Lewis Hamilton, le meilleur... uniquement dans les chiffres
La domination du Britannique n'est plus outrancière, les jeunes poussent derrière.
- Publié le 15-11-2019 à 10h04
La domination du Britannique n'est plus outrancière, les jeunes poussent derrière. Lewis Hamilton a décroché aux États-Unis son sixième titre mondial, le cinquième en six ans, et cela deux Grands Prix avant le terme de la saison. Le pilote britannique est en passe, dès l’an prochain, d'égaler le record de sept couronnes de Michael Schumacher et de dépasser ses 91 succès, le chiffre de 100 étant tout à fait à portée du pilote de 34 ans. L’étoile de Mercedes est une véritable star de la F1. Il domine... son sujet, est maître de son art, peut-être au sommet. Cela signifie-t-il qu’il est en passe de devenir le plus grand de tous les temps ? Que personne ne peut le battre ? Non.
Dominations dans tous les sports
On ne pourra jamais comparer les époques. Fangio, Lauda, Prost, Senna, Schumacher sont tous des dieux de la F1. Ils avaient tous un talent fou. Et leur palmarès dépend aussi de leurs choix, leur matériel, leurs équipiers et du niveau de la concurrence. Le sport en général et le sport automobile en particulier ont connu de nombreuses périodes de domination d'un seul homme. On a eu Bjorn Borg, Roger Federer, Rafael Nadal (à Roland-Garros surtout) ou Justine Henin en tennis, Eddy Merckx, Miguel Indurain ou plus récemment Chris Froome en cyclisme, Mohamed Ali en boxe, Carl Lewis puis Usain Bolt en athlétisme, Valentino Rossi et maintenant Marc Marquez en motoGP. En rallye, cela a été Sébastien Loeb puis Seb Ogier, et en F1, après la "Schumach... ère", on vit l'époque Hamilton. Sur quatre roues, la domination d’un pilote est d’abord liée à celle d'une marque : Citroën puis VW en rallye, McLaren, Ferrari ou aujourd’hui Mercedes en F1.
Records faits pour être battus
Mais comme dirait Jacky Ickx qu’on aurait imaginé rester toute sa vie recordman du nombre de victoires aux 24 H du Mans avant que Tom Kristensen propulsé par Audi enchaîne neuf succès, "les records sont faits pour être battus". Cela signifie-t-il que le Danois est meilleur pilote que notre compatriote ? Bien sûr que non. On se gardera donc bien de prétendre que Lewis Hamilton est aujourd’hui meilleur pilote que la légende Fangio et, s’il peut devenir le meilleur de tous les temps, ce sera uniquement dans les chiffres. Car vous ne pouvez être le meilleur que d’une époque, une génération. Comme on ne peut pas affirmer aujourd’hui que Froome est meilleur que Merckx ou que Federer a plus de talent que Borg. Il est juste aussi de prétendre que Lewis Hamilton ne gagnerait pas de course en Williams et que George Russel escaladerait sans doute les podiums chaque week-end s’il pilotait une W10. Il convient donc de relativiser la qualité d’un pilote dans une compétition dépendant à 80 % du matériel.
Moins de poles que Bottas et Leclerc
Mais en général, c’est un tout et ce sont les meilleurs pilotes qui se retrouvent dans les meilleurs baquets et le meilleur contexte. Mercedes vient d’enchaîner six titres mondiaux chez les constructeurs et se présente comme la meilleure écurie depuis le retour du moteur V6 Turbo hybride. Un excellent pilote, à la fois rapide, assez agressif, fin stratège, dans une top écurie commettant peu d’erreurs et en prime sans un équipier trop dérangeant, voici donc la recette, le package gagnant. On peut parler de binôme Mercedes-Hamilton. Lewis aurait-il gagné autant de titres s’il avait succédé à Fernando Alonso chez Ferrari ? Peut-être pas, même si nous sommes convaincus qu’il en aurait peut-être tout de même décroché un, en 2018 ou cette année. Une saison 2019 où c’est surtout l'expérience, la fiabilité et la science de la course de Lewis, mais aussi les trop nombreuses erreurs de ses rivaux qui ont encore fait la différence. Car si certes oui, il a encore ajouté 11 victoires à son palmarès lors des derniers mois, ni lui ni sa machine ne se sont montrés aussi dominants que les dernières saisons. Pour preuve, il n’a signé que quatre "pole positions" contre cinq à son équipier Valtteri Bottas et sept au nouveau pilote Ferrari Charles Leclerc ! Si l’on ajoute les deux de Sebastian Vettel (la dernière est pour Max Verstappen), la Scuderia a donc décroché à ce jour autant de poles que Mercedes. Et Lewis n’est que le troisième meilleur performer.
Un vrai "racer"
Alors non, sa supériorité n'est plus écrasante, Lewis ne se promène pas le dimanche comme Michael Schumacher l’a fait durant de nombreuses années et garder sa couronne en 2020 s’annonce encore plus dur face aux représentants de la nouvelle génération. Lorsqu’il s’impose aujourd’hui, c'est parfois en partant de plus loin comme en Allemagne, en Hongrie ou encore au Mexique, en faisant preuve de classe, de grand talent, en dominant les éléments, la stratégie, en y croyant jusqu’au bout. Et cela, qu’on soit fan ou pas, on ne s’en lasse pas. Alors oui, Lewis Hamilton reste le n° 1 mondial, la référence actuelle, l’exemple pour les jeunes. Mais la montée en puissance de la nouvelle génération, des Max Verstappen, Charles Leclerc ou peut-être Esteban Ocon a fait revenir l’incertitude et promet encore de très belles luttes, de très belles années. Le king de Stevenage va devoir se cracher dans les mains s’il ne veut pas vaciller de son siège. Ou justement sortir de son confortable fauteuil argenté pour relever dans le futur un nouveau défi : soit en acceptant une pointure à ses côtés (Verstappen, Ocon ou Russell), soit en affrontant son plus sérieux rival sur un beau Cheval noir... Car Lewis Hamilton n'est pas homme à vouloir vaincre sans péril. Ni triompher sans gloire... C’est un "racer", un vrai.