Interviews de rentrée (1/7) | Felice Mazzù: "Samatta et Berge ? Je leur demande tous les jours de rester"
Genk lance sa saison face à Malines avec la Supercoupe de Belgique. L’occasion pour La DH de lancer sa série d’interviews d’avant-reprise avec Felice Mazzù, qui peut remporter le premier trophée de sa carrière d’entraîneur ce samedi.
- Publié le 20-07-2019 à 13h22
- Mis à jour le 21-07-2019 à 21h02
Genk lance sa saison face à Malines avec la Supercoupe de Belgique. L’occasion pour La DH de lancer sa série d’interviews d’avant-reprise avec Felice Mazzù, qui peut remporter le premier trophée de sa carrière d’entraîneur ce samedi. Il a troqué son training zébré pour le bleu de Genk. Mais les initiales sur son torse n’ont pas changé : FM. Comme Felice Mazzù.
Alors que Genk dispute la Supercoupe face à Malines, ce samedi, en guise d’ouverture de la saison 2019-2020, le nouveau coach du Racing évoque la préparation des siens, le mercato animé, ses ambitions mais aussi son ressenti personnel dans le nouveau challenge qu’il a décidé de se lancer. Entretien.
Felice, comment se passe votre nouvelle vie ?
"Bien, je prends mes marques. Le début de la préparation n’a pas été évident vu les nombreux absents qui ont reçu des congés supplémentaires après des matchs avec leur équipe nationale. Il y a eu l’histoire Malinovskyi. Tout n’a pas été évident mais je pense qu’on s’en sort plutôt bien avec le staff, qui m’aide énormément."
Ces absences ont tout de même permis de retirer des enseignements des matchs amicaux, tous remportés par Genk ?
"Oui, surtout les deux derniers, lors du stage (victoires face au Maccabi Tel Aviv, 4-1, et face au Lokomotiva Zagreb, 3-0). Les joueurs ont été appliqués et sérieux par rapport à ce qui avait été mis en place, tout en gardant la continuité de ce qui avait été fait avec Philippe Clément. J’essaie aussi d’apporter mes idées et ma vision, dans l’aspect défensif notamment. C’est là-dessus que j’appuie le plus. Pas pour jouer de manière défensive, mais pour être organisé."
Votre équipe est prête à déjà disputer la Supercoupe ?
"Je pense que l’équipe n’est pas trop mal, même si on est un peu en retard vu la préparation chamboulée. C’est à moi de faire les bons choix entre l’équipe que Philippe avait mis en place pour gagner du temps en termes d’automatismes ou essayer d’injecter l’un ou l’autre nouvel élément."
Battre Malines, ce serait remporter votre premier trophée en tant qu’entraîneur.
"Oui, c’est ma première possibilité de gagner un trophée. Mais si on le remporte, je ne me l’attribuerai pas spécialement. Pour moi, c’est toujours le mérite de Philippe Clément et du groupe qui a été champion la saison dernière. C’est une finale du championnat dernier, le mérite n’est donc pas le mien. Mais si on a la chance de la gagner, je serais très heureux. Je suis excité à cette idée."
Que manque-t-il à votre équipe pour être prête à tenir une routine de championnat ?
"La chose que j’aimerais, c’est avoir un noyau définitif. Je sens que ce n’est pas encore le cas et c’est dérangeant. Le vestiaire doit être concentré un maximum, en ayant des certitudes. C’est important pour pouvoir construire quelque chose avec des joueurs."
Vous êtes heureux de la manière dont se déroule le mercato jusqu’à présent ?
"Je l’accepte car c’était acquis au moment où j’ai signé. Je savais qu’il y allait avoir du mouvement. À Charleroi, j’acceptais de devoir vendre un joueur tous les six mois ou tous les ans. Ici, j’accepte que la préparation soit un peu perturbée par les mouvements du mercato."
Samatta et Berge resteront à Genk cette saison ?
