Dimitri Peyskens, seul cycliste pro bruxellois: "Faire du vélo à Bruxelles n’est pas facile, voire dangereux"
Dimitri Peyskens est le seul cycliste pro qui vient de Bruxelles. Le natif d’Uccle et résident de Watermael-Boitsfort analyse les raisons de l’absence de Bruxellois dans le peloton.
- Publié le 03-07-2019 à 15h19
- Mis à jour le 03-07-2019 à 15h20
Dimitri Peyskens est le seul cycliste pro qui vient de Bruxelles. Le natif d’Uccle et résident de Watermael-Boitsfort analyse les raisons de l’absence de Bruxellois dans le peloton. Pas facile de capter Dimitri Peyskens (27 ans). En pleine préparation du Tour d’Autriche, le Belge a trouvé un peu de temps sur son trajet vers les Ardennes. "Histoire de faire un peu de qualitatif avant d’attaquer les montagnes", sourit-il.
Son planning est ultra-serré et ne lui laissera pas le loisir de se rendre au Grand Départ bruxellois du Tour du France. Un événement qu’il aurait aimé vivre en tant que spectateur, à défaut de le courir.
"On ne fait pas toujours ce que l’on veut. En revanche, je pourrai logiquement voir l’arrivée de la première étape. Je ne veux pas louper ça."
Né à Uccle d’un père bruxellois francophone et d’une mère flamande, Dimitri Peyskens se considère comme un vrai "zinneke", un bâtard mais surtout un vrai Belge. Un Bruxellois même. Domicilié à Watermael-Boitsfort et ex-étudiant à la VUB, il possède un profil comme on en fait plus. En tant que Bruxellois, il fait figure d’exception dans le monde du cyclisme professionnel.
Cela doit vous faire plaisir de voir que la vraie star du Tour se nomme encore Eddy Merckx, 50 ans plus tard…
"C’est normal. Merckx reste le plus grand coureur de tous les temps. Imaginez, il a directement gagné le Tour de France. Dès sa première participation."
Les cyclistes bruxellois sont devenus une denrée rare. Pensez-vous qu’il était simplement plus facile de s’entraîner en partant de la ville à l’époque de Merckx ?
"Je n’étais pas né mais je pense qu’il y avait moins de circulation que maintenant. Faire du vélo à Bruxelles n’est pas facile, voire dangereux. Il n’y a que peu d’endroits sécurisés. Si j’avais des enfants, je les pousserais vers un sport avec plus de sécurité. Il est plus simple d’aller au foot ou au tennis que de faire du vélo."
C’est aussi plus cher…
"Oui clairement, le matériel est un investissement. Et la rentabilité est moindre si l’on espère que son enfant soit pro. On n’a pas le salaire d’un footballeur."
Même pour un cycliste chevronné comme vous, c’est difficile que quitter la ville à deux-roues…
"J’ai l’avantage de vivre en bordure de la forêt de Soignes. Je m’en vais de ce côté-là quand je m’entraîne chez moi. Sinon, je dois quitter la ville en voiture. Je ne pars jamais vers le centre-ville. Enfin, sauf lors des journées sans voitures. J’adore passer dans certains endroits infréquentables habituellement pour un cycliste."
Est-ce un problème d’infrastructures ?
"Il y a trop de voitures dans Bruxelles et beaucoup de gens stressés. Mais clairement, il faut améliorer les infrastructures. J’ai pu un peu voyager et deux exemples me viennent en tête : Amsterdam, où tout est fait pour les cyclistes, et New York."
New York, vraiment ?
"Oui, rien qu’à Central Park, il y a des voies spéciales pour les vélos. J’ai été me poser au café de la marque Rapha et j’ai rencontré des coureurs qui revenaient de sorties aux alentours de la ville et qui roulaient sans le moindre problème."
Ce qui est assez paradoxal, c’est que Bruxelles reste une ville peu adaptée au cycliste et pourtant ils sont largement plus nombreux qu’avant…
"Le vélo se popularise dans toutes les grandes villes. Les politiques veulent réduire le nombre de voitures mais il faut des actes qui vont dans ce sens. À commencer par une adaptation des voies de circulation. Même sortir de Bruxelles ou rouler aux alentours n’est pas simple."
N’y a-t-il pas également un manque de hype du vélo ?
"Pour les jeunes Bruxellois, c’est plus cool de jouer au hockey ou au tennis… Pourtant, je trouve que la communauté cycliste de Bruxelles ne cesse de grandir."
L’absence de coureurs bruxellois n’est-elle pas également liée à une tradition cycliste plus ancrée en Flandre et dans les villages ?
"J’étais dans l’échappée au Tour des Flandres et quand je suis arrivé sur les premières côtes, je me suis rendu compte à quel point c’était la folie en Flandre. Sur les classiques Ardennaises, c’était génial aussi mais un cran en dessous niveau ambiance."
Pensez-vous que Remco Evenepoel peut donner le goût du vélo à la nouvelle génération de Bruxellois ?
"Il peut aider à créer une nouvelle vague dans le cyclisme. On l’appelle déjà tous le prochain Merckx. Il peut inspirer une génération comme l’a fait Boonen. J’ai commencé le vélo grâce aux exploits de Tom. Remco est jeune, bilingue et même s’il vient de la périphérie, il a un côté bruxellois qui peut plaire aux habitants de la capitale."
"La folie de Grammont et les photos de l’Atomium"
S’il sera en Autriche durant le passage du Tour dans sa ville de Bruxelles, Dimitri Peyskens a bien analysé le parcours de la Grande Boucle.
"Ils passent dans de beaux endroits de Bruxelles comme le bois de la Cambre. Puis, démarrer devant le palais royal, c’est exceptionnel. Je conseille d’ailleurs aux gens d’aller tâter l’atmosphère sur la place des Palais pour le départ du contre-la-montre par équipes."
Pour la première étape, il a une petite préférence pour le Brabant flamand. "Le mur de Grammont, c’est un mythe et c’est toujours la folie. Il y aura du monde mais les passionnés doivent s’y rendre. À Bruxelles, je pense que l’arrivée au sprint au pied de l’Atomium en vaudra la peine. Surtout pour prendre de belles photos."
Pour faire oublier les propos de Trump
La capitale commence à se parer de jaune et pourtant beaucoup de Bruxellois parlent plus des embarras que va provoquer le Tour que de l’impact positif qu’il aura sur la ville.
"Le dernier véritable événement sportif de cette envergure à Bruxelles, c’est l’Euro 2000. Les gens ne se rendent pas compte. Plus de 200 pays regardent l’événement. C’est un truc immense. Pour Bruxelles, c’est une opportunité. On sera au centre du monde à peine deux ans après que Trump ait qualifié la ville de ‘trou à rats’. On va montrer au monde la beauté de Bruxelles."