Toma Nikiforov a préparé la saison 2022 en Mongolie : "Il n’y a pas un repas où je ne pense pas à mon poids"
Toma Nikiforov a repris les stages en… Mongolie, où il s’est essayé à la lutte traditionnelle. Une image tout à fait insolite.
- Publié le 31-12-2021 à 07h54
- Mis à jour le 31-12-2021 à 18h58
Toma Nikiforov adore les fêtes de fin d’année. Dès son retour de stage en Mongolie, où il a passé deux semaines avec son coach Damiano Martinuzzi, il s’est précipité au Marché de Noël, à Bruxelles ! Rien de tel que les "Plaisirs d’hiver", en famille et entre amis, pour terminer 2021 dans la bonne humeur. Toma a pourtant évité un stand en particulier, celui intitulé "Cuisine de Mongolie".
"Je n'en pouvais plus de leur nourriture ! Elle est tellement grasse que c'était devenu insupportable…", sourit notre double champion d'Europe, en forme au retour d'un de ses derniers entraînements de la saison. "Les Pays-Bas ayant tout refermé en raison de la recrudescence du virus, nous avions encore quelques séances à Wilrijk avant de tourner la page de cette année 2021 ! Mais j'aime bien cette période parce que c'est également celle des anniversaires parmi mes proches. Il y a celui de ma mère, de ma femme et, bientôt, le mien."
Le 25 janvier, Toma fêtera ses 29 ans, l’âge de la maturité pour un judoka, même si lui a gardé son âme d’enfant, toujours souriant en dehors du tatami. L’occasion de revenir sur ces derniers mois et, surtout, d’évoquer les prochaines années avec la perspective, en 2024, des Jeux de Paris.
Toma, malgré l’énorme déception, vous avez repris le judo seulement deux mois après les Jeux. Pourquoi ?
"J’en avais envie… L’après-Tokyo a été moralement très compliqué. Je suis rentré en Belgique pour repartir presque aussitôt en Bulgarie, où j’ai atterri en pleine nuit. À l’aéroport, il y avait une vingtaine de proches qui m’ont serré dans leurs bras. Je me suis ressourcé auprès de ma famille et de mes amis, avec ma femme et ma fille. Avec Damiano, on ne s’est ni vus ni entendus pendant tout le mois d’août. Puis, il m’a contacté pour connaître mes intentions, mais ce n’était pas encore le moment. On a laissé passer septembre. Et j’ai repris l’entraînement. À 100 % ! Je ne le voyais pas autrement. Si je reprenais, c’était à fond. Paris tombait trop tôt. J’ai donc repris la compétition au National, le 11 novembre. En +100 kg…"
Et vous avez décroché le titre…
"Oui ! Malgré cette entaille sous le nez qui a provoqué des saignements, je ne pouvais pas rêver mieux pour un retour à la compétition. Je me sentais bien à l’entraînement. Et je pesais 107 kg le matin. Ce qui n’avait pas d’importance là, mais qui signifiait que j’étais proche de mon poids de forme, 105-106 kg, avant de descendre sous les 100 kg."
Pas de problème de poids donc ?
"Sans jeu de mots, le régime est ce qui me pèse le plus dans le judo ! Il n’y a pas un repas où je ne doive pas me dire : ‘Attention, tu es un -100 kg’… Et ce, depuis 2010. Au début, j’étais un jeune -100 kg et je devais perdre deux ou trois kilos pour pouvoir combattre. On ne pouvait pas parler de régime. Ça a commencé à devenir plus compliqué à partir de 2012-2013. Et, aujourd’hui, c’est très dur ! Même si ce combat quotidien rend la médaille encore plus belle, Paris 2024 sera ma dernière Olympiade en -100 kg. Heureusement, ce n’est que dans deux ans et demi."
Que s’est-il passé à Abou Dhabi ?
"J’ai joué de malchance. J’étais assis dans la salle d’échauffement, en train de mettre mes tapes aux doigts. Quand je me suis levé, j’ai ressenti un clac dans le bas du dos. Je ne pouvais plus bouger, plus respirer et j’ai commencé à transpirer. Surpris, Damiano m’a demandé ce qui se passait, mais je ne savais pas. On a demandé de l’aide au staff médical français, dont le kiné a essayé de me manipuler. Sans résultat. Je me suis à peine échauffé avant de monter sur le tatami pour mon premier combat. Je me suis dit que je devais essayer de marquer le plus vite possible. J’ai adopté la même tactique ensuite et ça a marché, même si je combattais comme un robot. Arrivé en demi-finale, face au Russe Adamian, j’ai encore failli gagner. Il m’a sans doute manqué 2 % de vivacité pour que l’arbitre m’accorde ippon. Au lieu de ça, ce fut waza-ari et, cette fois, je n’ai pu tenir jusqu’au bout. Dommage…"
Parlez-nous de ce stage en Mongolie…
"Après Abou Dhabi, on est rentré en Belgique. J’ai consulté mon ostéopathe et, deux jours plus tard, je ne ressentais plus rien ! Avec Damiano, on pouvait donc repartir pour la Mongolie, où on a passé deux semaines. Il n’y avait qu’un entraînement par jour, mais il était particulièrement intensif. Plus de deux heures, une dizaine de randoris (simulation de combat), sans oublier le travail au sol. J’ai terminé le stage par des test-matchs. Intéressant…"
Comment y était la vie avec le Covid ?
"En Mongolie, tout le monde porte le masque, mais tout est ouvert. La population vit avec le virus. Pas comme en Belgique où c’est toujours la panique. Bref, je n’en dis pas plus !"
Vous vous êtes aussi essayé à la lutte ?
"Exact ! La lutte traditionnelle est le sport n° 1 en Mongolie. Et les meilleurs gagnent pas mal d’argent. La règle est que seuls les mains et les pieds peuvent toucher le sol. Dès qu’une autre partie du corps entre en contact avec le sol, vous avez perdu le combat. On raconte que le plus long a duré deux jours ! Car il n’y a pas de limite dans le temps… Ni de catégories. Les lutteurs présentent un centre de gravité très bas, ce qui leur permet d’avoir des appuis costauds. Ils ne sont pas faciles à bouger. Certains judokas mongols se servent de la lutte."