Les confidences de Thierry Neuville : "Le titre mondial ou rien"
Notre compatriote se confie à la veille du rallye le plus important de sa carrière.
- Publié le 15-11-2018 à 07h05
- Mis à jour le 15-11-2018 à 11h34
Notre compatriote se confie à la veille du rallye le plus important de sa carrière. Thierry Neuville est souriant, calme et confiant.
Thierry, vous êtes arrivé très tôt en Australie. Vous êtes désormais bien habitué au décalage horaire ?
"Oui, j’ai débarqué à Sydney jeudi dernier après une escale. Je suis bien reposé et dans le bon rythme. Je dors très bien, merci. Je ne ressens plus aucune fatigue."
Vous ne vous êtes pas trop énervé en regardant les prévisions météo ?
"Non, j’évite de trop regarder parce qu’elles changent tout le temps. On aura de la pluie, c’est presque certain, mais quelle quantité, où et quand, à voir."
Cette météo pourrait-elle gommer une partie de l’avantage de votre deuxième position sur la route, dont on parle tant depuis l’Espagne ?
"C’est vrai que ce serait plus compliqué pour tout le monde. Mais, d’un autre côté, cela me donnerait aussi plus de chances de pouvoir jouer la victoire par rapport aux concurrents partant plus loin et fort avantagés sur le sec. Il y a donc du pour et du contre."
Comment abordez-vous mentalement ce rallye décisif pour l’attribution du titre, votre premier ?
"Je suis bien dans ma tête. J’essaie de ne pas trop penser à l’enjeu. Je l’ai préparé comme les autres, soit parfaitement, car je sais que je dois à nouveau réussir la course parfaite. Ce sera une épreuve comme les autres, donc très disputée. À deux spéciales de l’arrivée, j’étais encore à trois secondes de Sébastien en Catalogne. Hormis Tanak plus rapide que tout le monde sur les dernières épreuves, c’est très serré entre tous."
Le titre mondial pourrait se jouer dans la Power Stage…
"Je sais que c’est un cas de figure possible. Cela ne me dérange pas car j’y ai plus souvent brillé que Seb cette année. Mais il y a tant de scénarios possibles !"
Avoir remporté l’épreuve l’an dernier en partant justement deuxième le vendredi vous donne un peu plus de confiance ?
"Cela me libère un peu plus. Maintenant, un rallye ou, surtout, une année n’est pas l’autre. Pour l’instant, je ne suis pas champion du monde. Je dois aller rechercher la première place. J’estime n’avoir rien à perdre. Deuxième, troisième ou cinquième au championnat, je m’en fous. J’ai déjà été trois fois vice-champion. Seule la couronne m’intéresse. Je suis prêt à attaquer, à prendre les risques qu’il faut pour terminer devant Ogier. Car, si je suis derrière Seb, de toute manière, cela ne me servira à rien."
Vous vous donnez encore quel pourcentage de chance d’être couronné ?
"On est trois et c’est partagé. La probabilité que ce soit Ott est encore faible mais, entre Seb et moi, c’est 50/50. C’est à qui sera devant l’autre, en gros."
Commencez-vous à ressentir la pression ?
"Non, pas maintenant. Peut-être que ce sera le cas dimanche matin. Mais là, on est loin du compte encore. Certes, l’an dernier, j’avais perdu toute chance avant la dernière course, mais je me suis déjà battu depuis quelques années face à Seb. Donc, ce n’est pas trop nouveau. Je gère. Sur le papier, on est trois à pouvoir l’emporter, ce qui répartit un peu la pression sur les épaules de chacun. Mais je me sens bien. Je suis serein."
"Je repasserai par la Belgique ou Monaco, ça dépend"
Le pilote belge ressent le soutien de tout le pays.
Thierry, votre Hyundai fonctionnait bien ici en 2017 ?
"Oui mais, depuis, tout le monde a évolué. C’est aussi notre cas ici. Le niveau de performances de ma voiture pourrait m’aider un peu. On va déjà voir ce que cela donne lors du shake down très représentatif du parcours."
Vous avez gagné moins de courses que vos deux rivaux cette saison avec trois victoires contre quatre pour Ogier et Tanak...
"Je peux encore égaliser. L’an dernier, c’était différent. Cette année, on a plus capitalisé. Et puis, j’ai souvent été premier sur la route."
Et vous avez moins pleuré en balayant que votre rival français ?
"Se plaindre ne m’aurait pas aidé à rouler plus vite. On connaît le règlement, il est le même pour tous."
Il s’agira de ne pas perdre trop de temps vendredi car partir devant sera encore plus pénalisant lors des spéciales de la deuxième étape ?
"Oui, c’est horrible avec toutes ces billes de terre au sol. Il n’y a aucune adhérence, une patinoire."
Le cas échéant, Hyundai décidera de donner la priorité à quel championnat ? Constructeurs ou pilotes ?
"Sans moi, le titre des marques serait déjà perdu depuis longtemps. Donc, s’il y a une priorité à donner en vue de l’arrivée, ce sera en ma faveur."
Reviendrez-vous directement en Europe après l’arrivée ?
"Non, lundi soir, il y a la remise des prix à Sydney. Puis, je dois repartir en Corée. Mais on passera d’abord trois jours à la maison."
En Belgique ou à Monaco ?
"Ça dépend…"
Sentez-vous le pays derrière vous ?
"Oui, la Belgique a toujours bien supporté ses sportifs. Surtout quand cela va bien. Quand cela marche moins, c’est différent… Nous sommes un pays de rallye. Avec le Condroz, la semaine dernière, les fans sont dans le bain. Peu ont pu effectuer le déplacement jusqu’ici, mais je suis sûr que beaucoup vont veiller la nuit devant leur ordinateur."
Il y aura donc moins de drapeaux belges que sur les autres épreuves. Vous les voyez en général ?
"Oui, mais je n’adresse jamais de signes aux supporters. Je suis toujours concentré."
"Une évolution moteur pour Thierry"
On sent Michel Nandan, le directeur de Hyundai Motorsport, un brin plus nerveux que Thierry.
"Les deux titres sont en jeu. Dimanche soir, on en aura deux, un ou zéro. C’est un peu comme aux 24H du Mans : on joue tout sur une course, c’est stressant." Priorité auquel ? "À celui qui nous paraît le plus accessible : celui des pilotes. Thierry n’est qu’à trois points d’Ogier. Pour l’aider, on a avancé l’homologation de l’évolution moteur programmée initialement pour le prochain Monte-Carlo. Sa seule voiture bénéficiera de plus de puissance et de plus de couple."
Outre un meilleur moteur ("pas au détriment de la fiabilité", a-t-il promis), le Français voit encore trois autres avantages pour Thierry. "Il est meilleur dans le rôle de chasseur que de chassé. Il a gagné la dernière édition et il sera deuxième sur la route. On croise les doigts et on y croit. Thierry va être champion."
Si c’est le boss qui le dit…