L., 13 ans, a été harcelée puis passée à tabac dans son école de Charleroi. Elle a eu un doigt cassé : “Elle n’a jamais été reconnue comme victime”
Cible d’une campagne de rumeurs à l’école et sur les réseaux sociaux, puis agressée, une jeune fille de 13 ans témoigne aux côtés de ses parents.
- Publié le 24-04-2024 à 06h00
Trois mois après les faits, l’adolescente reste profondément marquée par son expérience. “Harcelée à l’athénée royal Vauban de Charleroi, notre fille de 13 ans ne s’est jamais sentie reconnue comme victime”, accusent ses parents, Maryam et Laurent, de confession musulmane. Depuis peu, l’adolescente, que nous appellerons L., a repris sa scolarité dans un nouvel établissement à Marcinelle. “Mais elle éprouve encore un sentiment de culpabilité, selon ses parents. Elle est d’ailleurs en psychothérapie. ”
Deux plaintes à la police
La victime que nous rencontrons avec sa famille ne va effectivement pas bien. Deux plaintes ont été déposées auprès de la police de Charleroi. Selon le premier inspecteur principal David Quinaux, qui est référent discrimination, le dossier a été transmis au parquet. De tels faits retiennent toute son attention, assure-t-il. Logique. Il y a eu de dramatiques précédents en région de Charleroi. En janvier 2020, une élève de 14 ans s’était donné la mort pour échapper aux moqueries et insultes de ses camarades. L’affaire a été jugée, des condamnations sont tombées.
Pour L., l’enfer du harcèlement a commencé à la rentrée 2023. “Elle nous avait demandé à pouvoir revenir à l’athénée Vauban où elle avait fait ses primaires, raconte sa maman. Nous l’y avons donc inscrite. Un groupe de filles de sa classe de deuxième secondaire l’a vite choisie pour cible. C’est ainsi qu’elle a fait un premier malaise en octobre”, selon Maryam. À l’époque, l’adolescente a été vue par une pédiatre du CHU Marie Curie qui a informé ses proches d’une potentielle situation de harcèlement. Les parents disent en avoir averti la direction de l’athénée.
Un doigt cassé
Après une campagne de rumeurs, c’est l’escalade. En janvier, la jeune fille se fait en effet agresser à l’école. Dans la cour de récréation, elle reçoit une boule de neige en pleine face lancée par sa principale harceleuse. L. ne le supporte pas, une bagarre éclate entre les deux filles, mais d’autres viennent défendre la provocatrice. L. prend alors des coups qui vont être constatés par un médecin. “Un de ses doigts est même cassé”, poursuit la maman. Un certificat d’absence d’une durée de dix jours est délivré. “La scène a été filmée, l’adolescente a fugué de l’école pour se réfugier chez ses grands-parents”, expliquent les parents.
"Le harcèlement continue hors de l'école sur TikTok"
En marge de la plainte déposée à la police, les parents de L. écrivent à l’école pour lui demander de prendre des mesures. “Ce qu’elle ne fera pas”, assurent-ils. La direction dément : “L’agresseuse a écopé d’une sanction de trois jours d’exclusion, selon le préfet M. Vandenbussche. Quant à l’absence de dispositif pour faciliter la reprise de scolarité de L., nous n’en avons pas eu l’opportunité, les parents nous ayant informés qu’ils la changeaient d’école.” Maryam et Laurent expliquent avoir pris cette décision face à l’immobilisme de la direction. D’autant qu’une autre campagne de bashing a suivi les événements de janvier, selon le papa. “Un compte anonyme a été ouvert sur le réseau social Tiktok pour continuer à persécuter ma fille.”
Le service communication de Wallonie Bruxelles Enseignement (WBE) assure accorder la plus grande attention aux faits de harcèlement. “C’est un phénomène qui mobilise toute notre vigilance, mais les autorités scolaires ne peuvent intervenir en dehors de leurs compétences, notamment sur les réseaux sociaux. Cela relève des pouvoirs de la police et de la justice. ”