Evenepoel, fidèle au rendez-vous et meilleur sous la pression
Le jeune Belge a dominé le chrono chez les juniors, premier pas vers une carrière qui s’annonce bien
- Publié le 26-09-2018 à 08h24
- Mis à jour le 26-09-2018 à 08h28
Le jeune Belge a dominé le chrono chez les juniors, premier pas vers une carrière qui s’annonce bien Remco E-ve-ne-poel ! Même si vous ne retenez pas ce nom, vous risquez d’en entendre encore souvent parler dans le futur.
À Innsbruck, le Brabançon est devenu le nouveau champion du monde du contre-la-montre chez les juniors. Le premier volet de son pari est réussi, car le jeune Belge, 18 ans, espère maintenant réussir le doublé ce jeudi en décrochant un deuxième maillot arc-en-ciel au terme de la course en ligne.
Le coureur de Schepdaal, aux portes de Bruxelles, a surclassé ses adversaires, et le mot n’est pas assez fort. À plus de 50 km/h de moyenne, l’ancien joueur du Sporting d’Anderlecht a devancé l’Australien Lucas Plapp de 1:23 !
" Remporter ce chrono était le premier pas obligatoire en vue du doublé et puis je trouve que le chrono, ça ne ment pas, c’est la plus belle discipline ", avoue Evenepoel, troisième Belge à devenir champion du monde de chrono chez les juniors, après Jurgen Van den Broeck (2001 à Lisbonne) et le regretté Igor Decraene (2013 à Florence).
Le futur professionnel de l’équipe Quick-Step Floors a d’ailleurs dédié son succès à son malheureux prédécesseur, décédé dans des circonstances tragiques (il avait été renversé par un train) en 2014. " J’ai rencontré sa famille il y a quinze jours, lors de la course contre-la-montre qui porte son nom, ses parents m’avaient demandé de gagner pour lui ", expliqua Evenepoel. "J ’y ai pensé avant le départ et encore en passant la ligne."
À ce moment, Remco Evenepoel savait depuis un certain temps qu’il allait s’imposer. " J’ai rapidement su que j’étais bien parti, la fédération avait placé des gens sur le parcours et j’étais donc renseigné sur les écarts" , dit-il. " Pourtant, les trois, quatre premiers kilomètres, j’étais prudent, ce n’est que vers le dixième que j’ai vraiment tout donné. À 500 mètres de l’arrivée, Carlo (NdlR : Bomans, le coach des juniors) m’a dit que j’allais gagner. C’est vraiment une sensation très agréable de pouvoir fêter son succès dans un chrono avant de passer la ligne. C’est le plus grand moment de ma courte carrière cycliste, d’autant que ce succès m’enlève un poids, la saison a été longue... "
L’ancien Diablotin, dominateur de toute la saison, présenté comme le grandissime favori, ne pouvait pas perdre en effet. " Depuis mon succès dans la Course de la Paix, je me suis mis une pression positive" , affirme-il. " J’ai énormément travaillé pour arriver au sommet durant cette semaine, qui devait être ma semaine. Je suis manifestement en condition, mais un chrono peut se perdre rapidement, sur crevaison, sur chute."
Remco Evenepoel, qui a joué une dizaine d’années au football dans les catégories d’âges, est passé au cyclisme il y a moins de deux ans. "Je n’ai aucun regret d’avoir arrêté le foot ", souriait-il. " Vraiment pas. Quand j’étais plus jeune, j’ai toujours aimé les deux sports, je regardais les matches et les courses à la télé avec mon père. J’ai commencé par jouer au foot, puis j’ai choisi le cyclisme. Au début, c’était difficile car ce sont d’autres muscles (NdlR : il a perdu 8 kg, passant de 70 à 62 kg). Je suis vraiment heureux de ma vie actuelle en cyclisme, quand on est fort, on a de grandes chances de gagner. "
Dès cet hiver, le Brabançon flamand changera de statut en intégrant, à moins de 18 ans (il en aura 19 fin janvier), l’équipe Quick-Step Floors où il a signé pour deux ans avec une option de deux années supplémentaires. " Une nouvelle vie va commencer quand je passerai pro, cet hiver. Mais je veux d’abord profiter de ceci. On dit que je suis le nouveau Cannibale, mais ça me laisse froid. Je n’aime pas spécialement être comparé à Merckx ou à quelqu’un d’autre. Tout a changé, tout est nouveau, rien n’est pareil depuis son époque, les courses, les coureurs, les vélos, les méthodes d’entraînement. Moi, j’ai des rêves élevés, c’est vrai. Quand je fais quelque chose, je me donne à fond. "
Ses parents: "Plus il est sous pression, meilleur il est"
À peine descendu de son vélo, le nouveau champion du monde s’est précipité dans les bras de ses parents, Agna et Patrick. L’émotion était à son comble au sein du trio. "On n’avait pas de temps intermédiaires ; nous étions nerveux", confessait la maman, mais le père, avec son œil d’ancien coureur professionnel, avait vite compris. "Dans un chrono, on doit toujours attendre les premiers temps, mais j’ai vu à sa fréquence de pédalage et au développement qu’il poussait dans certains passages que c’était bon et en effet, dans la côte, j’avais un pointage sur l’Australien (NdlR : Plapp, le deuxième)qui m’a rassuré. On savait qu’il était en forme et focalisé, mais je ne m’attendais pas à de tels écarts. Lui-même avait prédit qu’il roulerait en 33 : 20 et il a fait 33 : 15."
Les parents du champion attestent de sa tranquillité. "Il n’était vraiment pas nerveux, il m’a envoyé un message cette nuit qui montrait sa confiance", disait l’ancien coureur de Collstrop. "Face à la presse, il était prudent, mais je sais qu’en lui-même, il était très motivé. De toute façon, plus il est mis sous pression, meilleur il est. C’était déjà le cas autrefois au football."
Quelques instants plus tard, Giovanni Lombardi, le manager de Peter Sagan, entre autres, félicitait les heureux parents, avec un geste évoquant un futur appel téléphonique. "Nous étions coureurs à la même époque", souriait Patrick. "Lors de ma dernière Vuelta, nous étions souvent ensemble dans le gruppetto…"