"Je l’espère. J’apprends à connaître mes joueurs mais que ce soit l’un ou l’autre, je leur glisse souvent que j’aimerais bien qu’ils restent et qu’ils seraient pour moi des joueurs importants. Mais je ne peux pas me mettre à la place de quelqu’un. Ce sont des garçons positifs, avec qui les choses se passent bien. Mais je crains encore des départs, oui. Et pas forcément ces deux-là."
S’il reste en l’état, le noyau actuel est compétitif ?
"Oui, même si on a encore des discussions avec Dimitri De Condé pour l’un ou l’autre joueur dans le secteur offensif. Si un joueur estime qu’il n’aura pas assez de temps de jeu cette saison, peut-être faudra-t-il amener quelqu’un d’autre."
Comme cela a été fait pour Malinovskyi : son départ a directement été compensé par l’arrivée d’Hagi.
"Oui, les profils sont assez similaires. Ce sont des joueurs qui voient le jeu et les espaces, ils savent donner des bons ballons, des phases arrêtées. Hagi est peut-être un peu moins explosif mais c’est un joueur créatif, comme Benjamin Nygren. Quand j’estimerai qu’Hagi sera prêt, il sera important pour l’équipe."
Ces joueurs qui ont des qualités différentes de ce que vous avez connu à Charleroi. Comment vivez-vous ce changement de style collectif ?
"Je le vis bien car j’étais demandeur de cela. C’est toujours plus agréable de pouvoir composer des entraînements avec de la possession. On en faisait aussi à Charleroi mais on se basait également beaucoup sur les reconversions."
Quels sont les changements majeurs constatés en un mois entre Charleroi et Genk ?
"D’abord les infrastructures. Ici, je sors de mon vestiaire, j’ai 100 mètres à faire et nous sommes sur le terrain d’entraînement. C’est un gain de temps, les joueurs sont plus frais. Si un joueur se blesse, il est directement pris en charge, tout est sur place. En hiver, la manière dont on se déplaçait à Charleroi, en bus, n’était pas toujours évidente. Je ne sais pas si cela permettra d’être plus performant, car on a toujours bien travaillé au Sporting, mais pour un entraîneur, c’est plus agréable. L’autre différence, c’est le personnel. Il y a des gens partout ici, qui gèrent énormément de choses. Cela me permet, à moi, de me concentrer uniquement sur le sportif."
Avec votre nouveau staff, qui n’a plus rien à voir avec celui de Charleroi.
"J’ai essayé d’avoir l’une ou l’autre personne de mon ancien staff au Sporting. Cela ne s’est pas fait, c’est comme ça. Ici, j’ai rencontré un staff très amical qui fait tout pour m’aider et m’intégrer, tant au niveau de la manière de travailler que de la langue."
Vous parlez à vos joueurs en anglais ?
"Oui. Je l’ai dit à mes joueurs : mon anglais n’est pas parfait mais il est suffisant pour qu’on se comprenne et qu’on mette des choses en place. Je leur dirai toujours ce que je pense, même si je dois faire une inversion dans ma phrase. Les joueurs l’ont compris. Le groupe est respectueux, réceptif et c’est très agréable de travailler avec lui."
Et le néerlandais ?
"Je prends des cours, seul pour le moment, vu la charge de travail durant la préparation. Mais je vais les intensifier, comme c’est prévu dans mon contrat."
Reconduire le titre, c’est aussi prévu dans votre contrat ?
"(sourire) On veut faire la meilleure saison possible. Je suis conscient que reprendre une équipe championne est le plus gros risque dans ma carrière. J’ai dit aux joueurs qu’une année qui suit un titre n’est pas toujours évidente dans l’état mental. Si la motivation n’est plus présente parce que les joueurs pensent qu’ils ont tout gagné, on se dirige vers une saison difficile. C’est là qu’il faut faire le déclic, dans la tête. Vouloir gagner, gagner et gagner."
Insister sur l’aspect mental, cela a toujours été une de vos caractéristiques en tant qu’entraîneur.
