Sarr, dernier capitaine rouche à avoir défié les Gunners: "Arsenal n’avait joué qu’une mi-temps"
Mohamed Sarr revient sur le dernier déplacement du Standard à l’Emirates, c’était en Ligue des champions.
- Publié le 03-10-2019 à 11h01
- Mis à jour le 03-10-2019 à 13h25
Mohamed Sarr revient sur le dernier déplacement du Standard à l’Emirates, c’était en Ligue des champions. Londres. Emirates Stadium. 24 novembre 2009. Un an après avoir fait trembler le Liverpool de Steven Gerrard, après avoir éliminé l’Everton de Phil Neville, le Standard est de retour en Angleterre face à Arsenal pour l’avant- dernière journée de la phase de groupe de Ligue des champions.
Ce soir-là, privé de Steven Defour et Igor De Camargo, Laszlo Bölöni confie le brassard de capitaine à Mohamed Sarr pour un match qui peut encore faire espérer une qualification aux Rouches qui, la journée précédente, étaient venus à bout de l’Olympiacos (2-0).
"On est arrivé à Londres avec le plein de confiance", se remémore le défenseur. "On était bien dans ce groupe et Arsenal était déjà quasiment qualifié. Je pense qu’ils avaient d’ailleurs un gros match de Premier League à préparer le week-end contre Chelsea (défaite 0-3 des Gunners) . Il y avait clairement quelque chose à faire d’autant qu’Arsenal ne nous surclassait pas mais ce soir-là, on a loupé notre match."
Sans idée, les Liégeois ne rivalisent pas avec les Gunners qui prennent l’avance via Nasri avant que Denilson ne scelle la marque juste avant la pause.
"Les Anglais n’ont joué qu’une mi-temps avec ces deux buts avant le repos et ensuite, ils étaient déjà dans la préparation de leur derby londonien. Face à de telles écuries, si tu les laisses développer leur jeu ne serait-ce qu’une mi-temps, tu es mort. On aurait pu, on aurait dû, faire mieux. Il y avait la place pour un match nul voire même pour gagner. Mbokani a eu une belle occasion et Cyriac aussi en fin de match. Après, il n’y avait pas à rougir car en face, c’était une grande équipe d’Arsenal, aujourd’hui, c’est différent."
Cette rencontre, Laszlo Bölöni et les Rouches l’avaient pourtant minutieusement préparée.
"Lazslo savait qu’on partait diminué vu les absences de Steven et Igor et la titularisation de jeunes joueurs. Mais on savait aussi qu’on était capable de réaliser un exploit. On respectait l’adversaire mais on n’en avait pas peur. Pour nous battre, il fallait nous passer dessus."
C’est en qualité de capitaine de la meute rouche que le Sénégalais a abordé ce match à l’Emirates. Pas de quoi changer les habitudes de notre homme pour autant.
"C’était ma première comme capitaine en Ligue des champions en l’absence de Steven et d’Igor mais je ne me focalisais pas sur ça. Je n’ai pas changé mon comportement parce que je portais le brassard. C’est évidemment un honneur d’être capitaine du Standard mais cela n’a rien changé à ce que je faisais avant. Mon discours ? Je ne m’en souviens plus, tu sais, j’ai dit beaucoup de bêtises moi, hein (rires). Plus sérieusement, pour ce genre de match, les longs discours n’étaient pas utiles."
C’est dans un Emirates copieusement garni que les coéquipiers de Mohamed Sarr ont laissé filer la qualification. Un stade qui n’aura pas impressionné le défenseur central.
"Moi, je m’en foutais royalement que ce soit l’Emirates. Arsenal ou pas, je voulais monter sur le terrain, faire mon job et rentrer à Liège. Quant à l’ambiance, c’était bien différent de Liverpool où, à Anfield, les supporters poussent littéralement leurs joueurs et mettent une grosse pression. À Arsenal, j’étais plutôt tranquille d’ailleurs, on entendait bien nos supporters mais ça, c’était logique (rires) ."
En fin de rencontre, un Standardman avait perdu son sang-froid et écopé d’une carte rouge directe. "Ah, l’exclusion de Mehdi (Carcela) . Il avait donné un coup à Fabregas je pense. On l’avait engueulé après la rencontre… Jeudi soir, je ne pense pas qu’il va rééditer ce triste exploit. Aujourd’hui, Mehdi est un meneur, il doit donner l’exemple."
Arsenal: Almunia ; Eboue, Gallas (46e Sylvestre), Vermaelen, Gibbs ; Nasri (60e Walcott), Song, Fabregas, Denilson (66e Rosicky), Arshavin ; Carlos Vela.
Standard: Bolat ; Marcos, Sarr, Felipe, Mulemo ; Goreux, Mangala, Witsel, Carcela, Dalmat (63e Traoré) ; Mbokani (67e Cyriac).
Arbitre : M. Plautz (Aut).
Avertissements : Mulemo, Mangala.
Exclusion : 87e Carcela
Les buts : 35e Nasri (1-0), 45e +1 Denilson (2-0).
"On était supérieur à Liverpool"
L’ancien défenseur sénégalais évoque ses autres déplacements en Angleterre.
En un peu plus d’un an, Mohamed Sarr et ses équipiers se sont exportés à trois reprises outre-Manche. En 2008, les Rouches, alors champions en titre, ont d’abord rencontré Liverpool au dernier tour préliminaire de la Ligue des champions.
