un tel talent"
De retour de Malines, Christian Benteke espère pouvoir (enfin) s’imposer en bord de Meuse, mais il comprend rapidement qu’il n’en sera rien. Il est devancé par Michy Batshuayi et doit se contenter de simples montées au jeu. Juste avant la fermeture du mercato estival, il signe un contrat de quatre ans à Genk. "Lorsque Dirk Degraen nous a parlé d’un possible retour, Hans Visser et moi avons directement approuvé ce transfert, sans la moindre hésitation", appuie Pierre Denier. "Par rapport à sa première période chez nous, il avait gagné en expérience et en efficacité. Nous en avons rapidement eu la preuve durant les séances d’entraînement, où il faisait beaucoup de bonnes choses. Sur le plan humain, il était, par contre, resté le même, toujours aussi calme."
Dans le Limbourg, la carrière du Diable prend définitivement son envol. Avec seize buts et dix passes décisives, il est l’un des meilleurs joueurs du championnat. "Il formait un super duo avec Jelle Vossen. Lui gagnait les duels et Jelle venait de derrière pour faire la différence. Selon moi, ils étaient aussi complémentaires que les paires Strupar-Oulare et Sonck-Dagano. En plus, Christian avait la chance de pouvoir compter sur des joueurs de flanc, dont Kevin De Bruyne, capables de lui donner de bons centres."
S’il a réussi, c’est aussi parce qu’il n’a pas compté ses heures durant les entraînements. "Il faisait souvent des séances supplémentaires avec notre entraîneur des attaquants. Cela l’a beaucoup aidé dans son développement. Frankie Vercauteren l’a également rendu meilleur dans les combinaisons. C’est juste dommage qu’il ne soit pas resté une ou deux années de plus chez nous, mais un joueur d’une telle qualité, c’est toujours fort demandé sur le marché…"