Craven cottage, le foot anglais en vrai
La chaude ambiance dans les stades anglais ? Vous risquez d’être déçus ! À cause du tourisme et des prix élevés, l’atmosphère en Premier League a pris un sérieux coup de froid. Sauf à Fulham, qui lutte pour préserver la tradition. Ambiance lors de de la venue de Chelsea, alors que le stade londonien s'apprête à recevoir coup sur coup Liverpool puis City...
- Publié le 15-03-2019 à 17h17
- Mis à jour le 17-03-2019 à 11h07
La chaude ambiance dans les stades anglais ? Vous risquez d’être déçus ! À cause du tourisme et des prix élevés, l’atmosphère en Premier League a pris un sérieux coup de froid. Sauf à Fulham, qui lutte pour préserver la tradition. Ambiance lors de de la venue de Chelsea, alors que le stade londonien s'apprête à recevoir coup sur coup Liverpool puis City...
Des maisons de rangée très cosy, estimées à un bon million de livres chacune, un désagréable crachin et un breakfast beans-saucisses-bacon, pour lutter contre les effluves de la soirée de la veille : il n’y a pas de doute, nous sommes à Londres ! Au menu du jour : Fulham - Chelsea. Le derby de l’Ouest et le match de l’année pour les Cottagers, attendu par le public local depuis 2014. L’occasion de vérifier si, comme le prétendent les initiés, Craven Cottage est l’une des antres où l’on retrouve l’ambiance du foot anglais comme on l’aime, et qu’on a de plus en plus de mal à trouver…
Quand un touriste choisit un club pour son baptême du feu, il opte très souvent pour un grand match, ou au moins pour un grand club : City, United, Chelsea, Tottenham, Arsenal ou Liverpool. Dans les stades des cinq premiers cités, il y a de fortes chances de ressortir déçu par l’atmosphère. On en a fait plusieurs fois l’expérience au fil des années. Les chants sont peu bruyants et localisés dans des sections très limitées. On vient voir ces clubs pour la qualité du jeu, pas pour le dépaysement offert en tribunes. Au sein du Big Six, Liverpool est l’exception qui confirme la règle mais la demande y est si forte qu’il y est extrêmement compliqué d’y obtenir des tickets.
La Premier League est, en quelque sorte, victime de son succès. Les touristes, dont une foule d’Asiatiques, sont de plus en plus nombreux. Face à cette demande en hausse, les prix des tickets grimpent. C’est mathématique: plus de spectateurs qui paient pour l’expérience, cela signifie moins de locaux et moins de traditions. Les mesures de sécurité très strictes n’aident pas à chauffer l’ambiance : il est par exemple interdit de rester debout de manière permanente.
Une tribune neutre, cas unique en PL
Heureusement pour les puristes, Fulham est de retour parmi l’élite cette saison et le club est déterminé à préserver son côté chaleureux. Pour y parvenir, le club applique notamment une méthode unique en Angleterre : il détient une tribune neutre, la Putney End, située derrière un but. Il y place tous les supporters away et à leur droite, les touristes, pour éviter qu’ils se retrouvent disséminés aux quatre coins du stade. De cette manière, l’authenticité des trois autres tribunes est laissée intacte.
De l’intérieur, les travées de la Putney End présentent un côté très étonnant. Le jour de notre visite, devant les comptoirs vendant tourtes et bières, se mêlent les supporters les plus fidèles de Chelsea, les fans de Fulham et des étrangers, trahis par la blancheur éclatante de leur écharpe achetée quelques minutes plus tôt à un vendeur de rue. En deux heures, nous n’avons pas vu la moindre altercation, voire une réelle provocation, entre ces supporters des deux camps qui adorent pourtant se détester. Les touristes, eux, sont comblés. Pendant toute la rencontre, très vivante et qui finira par un succès 1-2 de Chelsea, ils seront balancés entre le grondement enthousiaste du public local et les chants vigoureux des fans des Blues.
L’Union Saint-Gilloise, Giroud et les chèvres
Le FFC a un autre argument pour séduire : le charme de son stade, presque désuet. La façade de Craven Cottage rappelle celle du stade Joseph-Marien, de l’Union Saint-Gilloise. Ses tourniquets d’accès sont si étroits qu’on se dit qu’un lunch trop généreux vous empêcherait de passer. À l’intérieur, le préau ressemble à celui qui couvrait jadis nos cours de récréation. Comme pour mieux alimenter la nostalgie du foot d’avant.
Nous sommes ici à mille lieues des stades multifonctionnels comme l’Emirates ou le nouveau Wembley. Profitant de sa relative petite taille – 25.700 spectateurs – Craven Cottage cultive cette proximité. C’est le cas à l’intérieur du stade, les premiers rangs se situant à moins de cinq mètres de la ligne de touche, comme en dehors. L’arrivée du bus des joueurs, par exemple, y est nettement plus accessible qu’ailleurs. Quelques dizaines de supporters s’y regroupent pour exhorter les joueurs de Fulham ou pour voir de près les stars adverses. Eden Hazard a salué les acclamations d’un geste de la main et d’un sourire. Olivier Giroud n’a pas eu le même accueil. Des touristes belges ont imité le bêlement d’une chèvre mais il est resté stoïque.
Quatre heures plus tard, les joueurs de Chelsea sont repartis dans le même bus avec trois points et, sans aucun doute, l’impression d’avoir goûté à une atmosphère très différente de celle de Stamford Bridge. Nous confirmons : Fulham reste l’un des derniers bastions de la vraie ambiance à l’anglaise. Il ne reste plus qu’à espérer que la prochaine rénovation de la tribune Riverside, longeant la Tamise, n’y changera rien…