Chemins de terre : routes vers la gloire ou sentiers de la discorde ?
Ce samedi, les fans de vélo répondront présents pour ce qui constitue certainement une des courses les plus passionnantes de la saison, les Strade Bianche.
- Publié le 07-03-2019 à 15h53
Ce samedi, les fans de vélo répondront présents pour ce qui constitue certainement une des courses les plus passionnantes de la saison, les Strade Bianche.
Il y a douze mois, Tiesj Benoot, le visage maculé de boue, franchissait la ligne d'arrivée des Strade Bianche en vainqueur. Quelques instants plus tard arrivait Wout van Aert exténué, pris de crampes, obligé de mettre pied à terre dans les rues de Sienne menant à la Piazza del Campo. Ces deux images contribuent comme beaucoup d'autres à marquer un peu plus la gloire de la jeune classique italienne.
Ce n'est en effet qu'en 2007 que l'épreuve fut disputée pour la première fois. Son arrivée à Sienne sur la prestigieuse Piazza del Campo ou ses paysages magnifiques avec des routes parcourant les vignobles toscans lui donnent déjà beaucoup de cachet. Mais ce qui fait la renommée des Strade Bianche, "routes blanches" en italien, ce sont surtout ces routes empierrées, ces chemins de terre qui ont fait de cette classique une course unique qui a acquis un statut d'incontournable dans le calendrier. Certains la considèrent déjà comme le sixième monument du cyclisme alors qu'elle existe depuis moins de quinze ans... et cette réussite a fait des émules. Depuis quelques années, le nombre de courses proposant ce genre de chemins aux coureurs a augmenté.
En France, le Tro Bro Léon, qui se dispute chaque année à la mi-avril, le même jour que l'Amstel Gold Race, est considéré comme le Paris-Roubaix breton. Là-bas, on parle de "ribinoù", pour appeler ces chemins de terre qui caractérisent la course autour de la petite ville de Lannilis. Si la course bretonne existe depuis 35 ans et que son ancrage local est établi depuis des décennies, cela ne fait que quelques années qu'elle a acquis un véritable statut international.
En Belgique, les organisateurs ne sont guère en reste. En 2017, Nick Nuyens relançait une petite course amateure, À travers le Hageland, en changeant totalement son parcours. Il s'inspire très fort de ce que font les Strade Bianche tout en l'adaptant à la sauce belge. Résultat, les routes blanches sont remplacées par des chemins de terre, empruntés d'habitude par les tracteurs et autres véhicules agricoles et la citadelle de Diest joue le rôle de la Piazza del Campo. En septembre dernier, Guillaume Van Keirsbulck remportait, quant à lui, la première édition de l'Antwerp Port Epic. Si toutes ces courses n'attirent pas autant les grands noms du peloton que les Strade Bianche, le spectacle est, lui, toujours au rendez-vous.
Les grandes classiques s'y mettent
Certaines courses de renom ont également cédé à la tentation d'ajouter des chemins de terre dans leur parcours pour dynamiser leur épreuve. Ainsi, depuis 2017, la classique Gand-Wevelgem passe par les "Plugstreets", trois petits secteurs non-goudronnés situés à une soixantaine de kilomètres de l'arrivée autour des cimetières militaires commémorant la première guerre mondiale. Mais la longueur totale de ces tronçons (moins de cinq kilomètres) et leur position dans le parcours ne leur donnent pas une importance prépondérante.
Plus récemment, Paris-Tours a également adapté son parcours pour y ajouter des chemins de vigne. Une innovation qui devait empêcher la classique des feuilles mortes de se terminer par un traditionnel sprint dans les rues de Tours, mais qui tourna au fiasco. Les chemins étaient dans un tellement mauvais état que de nombreux coureurs, tels que Philippe Gilbert ou Arnaud Démare, ont affiché leur mécontentement, qualifiant la course de loterie, à celui qui ne crèvera pas. Le manager de l'équipe Quick-Step, Patrick Lefevere avait réagi de manière virulente en affirmant que son équipe ne remettrait plus jamais les pieds sur Paris-Tours. Malgré tout, les chemins de vigne seront encore présents cette année sur la classique... avec quelques ajustements promis par Thierry Gouvenou, le directeur de course.
Routes blanches, chemins de terre, ribinoù ou chemins de vigne, autant de termes qui font frémir certains d'angoisse, d'autres de joie mais qui ne laissent, en tout cas, jamais indifférents.