Euro de hockey: Emmanuel Stockbroekx voulait "tout quitter"
Manu Stockbroekx a traversé une profonde crise existentielle à la suite de sa blessure à la Coupe du monde. Il a retrouvé le plaisir de jouer.
- Publié le 20-08-2019 à 06h33
- Mis à jour le 20-08-2019 à 08h09
Manu Stockbroekx a traversé une profonde crise existentielle à la suite de sa blessure à la Coupe du monde. Il a retrouvé le plaisir de jouer. Manu Stockbroekx va bien. Merci pour lui. Il va même nettement mieux. À la Wilrijkse Plein, le défenseur rayonne sur le terrain. Lors de la première mi-temps contre l’Angleterre, il était l’un des seuls à montrer son meilleur visage : jeu offensif, prise d’initiatives, puissance physique et combinaisons efficaces.
Ceux qui l’ont vu jouer avec la fougue d’un gamin ne pouvaient imaginer que ce grand costaud a frôlé le burn-out durant les cinq premiers mois de l’année. "Un sentiment dominait mes pensées", commence le nouveau défenseur du Dragons avec une rare sincérité. "Je voulais tout quitter. Qu’est-ce que je voulais faire de ma vie ? Devais-je continuer à me donner à 200 % pour mon sport ?"
Cette remise en question l’avait d’ailleurs écarté de la sélection du Grand Final de Pro League à Amstelveen en juin. Shane McLeod ne voulait pas le sanctionner, mais l’aider dans ses réflexions.
Depuis toujours, Manu Stockbroekx est un joueur aussi bourré de talent que de questions. Il est torturé. "Je réfléchis trop, poursuit-il. J’ai traversé une période difficile."
Le déclic de ces sombres pensées trouve son origine lors de sa blessure aux ischios contractée pendant le match de Coupe du monde contre l’Inde. "Cette mise au repos a entraîné une série de questions. J’avais le sentiment de me retrouver à l’heure des grands choix. Jusque-là, j’avais toujours tout donné pour le hockey. En un coup, je me demandais ce que je ferais au niveau des études et de ma vie en général. Tu sors de ta bulle. Tu découvres un autre monde."
Il garde une image puissante d’un échange avec sa maman. "Pendant la finale de Coupe du monde, j’étais invité sur un plateau de télévision. Après le match, j’ai pleuré durant dix minutes dans les bras de ma maman. Plus tard, elle m’a confié qu’elle sentait que mes épaules étaient tombées de dix centimètres et que mon esprit était ailleurs."
De fait, il était ailleurs. Ce titre de champion du monde était le rêve absolu pour lui. "Je me retrouvais sans objectif."
Sans objectif et sans plaisir. Après une courte convalescence, il a repris le chemin des entraînements avec son club de Bloemendaal. "En février, je me souviens d’un entraînement en particulier. Il avait démarré depuis 30 minutes à peine. Je me demandais ce que je faisais là. Je ne ressentais pas de joie. Aucune énergie. Moi, je suis un mec qui me retrouve au fitness avant l’entraînement tant j’ai d’énergie en général."
Durant la fin de l’hiver, il broyait du noir loin des Red Lions. Il n’avait pas pris part à la tournée de janvier afin, aussi, de ne pas aggraver sa blessure aux ischios. "Mais j’aurais pu jouer."
Même quand il a touché le fond du trou, Stocki ne s’est jamais retrouvé seul. Tantôt ses parents, tantôt son entraîneur étaient à son chevet pour le guider vers des jours meilleurs. "Mes parents ne voulaient pas que je prenne de décisions tant que j’avais des pensées noires."
Il a alors remonté la pente à force de discuter. "J’ai beaucoup parlé avec Shane. J’ai été honnête et sincère. Je lui ai raconté que je ne comprenais pas ce qui m’arrivait."
Balancé entre la meilleure équipe du monde et la meilleure équipe des Pays-Bas, il a reconstruit son appétit sportif au fil des jours. "Le titre à Bloemendaal a fait beaucoup de bien au club et surtout à moi. J’ai fait le maximum pour avoir une attitude positive afin d’être en mesure de prendre de bonnes décisions pour mon avenir."
Il a choisi de profiter de chaque moment passé avec son stick. De plus, il a opté pour un retour à ses racines, au Dragons. "Flex (Denayer) m’a appelé par hasard, en janvier, au moment où je me posais mes questions. J’ai vu le Dragons en EHL et en play off. Leur jeu était compliqué. Je voulais me rapprocher de ma famille." Il voulait aussi retrouver la Belgique afin de se donner un maximum de chances en vue de la sélection pour les Jeux olympiques. "Il est très dur d’entrer dans la ligne défensive des Red Lions."
Sur son curriculum vitae, il peut se targuer d’une expérience de trois ans à Bloemendaal avec des gars comme Van Doren, Dwyer, Fuchs et Govers. "J’ai eu Michel van den Heuvel comme coach. J’ai construit autant l’homme que le joueur. J’ai dû m’épanouir loin de ma famille."
Aujourd’hui, il est libéré d’un certain poids. Son regard est rivé vers les Jeux de Tokyo. "Je demande souvent au staff ce que je peux faire de mieux. Je ne suis jamais satisfait de moi. Mon jeu pourrait être moins agressif et plus patient. J’en veux toujours plus."
Toujours plus de plaisir d’abord, car le reste suivra tout seul…
Thibaut Vinel