Durant 210 minutes (prolongations au retour), les Standardmen ont fait jeu égal avec la bande à Gerrard avant que Dirk Kuyt vienne ruiner les espoirs rouches à deux minutes des tirs au but. "Quand on tire Liverpool, on ne connaît pas encore notre valeur face à un grand d’Europe", se souvient Mohamed Sarr. "En préparation, on ne jouait jamais de gros matchs, on rencontrait souvent des équipes françaises qui nous battaient d’ailleurs. Là, c’était le vrai test. Jamais, je dis bien jamais, je n’aurais pu penser qu’on allait être capable de leur tenir tête à Sclessin, d’avoir énormément d’occasions, de tenir le zéro et même de louper un penalty. On savait qu’on avait de la qualité mais on devait voir où on pouvait se situer, après ce match, on savait. Au retour, on a de nouveau tenu tête à cette grande équipe de Liverpool."
Pour l’ancien liégeois, un seul être a manqué face aux Reds et c’est cette absence qui a tout fait basculer.
"Encore aujourd’hui, je suis persuadé que la saga Jovanovic nous a coûté la qualification. À l’époque, Jova voulait rejoindre le PSV et il n’avait pas joué le match aller. À Anfield, il est monté au jeu en toute fin de match. Avec lui, je suis persuadé qu’on passait car sur les deux matchs, on était supérieur à Liverpool."
Trois semaines après la terrible désillusion de Liverpool, les Standardmen reviennent sur leurs pas mais pour affronter l’autre club de la Mersey, Everton, avec pour objectif : une qualification pour la phase de groupe de la défunte Coupe UEFA.
"Everton, c’est totalement différent. On sort de ce double affrontement contre Liverpool et on sait désormais de quoi on est capable. On revient donc dans la même ville en se disant : on était supérieur à la meilleure équipe de la ville, face à la plus petite, ça va passer. On partage 2-2 mais on aurait dû l’emporter bien plus facilement. Et n’oubliez pas qu’à ce moment-là, on perd Fellaini qui signe à Everton mais on parvient tout de même à les sortir. Je pense que si on s’était qualifié pour la Ligue des champions, Marouane serait resté et on aurait vécu une belle campagne."
"Les belles histoires naissent dans ce genre de match"
Le conseil de Mohamed Sarr aux Standardmen : "Ne les respectez pas trop, sinon ils vous humilient."
Un peu moins de dix ans plus tard, les Vanheusden, Mpoku et autre Lestienne seront-ils capables de faire mieux que les Sarr, Mbokani et Witsel ? L’ancien défenseur sénégalais, lui, y croit.
"Tout est possible. Je n’ai pas encore vu le Standard jouer cette saison donc je ne peux pas me prononcer sur le jeu proposé mais je vois que cela tourne relativement bien. Michel a ensuite l’expérience de ce genre de rencontre donc oui, le Standard a ses chances. Arsenal dispose d’attaquants de grande qualité mais avec une bonne organisation et une projection rapide vers l’avant en contre, il y a moyen de leur faire mal."
Ce jeudi soir à l’Emirates, les Liégeois auront tout intérêt à ne pas être spectateurs comme ils l’ont été, il y a un an, sur la pelouse de Séville (5-1).
"Si tu les respectes trop, ils vont t’humilier", prévient Mohamed Sarr. "Il faut mette le pied, ne pas les regarder comme si tu étais dans ton canapé devant la télé. Durant 90 minutes, les Liégeois vont partager le même terrain, donc qu’ils se donnent à fond pour n’avoir que de bons souvenirs. À l’époque, on avait encaissé une défaite qu’on pouvait qualifier d’honorable. Si on avait pris une correction, j’aurais eu du mal, dix ans après, à vous en parler (rires) ."
Pour Mohamed Sarr, les hommes de Michel Preud’homme doivent avant tout savourer le moment et se dire que cette rencontre pourrait être le début d’une belle aventure.
"Ce sont des matchs uniques, ceux qui peuvent changer une carrière. Regardez Eliaquim Mangala. Lorsqu’on a joué Arsenal, Alain Boghossian était venu superviser les joueurs français des Gunners, les Nasri, Diaby, Clichy, Gallas, Diaby ou encore Sagna mais il a surtout remarqué le petit Frenchie du Standard, Eliaquim, que personne ne connaissait plusieurs mois auparavant. L’histoire d’Eliaquim était alors en marche, il a commencé à être sélectionné chez les Espoirs et on connaît tous la carrière qu’il a eue après avoir quitté le Standard. Tout ça pour dire que c’est ce genre de match qui peut être le début d’une belle histoire."
"Nasri à Anderlecht ? Qui aurait cru que Jova allait signer à Liverpool…"
En 2009, c’est sur un premier but de Samir Nasri que le Standard de Mohamed Sarr a mis un genou à terre à l’Emirates. Le Sénégalais n’est pas surpris de voir, aujourd’hui, l’ancien international français porter le maillot d’Anderlecht.
"L’aurais-je cru, à l’époque, si on m’avait dit que Nasri allait signer un jour à Anderlecht ? Et pourquoi pas. Qui, à ce moment-là, aurait pu imaginer que Milan Jovanovic allait être transféré à Liverpool… ?" Pour l’ancien défenseur central des Rouches, la présence du Marseillais est une aubaine pour notre compétition. "C’est une bonne chose pour le football belge, c’est un grand du football mondial, ça ne peut que valoriser le championnat et aider les jeunes joueurs. Pour le moment, cela semble délicat mais ça va prendre, c’est un grand joueur et il n’a pas perdu toutes ses qualités. Il a eu des problèmes physiques mais il va revenir. Il découvre un nouveau championnat, je ne suis pas inquiet pour lui."