Son amour pour le Stockeu, un stage en altitude en province de Luxembourg et son adaptabilité entre pavés et Ardennes : zoom sur le caméléon Benoot
Tout frais papa pour la deuxième fois, le coureur de chez Visma | Lease a Bike refermera dimanche sur la Doyenne un printemps très éclectique.
- Publié le 21-04-2024 à 08h24
Dame nature sait parfois se donner les moyens d’imposer sa loi. Initialement prévue pour le 24 avril, la naissance de la petite Loes Benoot est venue chambouler mardi la préparation de son champion de père aux classiques ardennaises. Avec plusieurs plateaux-repas partagés à l’hôpital avec sa compagne Fien et un déficit de quelques heures de sommeil, le coureur de chez Visma | Lease a Bike aura connu préparation plus optimale à un monument. “Mais c’est accessoire, je fonctionnerai avec une autre sorte d’énergie”, sourit le Gantois.
Incarnation de la polyvalence sur deux roues, Tiesj Benoot clôturera dimanche à Liège-Bastogne-Liège une première partie de saison qui l’aura amené du soleil de l’Algarve aux collines ardennaises (3e de l’Amstel et 9e de la Flèche wallonne) en passant par les pavés flandriens (4e d’À Travers la Flandre et longtemps en lice pour un podium sur le Ronde). Un dernier rendez-vous qui tient bien plus de l’objectif que du devoir. Monologue d’un pape de l’éclectisme.
La combinaison classiques flandriennes et ardennaises
”Du week-end d’ouverture de la saison belge à la Doyenne, ma période des classiques s’étend cette année sur 8 semaines. C’est long et il est essentiel de ne jamais perdre sa concentration mentale et physique durant toute cette période. Pour réussir à demeurer compétitif tout au long de ces deux mois, il faut pouvoir disposer d’un programme de course construit en conséquence. L’impasse sur Paris-Roubaix est par exemple, dans mon cas, extrêmement importante, car elle me permet de reposer certaines bases à l’entraînement. Après le Tour des Flandres, je me suis accordé deux journées d’activité très légère avant de faire un gros bloc de travail de sept jours au cours duquel j’ai avalé 30 heures de vélo. Cela peut paraître beaucoup, mais la fenêtre de récupération avant l’Amstel est suffisante pour y arriver suffisamment frais. Durant cette période d’entraînement, j’ai passé quatre nuits dans l’hôtel Taeru, à Erezée (province de Luxembourg), disposant de chambres simulant l’altitude. J’en ai profité pour déjà parcourir la finale de la Doyenne et constater à quel point les routes deviennent de plus en plus mauvaises en Wallonie. Elles sont parfois difficiles en Flandre, mais j’ai le sentiment que c’est encore pire au sud du pays.”
Je suis plus léger que les vrais Flandriens et plus lourd que les purs Ardennais...
Son profil hybride
”Ce qui me motive à combiner la campagne des flandriennes avec les classiques ardennaises, c’est le fait que je peux être performant sur les deux types de terrains. Cela tient en grande partie, je crois, à mon profil hybride. Avec mes 72 kilos pour mon mètre nonante, je suis un peu plus léger que le profil type des coureurs de pavés mais un peu plus lourd que les puncheurs grimpeurs qui brillent sur les côtes des Ardennes. Et le manque d’explosivité qui me fait parfois défaut sur la campagne du Nord me permet de tenir mon rang une fois que l’on entre sur un terrain plus vallonné. Me suis-je déjà demandé s’il n’aurait pas été plus intéressant que la nature fasse un choix plus affirmé dans le panel de mes qualités ? Non, car je n’ai plus la maîtrise sur le sujet (rires)… C’est certain que si je pouvais m’appuyer sur un bon sprint, mon palmarès serait autrement plus fourni (4 victoires pros), mais je suis fait comme ça. Et quand je suis dans une finale d’une grande course comme dimanche dernier à l’Amstel, cela me rend heureux. C’est pour des moments comme ceux-là que je m’entraîne.”
L’altitude clé de la fraîcheur
”Cette année, avec le staff de l’équipe, nous avons donc choisi de déplacer notre traditionnel stage en altitude de février à mars. À raison, je pense, car tout me porte à croire qu’il s’agissait là de l’option la plus judicieuse. Avoir été quelque peu contraint et forcé de faire une croix sur les Strade et Tirreno m’a offert davantage de fraîcheur mentale et physique. J’ai même parfois le sentiment que ma saison n’a commencé que sur le GP de l’E3, fin mars. On ne refera jamais l’histoire, mais pour avoir partagé ce camp d’entraînement sur les pentes du volcan Teide avec Wout (van Aert), j’avais vraiment l’impression qu’il était dans une forme exceptionnelle au sortir de celui-ci et qu’il était en route pour être extrêmement compétitif sur le Ronde et Paris-Roubaix. On ne le saura malheureusement jamais…”
Stockeu et le Rosier, ses côtes favorites
”J’ai toujours beaucoup aimé aller m’entraîner en Ardenne. Comme beaucoup, j’ai découvert la région de la Gleize au travers des sélections nationales et des camps d’entraînement réalisés dans ce petit village. J’y suis ensuite retourné à de très nombreuses reprises de manière individuelle. Le profil des côtes de cette région, qui représentent le plus souvent entre 3 et 10 minutes d’effort, me convient vraiment bien, mais j’adore particulièrement Stockeu. La côte de Stavelot est difficile mais pas trop et j’aime le décor vers lequel elle mène. J’apprécie aussi beaucoup le Rosier. En course, j’ai par contre déjà dû constater à plusieurs reprises que la Roche aux Faucons m’était souvent fatale. Je suis entré à trois reprises dans le Top 10 (NdlR : 7e en 2023 et 2021 et 8e en 2020), mais c’est souvent là que j’ai dû plier les voiles. Comme l’ensemble de la Doyenne, qui est une des courses les plus honnêtes de la saison, dans le sens où les jambes parlent toujours plus que la tactique, cette difficulté ne ment pas. Et le fameux rapport poids-puissance m’est souvent défavorable, face à des gars comme Pogacar ou Evenepoel, pour ne citer qu’eux.”