Cian Uijtdebroeks vise le top 10 pour son premier Giro : “Quand tout le monde est à bloc, Pogacar respire à peine”
Cian Uijtdebroeks s’apprête à vivre son premier Tour d’Italie. Il espère réaliser un nouveau top 10… ou mieux.
- Publié le 04-05-2024 à 07h23
Et de deux. Avec le Giro, Cian Uijtdebroeks aborde (déjà) le deuxième grand tour de sa carrière, à 21 ans seulement, après avoir brillamment réussi son examen d’entrée sur la Vuelta, en 2023 (8e). Le Tour d’Italie est donc une étape supplémentaire dans la progression de celui qui a rejoint les rangs de la formation Visma | Lease a Bike l’hiver dernier. Après avoir beaucoup travaillé le contre-la-montre et après plusieurs stages en altitude, le jeune grimpeur espère montrer son meilleur visage.
Sa préparation : “Mentalement, je suis rassuré”
Après des prestations intéressantes à O Gran Camino puis sur Tirreno-Adriatico, dans l’ombre de Jonas Vingegaard, Cian Uijtdebroeks n’a pas terminé le Tour de Catalogne. Son abandon dans la septième et dernière étape a été la conclusion d’une semaine qui n’a pas été à la hauteur des espérances, car la course espagnole était son premier objectif majeur de l’année. “La semaine qui a précédé le Tour de Catalogne, j’ai été un peu malade, explique-t-il dans le Nieuwsblad. Au début, je pensais qu’il s’agissait du rhume des foins mais plus les jours avançaient, plus je me rendais compte qu’il était difficile de récupérer. Et lors de la dernière étape, j’étais en hypothermie et j’ai abandonné pour ne pas m’épuiser davantage.”
Pas de quoi le tracasser outre mesure. “J’ai facilement digéré ce contretemps. J’aurais évidemment aimé rouler à un niveau différent mais cela n’a pas été le cas. Et pas à cause d’un manque de forme ou de talent.” En termes de confiance, il arrive donc au Giro assez serein. “Mentalement, je me rassure en me disant que j’ai eu de bonnes sensations à Tirreno-Adriatico alors que je n’étais pas à 100 %. Et les données que nous avons récoltées ces derniers mois par rapport à mon entraînement ont été très précieuses.”
Le deuxième stage en altitude, à Ténérife, effectué par le coureur originaire de Hannut, a également servi à ponctuer sa préparation. Avec Gesink, Valter et Bouwman, il a préparé le Giro en accumulant le dénivelé. Puis il s’est rendu à Denia, sur la Costa Blanca, pour continuer à avaler les kilomètres, avant un retour de plusieurs jours en Belgique. “C’était important pour moi de rentrer à la maison avant d’entamer un cycle de trois semaines.”
Son plan de bataille : “Il faudra s’économiser jusqu’à la difficile dernière semaine”
Uijtdebroeks n’est pas du genre à laisser les choses au hasard. Le roadbook du Giro, il le connaît par cœur et a analysé chaque étape. La course italienne n’a plus de secret pour lui. “Cela démarre assez doucement, indique-t-il. La première semaine et demie consistera surtout à suivre. Le premier jour est évidemment délicat, avec un final explosif où on peut perdre du temps. Mais ce n’est pas là que le Giro va se gagner. Durant les deux premières semaines, il sera important de rester concentré. Il y a certes de belles étapes de montagne mais je vais surtout essayer de m’économiser un maximum.”
Car c’est la troisième semaine que le Belge a surtout cochée. “Sur le Giro, c’est souvent à la fin que les choses se décident. Les étapes 15, 16 et 17 sont celles où il faudra être au top de sa forme. Ce triptyque sera très difficile et c’est à ce moment-là qu’il faudra que je suis capable de donner le meilleur de moi-même. C’est pourquoi je souhaite arriver dans ce money-time avec le plus de fraîcheur possible. Et si c’est le cas, beaucoup de choses sont possibles…”
Les chronos : “Encore un ou deux ans pour trouver la configuration idéale”
Même si tout le monde s’attend à ce que Tadej Pogacar soit intouchable pour le maillot rose, les deux contre-la-montre prévus dans le parcours pourraient être décisifs pour les places d’honneur. Le premier chrono, de 40,6 km, aura lieu lors de la septième étape, entre Foligno et Pérouse. Le second aura lieu durant la deuxième semaine, sur un parcours de 31,2 km entre Castiglione delle Stiviere et Desenzano del Garda. Cian Uijtdebroeks en est bien conscient : il devra être présent sur ces deux rendez-vous pour espérer terminer à une belle position finale. Beaucoup de travail en amont a été réalisé en ce sens.