"J’appuie beaucoup là-dessus, c’est vrai. Ici, ce sera en anglais. J’espère trouver toujours le petit mot qui fera sourire le joueur ou le mettra dans un confort. C’est une partie de moi qui est importante. Un exemple : mardi, on a fait une opposition et j’ai mis deux défenseurs centraux gauchers en défense. Les joueurs se sont regardés, en ne comprenant pas très bien pourquoi. Je les ai regardés et je leur ai dit : l’année passée, vous avez été champions, donc jouer avec deux gauchers ne devrait pas poser de problème. Ils ont rigolé et on a commencé l’exercice. Je faisais déjà ça à Charleroi… mais en français."
Avec le recul, comment avez-vous vécu votre séparation avec Charleroi ?
"Difficilement. Et je suis toujours dans une période de nostalgie. Mes parents, qui ont un certain âge, ma femme et mes enfants me manquent. Ma famille, c’est le point qui m’a fait le plus réfléchir avant de signer. C’est surtout ça qui a changé dans ma vie. Le reste, c’est la même chose : j’arrive à l’entraînement, je donne entraînement, je suis en training toute la journée. Tout ça n’a pas changé. Ce qui change, c’est que je suis loin de ma famille. C’est ce qui m’a mis le plus de pression pour me décider. Aujourd’hui, je pense que cela s’emboîte bien avec mes enfants et ma femme. Parfois, ils viennent à Genk, dans l’appartement que le club m’a mis à disposition, parfois, je vais à Charleroi. J’ai une heure vingt de route, par Bruxelles. Avec mes parents, auxquels je suis très attaché, cela s’emboîte un peu moins bien. J’ai besoin de les voir deux ou trois fois par semaine, comme c’était le cas l’année passée. Ces moments-là, je ne vais plus les avoir. Et le téléphone, ce n’est pas pareil."
Vous suivez encore ce qui se passe au Sporting ?
"De loin, oui. Je lis les articles de presse, j’ai des contacts réguliers avec Pierre-Yves Hendrickx. Un peu moins avec Mehdi Bayat, je vais penser à le contacter d’ailleurs car on a toujours eu une bonne relation."
Vous avez été surpris que Karim Belhocine devienne votre successeur ?
"Je ne me permettrais pas d’être surpris. Je respecte les choix qui ont été faits."
Parmi votre ancien staff carolo, seul Michel Iannacone n’a pas été conservé. Mais il vient de retrouver un poste à Tubize.
"Il mérite pourtant beaucoup mieux. Je lui souhaite d’ailleurs que Tubize ne soit qu’un passage. Mais globalement, même si la situation de Michel n’est pas facile, je suis soulagé que personne ne soit sur le carreau. Si j’étais resté, les choses auraient sans doute évolué différemment. Mais je ne peux pas être tenu responsable pour une décision qui a été prise avec Mehdi Bayat après six ans."
Vous vous réjouissez d’affronter Charleroi ?
"Pas du tout. C’est la première date que j’ai regardée après la sortie du calendrier : on ira au Mambourg le 13 septembre. Je ne me réjouis pas du tout, cela va faire bizarre. C’est mon premier club, mon premier président, mes premiers joueurs de D1. Cela ne sera pas facile du tout, même si je préparerai ce match comme tous les autres."
Vous auriez préféré d’abord les recevoir ?
"Peut-être, oui. J’aurais aimé aller à Charleroi beaucoup plus tard pour que toutes mes émotions aient disparu, que j’aie pris un peu de recul. C’est comme une rupture, par rapport à la ville, la famille, Pierre-Yves, Mehdi, les joueurs. Je n’oublierai jamais Charleroi mais je peux prendre du recul et m’en détacher. Aujourd’hui, ce n’est pas encore fait."
Le match qui suivra le déplacement au Mambourg, ce sera un match de Ligue des champions. Là aussi, l’émotion sera grande. Quel est votre objectif dans cette compétition ?
"Prendre des points (rires). J’espère qu’on sera performant et qu’on aura une belle visibilité. Au pire, j’espère qu’on pourra terminer troisième et se qualifier pour l’Europa League. S’il y a mieux, tant mieux."