L'adieu au biathlon de Michael Roesch, père de ski
Michael Roesch a disputé ce vendredi en Allemagne sa dernière épreuve de biathlon. L'Allemand, naturalisé belge en 2014, sera bientôt papa et a décidé, à 35 ans, de mettre un terme à sa carrière à Ruhpolding. Le biathlète n'a pas choisi cet endroit par hasard: c'est dans cette station des Alpes bavaroises qu'il avait effectué ses débuts en Coupe du monde le 12 janvier 2006...
- Publié le 18-01-2019 à 17h21
- Mis à jour le 18-01-2019 à 17h30
Michael Roesch a disputé ce vendredi en Allemagne sa dernière épreuve de biathlon. L'Allemand, naturalisé belge en 2014, sera bientôt papa et a décidé, à 35 ans, de mettre un terme à sa carrière à Ruhpolding. Le biathlète n'a pas choisi cet endroit par hasard: c'est dans cette station des Alpes bavaroises qu'il avait effectué ses débuts en Coupe du monde le 12 janvier 2006... Avec la Belgique, il a pris la 19e place du relais masculin (4 X 7,5 km), son ultime épreuve en Coupe du monde qu'il disputait aux côtés de Florent Claude, Thierry Langer et Tom Lahaye-Goffart. Les Belges ont concédé 4:23.6 aux Norvégiens, les vainqueurs, après avoir commis 8 erreurs au tir.
Jeudi, l'ancien champion olympique avait bouclé sa dernière course individuelle à la 84e place, à l'occasion du sprint 10 km.
Michael über alles
Michael Roesch quitte le biathlon avec un beau palmarès, qui comprend notamment trois médailles de bronze aux Mondiaux (2007, 2008 et 2009), à chaque fois en relais. Il a également remporté deux épreuves de Coupe du monde et est monté 9 fois sur le podium. Mais son plus bel exploir reste son titre de Champion olympique du relais avec l'Allemagne en 2006.
“Disputer les Jeux, pour un sportif, c’est le plus beau sentiment possible”, explique-t-il. “J’ai gagné deux manches de Coupe du Monde, j’ai été sur le podium avec le relais allemand en championnat du monde. Mais cette victoire aux JO c’était un truc dont je rêvais depuis que je suis gosse. Je m’entraînais comme un dingue durant mes jeunes années juste pour un jour aller aux JO.”
Inspiré par son père, ancien médaillé olympique de biathlon, il se lance dans le sport familial alors qu’il n’a que 6 ans. “Je ne faisais pas que ça, hein. J’adorais le ski, le foot mais quand je m’endormais le soir, c’est au biathlon que je pensais.”
Le Lucky Luke du biathlon
Son talent se manifeste assez rapidement. Le gamin passe des heures à s’entraîner sur ses lattes, à la salle et dans les stands de tir.
“J’avais beaucoup de talent”, concède-t-il. Et s’il n’est pas le plus rapide sur ses skis, il possède une arme supplémentaire par rapport à ses concurrents. “Le tir est ma plus grande force. Je suis à la fois rapide et précis. Les autres prenaient plus ou moins 35 secondes, je n’en avais besoin que de 20. Après, je m’entraînais vraiment bien. J’allais dans des salles spécifiques pou y bosser cette partie de la discipline. C’est très cadré en Allemagne. En Norvège, par contre, les gars tirent alors que des passants se baladent derrière (rires).”
Il arrête pourtant sa carrière durant un an en pleine adolescence. Ses parents acceptent à contrecœur. La pause ne dure qu’un temps car même pas deux années plus tard, Roesch décide de stopper son cursus traditionnel pour se lancer comme pro dans sa discipline. En parallèle, il suit une formation pour entrer dans la police. “Je voulais avoir un background, une sécurité. La police m’offrait un emploi bien payé et surtout très sûr. Ce pas m’a permis de passer professionnel et de me consacrer à fond à mon sport. À 17 ans, j’ai lancé le processus avec à la clé une première manche du Championnat du monde junior.”
Trois autres suivront avant de passer sur le circuit principal en 2004 et d’y enchaîner les places dans le top de la Coupe du Monde. Celui qu’on surnom Ebs, le diminutif du nom de son père, enchaîne toutes les grandes compétitions et est reconnu par le milieu.
Sa première baisse de régime arrive en 2009. Il n’arrive plus à empiler les bonnes prestations et ne se qualifie pas pour les Jeux Olympiques de 2010 qui ont lieu à Vancouver. “J’ai enchaîné les mauvais résultats”, concède-t-il. Il revient pourtant dans l’équipe en 2012 mais n’est pas sélectionné pour le rendez-vous qu’il avait noté dans son agenda : les Mondiaux à Ruhpolding, l’un des hot-spots du biathlon allemand.
