Que pensent les coureurs du Tour de l'ambiance en bord de route? "Les clameurs ? C’est chouette, mais ça fatigue !"
- Publié le 25-07-2018 à 12h11
Comment les bruits de la foule et du Tour sont-ils perçus par les coureurs ? Plusieurs fois, nous avons eu le privilège de pouvoir suivre des étapes du Tour de France à moto. Sur une moto réservée aux médias. À chaque fois, en descendant de la machine, deux sensations nous animaient : la joie d’avoir vu des sourires tout au long du parcours et d’avoir vécu la course de l’intérieur. Mais aussi une certaine fatigue. Car sur le Tour de France, au cœur de la course, les clameurs sont vives. On a l’impression d’être dans un stade à ciel ouvert. Mais alors que nous n’avions vécu cela que sur une seule journée par Tour de France, comment les coureurs gèrent-ils ce brouhaha ambiant et quasi constant ?
"Ah, les bruits du Tour, cela fait partie de la fatigue typique de cette épreuve", analyse le grimpeur Jelle Vanendert, qui a attaqué ce mardi dans les Pyrénées. "Les bruits y sont vraiment plus forts que sur les autres courses. C’est simple, sur la Grande Boucle, on a l’impression d’être constamment dans un tunnel."
Même… son de cloche pour le Français Alexis Vuillermoz. "Sur le Tour de France, il est impératif de bien rester concentré sur son effort, on essaie donc de faire abstraction de tous ces bruits", commente le coureur d’AG2R-La Mondiale, qui a depuis été contraint à l’abandon après avoir heurté un spectateur imprudent. "Tous ces encouragements, c’est très chouette ! Cela peut être galvanisant, cela nous aide à nous surpasser. Mais à la longue, cela peut être aussi très… usant. Être au milieu de ces couloirs sonores pendant trois semaines ajoute une fatigue supplémentaire. Raison pour laquelle à la fin du Tour de France, on apprécie tous vraiment le calme !"
Son coéquipier Pierre Latour confirme. "Le bruit, sur le Tour de France, c’est vraiment impressionnant", raconte celui qui porte le maillot blanc de meilleur jeune en ce début de troisième semaine. "Il est vraiment plus fort que sur les autres courses. Et il y en a partout. Avec les hélicos, les nombreux véhicules de la course, avec le public qui est présent en masse. Je me souviens que l’an passé, pour ma découverte de cette épreuve, j’avais été choqué lors de la première étape en ligne, entre Düsseldorf et Liège. Je n’avais rien entendu de la journée à l’oreillette tellement il y avait du bruit partout ! Cet ensemble de bruits, cela crée un stress supplémentaire. On a plus besoin de faire attention et c’est assez fatigant. Mais d’année en année, on apprend à gérer ça."
"Les descentes, au calme, font du bien"
Thomas Degand décrit l’univers sonore particulier du Tour de France.
Que les choses soient claires : les coureurs ne se plaignent pas des encouragements du public, loin de là !
"Non, ces clameurs qui nous sont adressées nous font plaisir, elles nous aident à nous surpasser, elles nous motivent à nous dépasser", souligne le Hennuyer Thomas Degand. "Même si tu sais que tous les encouragements du Tour de France ne sont pas rien que pour toi, cela fait quand même plaisir de les entendre. C’est une petite fierté de faire partie de ce peloton, de rendre les gens heureux. C’est le seul sport qui permet d’être aussi proche en permanence du public. Mais c’est vrai aussi que tous ces encouragements peuvent amener une certaine fatigue."
Pour Thomas Degand , il est possible de retrouver des clameurs aussi fortes sur les classiques. "Mais c’est alors sur une journée, et à certains endroits de la course", décrit-il. "Je me souviens m’être échappé sur l’Amstel Gold Race et d’avoir entamé le Cauberg dans le groupe de tête. C’était grandiose. Mais c’était sur le Cauberg. Sur le Tour, c’est quasiment comme ça partout. Et cela dure vingt et un jours ! C’est grandiose, c’est énorme, c’est une autre dimension."
Ces clameurs sont tellement intenses que, parfois, les coureurs sont soulagés d’arriver dans des endroits plus calmes. "Quand tu es en plein effort, quand il fait chaud, tous ces bruits peuvent augmenter le mal de tête", termine Thomas Degand. "Cela peut être très usant. À tel point que parfois, tu es content d’entamer la descente pour être au calme !"
"C'est difficile à comprendre"
Sur cette édition du Tour de France, malheureusement, les huées à l’encontre de Chris Froome et de ses coéquipiers de Sky ont fait plus parler d’elles que les encouragements des vrais supporters. Mais dans le brouhaha ambiant du Tour de France, les coureurs comprennent-ils les encouragements qui leur sont adressés ? "Non, pas vraiment", rigole Jelle Vanendert. "Tu ne captes presque rien. Sauf si tu fais attention. On essaie d’être plus attentif quand on sait que nos proches sont à un endroit précis, mais c’est très dur de les voir, de toute façon, tant il y a du monde." Le Français Pierre Latour confirme. "Il faut vraiment faire attention pour comprendre ce qu’on nous dit", évoque le coureur d’AG2R-La Mondiale. "Je fais plus gaffe quand je suis près de mes supporters et de temps en temps, on parvient à bien comprendre."