Le modèle allemand en péril: Rummenigge se dit "préoccupé par la compétitivité de la Bundesliga"
Le mercato estival l'a encore une fois démontré, les Teutons ne sont pas les plus dépensiers sur le marché.
- Publié le 03-09-2018 à 16h47
- Mis à jour le 22-09-2018 à 22h39
Le mercato estival l'a encore une fois démontré, les Teutons ne sont pas les plus dépensiers sur le marché. "Il va arriver un moment où tous ceux qui dépensent avec fracas autant d'argent ne pourront plus se payer une baguette, parce que le succès sportif ne se programme pas comme se l'imaginent les pourvoyeurs de fonds." Les déclarations sont signées Uli Hoeness. Jamais avare de critiques envers les "nouveaux riches" que représentent Manchester City ou le PSG, le président du Bayern vantait son modèle économico-sportif il y a douze mois. "Une seule équipe peut gagner la Ligue des champions. Les payeurs vont dire: 'Nous avons mis tellement d'argent et nous n'avons rien gagné. Ras-le-bol !' Et là, notre heure viendra." Éliminé lors des 5 dernières éditions de la Ligue des Champions par des clubs espagnols, le "Rekordmeister" n'y arrive plus en Europe alors qu'il écrase tout en Allemagne. Décryptage d'une Bundesliga à la croisée des chemins.
Le 50+1 remis en question
Au mois de mars dernier, les 36 clubs professionnels allemands ont tranché: la règle du 50+1 des investisseurs n'est pas abolie, au grand dam de Karl-Heinz Rummenigge. L'autre patron du Bayern s'est avéré être un pourfendeur de cette loi instaurée en 1998 qui empêche tout investisseur privé de posséder plus de 49% des parts d’un club (et donc de le contrôler). "Nous aurions dû réfléchir aux évolutions du 50+1, cela aurait dû être mis au point jusqu'à la fin de l'année, puis soumis à l'assemblée pour un vote", martelait Rummenigge il y a quelques mois. "Mais c'est devenu un spectacle émotionnel et populiste. Je suis très préoccupé par la compétitivité, nationale et surtout internationale du championnat." Le débat a fait rage chez notre grand voisin au point de créer une fracture philosophique entre le colosse munichois et le grand public, très attaché à cette réglementation. Celle-ci vient prendre le contre-pied d'un football mondialisé et ultra-libéral. Au lieu de vouloir supprimer leur '50+1," les Allemands préfèrent... taper du point sur la table en Europe et pousser pour un fair-play financier encore plus élaboré voire même un "salary cap". L'exportation de leurs idées est donc de mise.
Quid des équipes comme le Bayer Leverkusen, le RB Leipzig ou encore Hoffenheim et Wolfsbourg ? Ces quatre structures ont la particularité d'être la propriété d'un grand groupe (Bayer à Leverkusen, VW à Wolfsbourg et Red Bull à Leipzig) ou d'un mécène (Dietmarr Hopp à Hoffenheim). Elles possèdent par conséquent des moyens importants pour recruter. Pourtant, aucune de ces quatre formations n'ont sorti le chéquier cet été, restant fidèle à la fameuse rigueur allemande très présente dans le monde du football. Ce n'est pas demain la veille qu'un club allemand commencera à payer des millions d'euros pour un joueur, comme cela se produit en Italie, Angleterre, Espagne ou France.
Un manque de compétitivité criant en Coupe d'Europe
Hasard ou pas, les résultats en Coupe d'Europe des clubs allemands ces dernières années sont... consternants. La saison passée, le Bayern a sauvé les meubles en atteignant le dernier carré de la Ligue des Champions. Avec les Bavarois, seuls le RB Leipzig et un Borussia Dortmund moribond (qualifiés en Europa League avec... 2 points dans sa poule de Champions League, le pire résultat pour un club de Bundesliga) avaient passé l'hiver européen. Au niveau de l'indice UEFA, l'Allemagne est (très) largement devancé par l'Italie dans la course pour la troisième place ( 4.822 points d'écart). S'il n'y avait pas eu la réforme des qualifiés en Champions League, les Teutons auraient largement pu craindre un retour de la France et un "gap" encore plus important avec le trio de tête (Espagne-Angleterre-Italie), ce qui aurait condamné leurs 4 représentants. Puis, la dernière finale d'un club allemand en Europe remonte... à 2013 lors du sacre du Bayern devant Dortmund en Ligue des Champions.
Cette saison, Schalke 04 et Hoffenheim arrivent en Champions League avec au final assez peu d'ambition. La première citée a vendu ou perdu ses cadres comme Leon Goretzka (Bayern Munich), Max Meyer (Crystal Palace) ou encore Tilo Kehrer (PSG). Tedesco et ses ouailles ont toutefois un coup à jouer. Le groupe de l'équipe basée à Gelsenkirchen en Ligue des Champions permet de rêver avec des adversaires comme Porto, le Lokomotiv Moscou et Galatasaray. Pour sa première participation à la plus prestigieuse des Coupes d'Europe, Hoffenheim, emmené par Julian Nagelsmann (30 ans), un jeune entraîneur plutôt "hype", l'heure sera à l'apprentissage plutôt qu'à la performance. Dortmund, en reconstruction, peine aussi à recruter des stars dans son effectif qui en perd petit à petit.
Un championnat dominé outrageusement par le Bayern
L'un des autres reproches lancé au pays qui possède 4 Coupes du Monde, c'est l'écrasante domination du Bayern Munich. L'ogre bavarois vient de remporter 6 titres d'affilée, du jamais vu en "Buli". Et rien ne laisse présager que cette hégémonie va se stopper, que du contraire.Grâce à un excellent travail tant au niveau économique et sportif, le Bayern est devenu une machine de guerre. Il a d'ailleurs tendance à attirer les plus grands talents du pays.
Si l'Allemagne sort pléthore de jeunes footballeurs talentueux, les plus doués prennent inexorablement la voie de la Bavière... ou quittent le pays. Les deux latéraux prometteurs, Kehrer et Henrichs, ont rejoint la Ligue 1, par exemple, alors que Goretzka et Gnabry font partie du noyau de Niko Kovac. Avec l'utra-domination du Bayern, recruter des stars pour bonifier la Bundesliga, sans ouvrir trop le portefeuille, est devenu un véritable casse-tête. Les droits télés ont largement été revu à la hausse. Pour la période 2017-2021 la Bundesliga capitalise 1,159 milliards d'€ par an. Les poches sont pleines, les stades sont magnifiques et quasiment remplis chaque week-end et les centre de formation (très performants) fonctionnent à plein régime. Malgré tout ces atouts, la Bundesliga est à la croisée des chemins.