Viré de l’équipe allemande
“J’ai été la première victime. C’était un choix du coach car nous étions trop sur la liste.” L’amertume se ressent encore dans sa voix. Le natif de Pirna prend les choses en main et décide de tout changer, de recommencer sa carrière à zéro. “On m’a dit qu’il était possible de changer de nationalité et que le processus allait assez vite. C’était ma chance de tout reprendre à partir d’une page blanche car j’avais fait quelques bêtises avant cela. Beaucoup m’ont traité de traître mais je reste allemand malgré le fait que je porte le drapeau belge sur ma combinaison.”
Plus qu’un simple changement de nationalité sur les papiers officiels des compétitions, Ebs va connaître un véritable bouleversement dans sa vie. “On ne se rend pas trop compte de ce à quoi j’ai consenti et quittant la fédération allemande. J’avais un encadrement de haut niveau, un job, des sponsors. J’ai tout quitté pour poursuivre le biathlon. Vous pouvez dire que je suis fou mais ce geste est le reflet de ma personnalité. Je fais tout à 100 % même si cela demande des sacrifices. Je me sentais plus bienvenu. Je devais changer quelque chose mais je ne pensais pas qu’il me faudrait trois années pour revenir au niveau.”
Sa demande de naturalisation a finalement mis plus de deux ans être acceptée,ce qui l'a privé des Jeux Olympiques de Sotchi en 2014. “Demandez à Florent Claude (NdlR : l'autre biathlète belge du circuit, français naturalisé), il a aussi dû patienter . C’est vraiment dur. Mentalement, ça pèse car tu ne peux plus être en compétition au plus haut niveau.”
Mononucléose, tendon d’Achille, bière et chocolat
Durant son processus de naturalisation et au début de sa reprise, il connaît la première grosse blessure de sa carrière. “J’ai eu de gros soucis. Je n’ai pas décollé de mon canapé durant 4 mois à cause d’une mononucléose. Je voulais aller m’entraîner mais le corps ne suivait pas. C’était frustrant mais nettement moins grave que ma rupture du tendon d’Achille. Cela signifiait 6 mois sans entraînement et un passage sur le billard. L’opération ne s’est pas déroulée comme prévu et je me suis retrouvé avec une infection. Beaucoup de sportifs ont arrêté après de telles blessures mais tout ce que j’ai connu m’a rendu plus fort. Cela m’a aidé à revenir au top.”
Pour la Belgique, il a notamment terminé 13e des Mondiaux 2015 à Kontiolahti et fini 6e de deux manches de Coupe du monde en 2016.Et pour la première fois, il a permis à notre pays d'être représenté en biathlon aux Jeux olympiques d’hiver, l'an dernier, à PyeongChang. Ils étaient deux à porter la tenue noir-jaune-rouge en Corée du Sud, nos deux naturalisés : l’ex-Allemand Michaël Roesch et l’ancien Français Florent Claude. Il termina 23e de la poursuite (12,5 km), 38e du sprint (10 km) et 75e du 20 km individuel.
À 35 ans, Michael va désormais troquer sa paire de skis pour devenir père... de famille. "Maintenant, il y a une famille qui m'attend et je suis très heureux et fier de devenir père pour la première fois", a confié le biathlète, remerciant au passage tous ceux qui ont rendu possible sa carrière, notamment la Fédération belge de biathlon. "Sans ce soutien, je n'aurais pas pu aller plus loin, et, grâce à vous j'ai pu revivre et profiter à nouveau des Jeux Olympiques."
Une équipe de... restes de poisson
Feskslog. Pas facile à prononcer ? Logique, ces huit lettres signifient restes du poisson en Norvégien. Quand on demande à Michaël Rösch ce que signifie ce surnom, il éclate de rire.
“En fait, deux autres biathlètes se sont retrouvés dans la même situation que moi. Ils n’étaient plus membres de la fédération norvégienne et je venais que quitter la fédération allemande. Nous nous sommes entraînés à trois et avons décidé de Feskslog comme surnom. Cela collait bien à notre situation de rejet. Alexander Ose et Lars Berger ont arrêté depuis eux aussi, mais nous avons fait un vrai carton. Nous avions même des goodies et notre matériel floqués de notre logo. Cela nous a permis de bien bosser ensemble, de rester concentrés. Nous ne nous attendions pas un tel buzz.”