Michael Rösch, le médaillé d'or olympique... belge
Et si l’une de nos plus grandes chances de médailles aux Jeux Olympiques d’hiver de PyeongChang venait d’Allemagne ? Michael Rösch défendra pour la première fois les couleurs de son nouveau pays dans une compétition olympique de biathlon après avoir décroché l’or en relais aux JO de Turin en 2006. Il évoluait alors sous le drapeau de sa patrie de naissance…
- Publié le 29-04-2017 à 07h00
- Mis à jour le 22-01-2018 à 12h32
Et si l’une de nos plus grandes chances de médailles aux Jeux Olympiques d’hiver de PyeongChang venait d’Allemagne ? Michael Rösch défendra pour la première fois les couleurs de son nouveau pays dans une compétition olympique de biathlon après avoir décroché l’or en relais aux JO de Turin en 2006. Il évoluait alors sous le drapeau de sa patrie de naissance…
"Comme sportif, c’est le plus beau sentiment possible", explique-t-il. "J’ai gagné deux manches de Coupe du Monde, j’ai été sur le podium avec le relais allemand (3e) en championnat du monde. Mais cette victoire aux JO c’était un truc dont je rêvais depuis que je suis gosse. Je m’entraînais comme un dingue durant mes jeunes années juste pour un jour aller aux JO."
Inspiré par son père, ancien médaillé olympique de biathlon, il se lance dans le sport familial alors qu’il n’a que 6 ans. "Je ne faisais pas que ça, hein. J’adorais le ski, le foot mais quand je m’endormais le soir, c’est au biathlon que je pensais."
Le Lucky Luke du biathlon
Son talent se manifeste assez rapidement. Le gamin passe des heures à s’entraîner sur ses lattes, à la salle et dans les stands de tir.
"J’avais beaucoup de talent", concède-t-il. Et s’il n’est pas le plus rapide sur ses skis, il possède une arme supplémentaire par rapport à ses concurrents. "Le tir est ma plus grande force. Je suis à la fois rapide et précis. Les autres prenaient plus ou moins 35 secondes, je n’en avais besoin que de 20. Après, je m’entraînais vraiment bien. J’allais dans des salles spécifiques pou y bosser cette partie de la discipline. C’est très cadré en Allemagne. En Norvège, par contre, les gars tirent alors que des passants se baladent derrière (rires)."
Il arrête pourtant sa carrière durant un an en pleine adolescence. Ses parents acceptent à contrecœur. La pause ne dure qu’un temps car même pas deux années plus tard, Rösch décide de stopper son cursus traditionnel pour se lancer comme pro dans sa discipline. En parallèle, il suit une formation pour entrer dans la police. "Je voulais avoir un background, une sécurité. La police m’offrait un emploi bien payé et surtout très sûr. Ce pas m’a permis de passer professionnel et de me consacrer à fond à mon sport. À 17 ans, j’ai lancé le processus avec à la clé une première manche du Championnat du monde junior."
Trois autres suivront avant de passer sur le circuit principal en 2004 et d’y enchaîner les places dans le top de la Coupe du Monde. Celui qu’on surnom Ebs, le diminutif du nom de son père, enchaîne toutes les grandes compétitions et est reconnu par le milieu.
Sa première baisse de régime arrive en 2009. Il n’arrive plus à empiler les bonnes prestations et ne se qualifie pas pour les Jeux Olympiques de 2010 qui ont lieu à Vancouver. "J’ai enchaîné les mauvais résultats", concède-t-il. Il revient pourtant dans l’équipe en 2012 mais n’est pas sélectionné pour le rendez-vous qu’il avait noté dans son agenda : les Mondiaux à Ruhpolding, l’un des hot-spots du biathlon allemand.
Viré de l’équipe allemande
"J’ai été la première victime. C’était un choix du coach car nous étions trop sur la liste." L’amertume se ressent encore dans sa voix. Le natif de Pirna prend les choses en main et décide de tout changer, de recommencer sa carrière à zéro. "On m’a dit qu’il était possible de changer de nationalité et que le processus allait assez vite. C’était ma chance de tout reprendre à partir d’une page blanche car j’avais fait quelques bêtises avant cela. Beaucoup m’ont traité de traître mais je reste allemand malgré le fait que je porte le drapeau belge sur ma combinaison."