”J’ai passé de nombreuses heures sur mon vélo de chrono, explique-t-il. On a également travaillé ma souplesse et mon agilité. C’est nouveau pour moi : je dois habituer mon corps à cette position spécifique de contre-la-montre. Je pense avoir fait un pas en avant dans ce domaine, mais il est difficile de dire si ça me fera gagner une ou 20 secondes. En tout cas, je me sens bien mieux qu’avant dans cet exercice.”
Depuis son arrivée chez Visma | Lease a Bike, Uijtdebroeks n’a pris part qu’à un seul chrono. Bilan : une décevante 109e place sur Tirreno-Adriatico. “C’était un contre-la-montre court et sous la pluie, tempère-t-il. Cela ne nous a donc pas vraiment aidés en termes de données. Une chose est certaine : cela ne sert à rien de paniquer et de faire des modifications en dernière minute car le corps a besoin de temps pour s’habituer à la nouvelle position. Je vais simplement tenter de préparer au mieux les deux chronos du Tour d’Italie avec les données dont on dispose actuellement. Mais au sein de l’équipe, on se donne un ou deux ans pour trouver la configuration idéale pour moi.”
L’absence de van Aert : “Peut-être que cela m’ajoute un peu de pression”
En début de saison, Wout van Aert était prévu sur le Giro. Mais sa blessure a changé les plans… et les perceptions. Désormais, l’attention est focalisée sur les leaders Olav Kooij (pour les sprints) et Cian Uijtdebroeks (pour le général) du côté de Visma | Lease a Bike. “C’est une grande différence pour l’équipe que Wout ne soit pas présent, estime le Belge de 21 ans. Le plan de base était de gagner autant d’étapes que possible, sur les étapes punchys et sur les chronos. Le fait qu’il ne soit pas là est un coup dur pour l’équipe et pour Olav, qui ne peut pas compter sur Wout dans les sprints. Et pour moi, cela a aussi une incidence. Rares sont les coureurs qui peuvent vous ramener aussi facilement à l’avant du peloton dans une étape difficile. En l’absence de Wout, il y aura peut-être un peu plus de pression sur les épaules, vu de l’extérieur. Mais au sein de l’équipe, on gère les choses tranquillement.”
Son ambition : “Je serais déjà satisfait avec un top 10”
Avec ou sans van Aert, l’objectif d’Uijtdebroeks n’a pas changé. “L’idée, c’est de réaliser un bon classement général. Je ne vise pas les étapes, sauf si la possibilité s’offre à moi”, explique celui qui n’a pas encore levé les bras chez les pros. “La dernière fois, c’était au Tour de l’Avenir mais cela ne me dérange pas : je préfère un bon classement final plutôt qu’une victoire d’étape.”
S’il avait évoqué un top 5 l’hiver dernier, ses premiers mois dans sa nouvelle équipe ont un peu tempéré ses ardeurs. “Je pense qu’il n’y a pas de mal à parler de top 10. Je peux me contenter de cela. Avec une telle position, je serais déjà très satisfait. Mais si je parviens à atteindre le top 5, ce serait évidemment génial.”
Je préfère un bon classement général qu'une victoire d'étape.
La concurrence : “Pogacar est le plus fort du monde”
S’il avait affronté Jonas Vingegaard lors du Tour d’Espagne l’année dernière, alors qu’il roulait encore sous les couleurs de Bora-Hansgrohe, Cian Uijtdebroeks va, cette fois, se frotter à un certain Tadej Pogacar, en Italie. Il l’a déjà affronté il y a quelques semaines lors du Tour de Catalogne et le Slovène lui a fait forte impression. “Je me souviens qu’il respirait à peine quand tout le monde était à bloc. Et à un moment, il a décidé d’y aller et on ne l’a plus revu, sourit le Belge. Il est vraiment très impressionnant. Actuellement, c’est le coureur le plus fort du monde. Je le vois gagner le Giro car le parcours lui convient bien. Il peut y remporter beaucoup d’étapes. En ce moment, il est dans le meilleur moment de sa carrière et il a cinq longueurs d’avance sur le reste du peloton.”
Et derrière ? Sur papier, la concurrence semble moins rude que sur la Vuelta 2023. “Après Pogacar, on est beaucoup à avoir le même niveau. Si Geraint Thomas a ses jambes du Giro de l’année dernière (NdlR : 2e derrière Roglic), il est hors d’atteinte également. Je me méfie également de Thymen Arensman. La lutte pour le top 5 sera très acharnée. Imaginons que Pogacar assomme la course dès les premières étapes : tout le monde voudra se battre pour les places d’honneur. Et les choses pourraient devenir difficiles.” Et passionnantes…