Teklak: "Bruges, c’est malin comme Preud’homme"
L'intelligence de jeu du Club, l'instabilité de la défense anderlechtoise, rien n'échappe à l'oeil aiguisé de notre consultant Alex Teklak. Préface d'une finale de Coupe de Belgique qui s'annonce exceptionnelle.
- Publié le 21-03-2015 à 16h05
1. "Le déclic Malines": Il est impossible de dissocier l’analyse de la défense brugeoise à sa faculté de déjouer le pressing adverse. Et, dans ce sens, les matches face à Malines ont été très importants. Le pressing malinois a fait beaucoup souffrir Bruges et Michel Preud’homme a fini par s’habituer. Dans ce type de rencontre, Bruges allonge désormais le jeu vers De Sutter et souffre moins défensivement en éloignant le danger de la sorte. Ces confrontations ont été un vrai déclic car la défense est soulagée parce que comme souvent, Preud’homme a trouvé un moyen de masquer les lacunes de ses hommes grâce à une ficelle tactique. La grande force de la défense brugeoise est de pouvoir compter sur Ryan. À mes yeux et à tous les niveaux, l’Australien est le meilleur à son poste en Belgique. Sur les côtés, Meunier parvient souvent à inverser le rapport de force en sa faveur en obligeant son vis-à-vis à défendre vu ses qualités offensives naturelles. À gauche, De Bock est le maillon le moins fiable et, très souvent, les adversaires brugeois le ciblent en plaçant dans son couloir un joueur capable de partir dans son dos. Défensivement, le rôle de Simons est aussi fondamental. Même s’ils sont différents, les profils des défenseurs centraux se rejoignent sur un point : ils sont mal à l’aise dans les un contre un quand il s’agit de gérer la profondeur dans le dos, ce qui est aussi lié au fait que Bruges joue très haut. Et dans ce registre, Simons est déterminant pour assurer l’équilibre de l’équipe grâce à sa lecture et son intelligence de jeu. Il est critiqué pour son manque de prise de risques à la relance ? La sécurité défensive qu’il apporte pèse beaucoup plus.
2. Vormer a évolué, Vázquez va manquer: "Un terme définit Vormer : box to box . Son timing pour se projeter vers l’avant est toujours très bon et lui permet de jouer les seconds ballons déviés par de Sutter. Il se replace aussi très vite. Physiquement et mentalement, il est impressionnant par sa rudesse. Il est aussi devenu moins impétueux. Dans cet entrejeu, la répartition des rôles est très naturelle. Vázquez, bien sûr, va manquer. Mais peut-être pas autant que face à un adversaire plus faible. Quand le rapport de force est équilibré, son absence est moins préjudiciable car il faut durcir le jeu même s’il est capable de trouver des passes comme personne en Belgique. Son absence handicape surtout Meunier qui, au lieu de recevoir des ballons en étant lancé, est plus contraint d’amorcer ses montées seules."
3. "Refaelov a gagné en équilibre": Lior Refaelov a changé d’attitude et l’apport de Preud’homme n’y est pas étranger. Il a retrouvé son efficacité mais surtout un équilibre dans son jeu. Comme Praet, il est capable par ses courses sans ballon d’étirer une défense. Il le faisait avant, mais balle au pied. Il surchargeait son jeu alors que là, il a gagné en équilibre."
4. Une menace plurielle gênante pour une finale: "Bruges n’est pas dans le cas d’Anderlecht qui cultive une dépendance à Mitrovic. C’est inhérent au jeu de Preud’homme basé sur les mouvements et la création d’espace. Si, sur une saison, avoir une menace plurielle est un avantage, cela ne l’est pas forcément dans une finale où les occasions seront rares alors que Bruges, justement, en a besoin de plusieurs pour marquer."
"La défense anderlechtoise est instable"
1. Attention, instable: "Un mot qualifie la défense d’Anderlecht : l’instabilité. Elle tient d’abord aux individualités qui la composent : entre les blessures, les suspensions et les arrivées tardives, il y a beaucoup de changements et l’organisation en a pâti. Mais les joueurs ont assez d’expérience pour le gérer. La défense souffre aussi quand le pressing n’est pas bien exécuté au milieu comme contre Gand, notamment sur les côtés où l’instabilité, j’y reviens, est présente à divers degrés. Pour Vanden Borre, elle est émotionnelle et problématique. Pour N’Sakala, elle est dans le positionnement : le Français doit mieux régler la hauteur de son jeu. L’instabilité des latéraux affecte forcément la charnière centrale qui doit composer avec des profils différents : si intrinsèquement Vanden Borre a plus de qualités que Collin, le Français offre plus de gages de sécurité, de tranquillité à ses défenseurs centraux qui, eux aussi, changent beaucoup."
2. L’assurance Dendoncker: "La complémentarité entre Defour et Dendoncker est naturelle comme elle serait entre Tielemans et Dendoncker. C’est d’abord une question de profil et cette entente qui vient d’elle-même permet de gagner du temps. Dendoncker possède une culture tactique impressionnante pour son âge : qu’importe le dispositif, il couvre toujours parfaitement son compère dans l’axe en coupant les lignes de passes adverses, ce qui apporte beaucoup d’équilibre. Sa versatilité lui permet de parfaitement s’adapter à ses partenaires mais aussi à ce que propose son adversaire, ce qui fait de lui une sorte d’assurance tout risque."
3. Praet brille sans ballon, Mitrovic est moins frustré: "Le retour de Praet va faire beaucoup de bien. Les courses gratuites sans ballon qu’il multiplie, le plus souvent entre le défenseur central et son latéral, étirent les défenses et ouvrent des espaces pour Mitrovic. Mitrovic, lui, est meilleur parce qu’il est moins frustré. L’arrivée de Marin, dont il est très proche, lui est bénéfique. Le CV de l’Allemand inspire du respect au Serbe qui a compris tout le bénéfice qu’il pourrait en tirer, d’autant que leurs profils se marient très bien. Mitrovic est aussi mieux dans son corps car mieux dans sa tête, son langage corporel s’en ressent. Il gagne en maturité mais il peut encore mieux faire, notamment physiquement."
4. Un travailleur, un créateur: "Dans l’animation des couloirs, Anderlecht va devoir trouver un équilibre pour ne pas avoir trop de monde devant le ballon. Je ne vois pas Hasi associer deux joueurs de combinaisons comme Marin et Conte de chaque côté dans un match où l’organisation sera capitale. Il est possible d’avoir un joueur plus travailleur d’un côté comme Najar, toujours très utile quand il peut partir de loin et un peu moins face à un bloc bas où il est bridé par ses limites techniques et un plus créatif comme Marin. Surtout, sa faculté à se recentrer pour ouvrir son couloir gauche peut mettre Meunier en difficulté."