Plus qu’un simple changement de nationalité sur les papiers officiels des compétitions, Ebs va connaître un véritable bouleversement dans sa vie. "On ne se rend pas trop compte de ce à quoi j’ai consenti et quittant la fédération allemande. J’avais un encadrement de haut niveau, un job, des sponsors. J’ai tout quitté pour poursuivre le biathlon. Vous pouvez dire que je suis fou mais ce geste est le reflet de ma personnalité. Je fais tout à 100 % même si cela demande des sacrifices. Je me sentais plus bienvenu. Je devais changer quelque chose mais je ne pensais pas qu’il me faudrait trois années pour revenir au niveau."
Sa demande de naturalisation a finalement mis plus de deux ans être acceptée. "Demandez à Florent Claude (NdlR : un biathlète français qui sera prochainement naturalisé belge), cela fait seulement un an qu’il est en attente et il me dit que c’est vraiment dur. Mentalement, ça pèse car tu ne peux plus être en compétition au plus haut niveau."
Mononucléose, tendon d’Achille, bière et chocolat
Durant son processus de naturalisation et au début de sa reprise, il connaît la première grosse blessure de sa carrière. "J’ai eu de gros soucis. Je n’ai pas décollé de mon canapé durant 4 mois à cause d’une mononucléose. Je voulais aller m’entraîner mais le corps ne suivait pas. C’était frustrant mais nettement moins grave que ma rupture du tendon d’Achille. Cela signifiait 6 mois sans entraînement et un passage sur le billard. L’opération ne s’est pas déroulée comme prévu et je me suis retrouvé avec une infection. Beaucoup de sportifs ont arrêté après de telles blessures mais tout ce que j’ai connu m’a rendu plus fort. Cela m’aide à être au top."
Son come-back a débuté avec une victoire aux Mondiaux d’été de 2014. "On porte des skis avec des roues", précise-t-il au sujet d’une compétition de moindre ampleur mais qui lui a fait du bien au moral. Pour la première fois aussi, il fait retentir la Brabançonne. Un moment qui lui fait comprendre qu’il est désormais un peu Belge.
"Je suis content de représenter le pays. Ce que j’ai de Belge ? Je bois de la bière et j’adore le chocolat (rires). Je passe peu de temps de Belgique car je suis toujours installé en Allemagne. J’y ai passé deux semaines l’an passé et j’en ai profité pour aller au mur de Huy et le gravir à vélo. J’aimerais faire d’autres monuments du cyclisme."
Depuis cette victoire, les choses ont évolué pour lui. Michael a de nouveaux sponsors, une nouvelle équipe (il travaille avec les membres de la fédération suisse pour être au meilleur niveau) et une nouvelle fédération bien loin d’être aussi structurée que celle qu’il a connue. "Mais on sent que ça évolue dans le bon sens. Il y a une envie de faire découvrir le biathlon à la Belgique et je suis content de faire partie du processus."
Son meilleur résultat depuis qu’il est Belge est une sixième place dans la manche de Coupe du Monde de sprint de Poklujka. "Une place qui ne signifie rien pour les autres mais qui compte tellement pour moi", affirmait-il en larmes sur la ligne d’arrivée.
Des pleurs dus au chemin qu’il avait parcouru depuis mais aussi à la perte de son coach. "J’ai beaucoup pensé à lui mais également à moi. J’ai montré au monde que j’étais de retour."
De là à obtenir une médaille pour son nouveau pays aux Jeux Olympiques de PyeongChang qui auront lieu en février 2018 ? "Je dois être réaliste, ce sera difficile. Dans notre discipline, 40 des 60 participants peuvent rêver d’un podium. Et il n’y a que deux places au lieu de trois car Martin Fourcade en squatte toujours une. Mais bon, tout est possible et je suis positif à l’idée de faire quelque chose de grand."