Liège inaugure une sculpture en hommage aux “femmes qui n’ont plus de voix”
Une stèle en mémoire des victimes de féminicide trône désormais sur l’esplanade Saint-Léonard : “Nous sommes là, fortes et fières, épaule contre épaule, pour que celles qui ne sont plus là ne soient pas mortes en vain”.
- Publié le 24-04-2024 à 19h30
Mercredi, les cœurs étaient serrés sur l’esplanade Saint-Léonard à Liège. Des dizaines d’hommes et de femmes étaient présentes pour l’inauguration d’une stèle en mémoire des victimes de féminicides et “de ces vies injustement perdues”.
C’est en présence de nombreuses personnalités que la pierre bleue marquée de visages en bronze s’est dévoilée, laissant tomber son drap mauve, symbole de la volonté de faire disparaître les violences de genre.
Fatima, victime des coups à répétition de son ex-mari, a fait l’honneur de raconter à la foule son histoire de survie et de courage. Cette Marocaine est arrivée en Belgique avec “son prince charmant” en 2018. Le rêve s’est rapidement transformé en cauchemar, quand “chaque matin, Fatima se réveillait dans la violence, se demandant, chaque jour si c’était le dernier”.
Il savait que le point faible d'une maman, c'est son enfant".
Après l’emprisonnement du confinement, Fatima a fui avec son fils, mais les violences, elles, n’ont pas cessé. “Il savait que le point faible d’une maman, c’est son enfant”, déclame-t-elle, enfin libérée et se faisant “la voix de celles qui n’en ont plus”.
C’est pour livrer son histoire que Fatima, accompagnée d’autres femmes du quartier Saint-Léonard, a décidé de s’engager dans la conception de cette œuvre, chapeautée par la plasticienne Lissa Gasparotto.
Un accomplissement de taille pour cette artiste, qui dévoilait, pour la première fois, une sculpture dans l’espace public, “alliant de manière si concrète sa pratique artistique et son engagement féministe”. Cette stèle “est un témoignage tangible de la lutte contre le féminicide et elle sera un rappel constant de l’urgence d’agir pour mettre fin à ces violences”, conclut Lissa.
On n'oublie pas, on ne pardonne pas".
Au-delà de représenter la douleur, il s’agit surtout d’un message d’espoir pour Liège, “sa sororité, sa résilience et sa vie”. “On n’oublie pas, on ne pardonne pas”, mais “on continue à lutter pour les droits conquis et pour ceux qu’il reste à acquérir”, déclare Gulistan Özer, animatrice au planning familial Infor-Femmes.
On dénombre 4 féminicides en Belgique depuis le début de l’année ; 26 en 2023. “Madison, Laurence, Delphine, Ingrid, Lise, Maria, Sarah : une de plus c’est une de trop”, déplore Lisette Lombé, poétesse nationale 2024-2025 venue pour l’occasion élever, avec ses mots, la voix des femmes du monde entier et de celles qui ne sont plus là.
”Vous n’êtes pas mortes en vain, se tenir debout de ce côté-ci de la vie, ça tient à rien”, mais les Liégeoises sont là, “fortes et fières, épaule contre épaule”, porteuses de ce grand combat.