Retour en 1913 et 1914, pour les deux seules finales de Coupe de l’Union : règlement incomplet, controverses, maillots semblables et exclusions
La mémoire vivante de l'Union, Yves Van Ackeleyen nous replonge à une autre époque, il y a 110 ans, quand l'USG disputait les deux seules finales de Coupe de son histoire.
- Publié le 09-05-2024 à 08h17
Combien de finales de Coupe de Belgique l’Union avait-elle disputées avant ce 9 mai 2024 ? Seuls les fervents supporters du matricule 10 savent que le troisième club le plus titré du royaume n’était en réalité arrivé à ce stade qu’à deux reprises depuis 1911-12. Et qu’il faut remonter à 1913 et 1914 pour voir le club saint-gillois remporter ses deux seules Coupes. Yves Van Ackeleyen, historien officieux et mémoire de la RUSG, fait un bond de 110 ans dans le temps pour nous raconter ces deux matchs d’une autre époque.
1913: Union – Cercle 3-2 a. p.
”Les officiels ne savaient pas quoi faire après les nonante minutes réglementaires”
Après avoir écarté Herstal, cercle de D2 en huitième de finale… 14-0 ; le Leopold 2-1 au tour suivant ; puis le grand rival bruxellois du Racing Club 6-0 en demie, l’Union dispute la première finale de son histoire le 1er juin 1913. Elle a la chance de la jouer à domicile, dans le “stade de la rue de Forest”, face au Cercle de Bruges.
”Il y avait seulement 1000 spectateurs”, nous explique Yves Van Ackeleyen. “Le football était vu comme un sport d’hiver, à l’époque, donc il y avait une controverse sur le fait qu’on joue cette finale au printemps. Et puis l’on déplorait également une mauvaise organisation de l’union belge de football, qui n’avait pas émis d’invitation officielle. D’ailleurs, il s’agissait de la première fois que la Coupe était offerte par le roi… mais on peut lire dans la presse de l’époque que ce dernier n’assistait pas à la finale, ce qui était pointé du doigt.”
Le règlement ne disait pas que faire en cas d'égalité après 90 minutes.
La rencontre est décrite comme un “beau match”, mais l’organisation laisse à désirer. “Le public crie vite 'maillots, maillots !', car contrairement à l’usage, les deux équipes jouaient avec des tenues rayées ; de couleurs noir et verte tellement délavées pour les Brugeois qu’on n’arrivait pas réellement à les distinguer des Unionistes. L’arbitre demande à la mi-temps à certains de changer et… trois Brugeois reviennent en seconde période avec des maillots différents ; deux en blanc et un en rouge.”
À la surprise générale, le Cercle ouvre le score, mais Heyman et Hebdin placent l’Union aux commandes… avant que les visiteurs n’égalisent. 2-2 au bout des nonante minutes : se pose la question de la suite à donner à cette rencontre. “Manifestement, ce cas de figure n’était pas prévu dans le règlement. Les Unionistes avaient plutôt envie de continuer, alors que le Cercle aurait préféré que le match soit rejoué un autre jour. Les officiels de la fédération ont discuté sur place puis décidé que le match se poursuivrait avec deux prolongations de quinze minutes.” Hebdin fait 3-2 et l’Union signe le premier doublé Coupe-championnat de l’histoire du football belge.
1914: Union – FC Bruges 4-1
"Trois exclus à cause d’un contentieux entre les deux clubs”
Il faut une prolongation au tenant du titre pour sortir l’Antwerp en huitième, avant de balayer le Racing bruxellois 1-4 en quart, et un Saint-Ignacius issu des divisions inférieurs 1-5 en demie. Place à la finale, face au Club de Bruges, le 17 mai 1914, devant 4000 spectateurs, sur terrain neutre : le stade Vivier d’oie d’Uccle.
”Cette rencontre a été marquée par un jeu brutal, avec beaucoup de fautes, surtout brugeoises d’après les commentaires de la presse de l’époque”, poursuit Yves Van Ackeleyen. “En fait, il y avait un contentieux entre les deux équipes, qui se détestaient. Les déplacements de l’Union au Club étaient perçus comme à risque, se terminant parfois en bagarre avec des spectateurs. La police devait escorter les joueurs bruxellois jusqu’à la gare au retour. C’était en partie lié à un match de 1910 où un Saint-Gillois avait cassé la jambe d’un Brugeois.” À une époque où les joueurs n’étaient pas professionnels, et la médecine, moins évoluée qu’aujourd’hui, faut-il le rappeler ?
”Il y a d’abord eu une exclusion d’un Brugeois, pour une grosse faute. La tension est montée et il y a eu une autre altercation entre un Unioniste et un joueur du Club qui se sont tapés dessus et ont tous deux été exclus.” Les cartes n’étaient pas de mise, à l’époque, mais les arbitres pouvaient renvoyer des joueurs aux vestiaires. “L’Union s’imposera assez facilement, 4-1, et le match se terminera sans trop d’enjeu, Bruges étant découragé.”
Albert Carion, auteur du 4-1, ne se doutait pas qu’il resterait encore 110 ans plus tard le dernier Unioniste à avoir marqué un but en finale de Coupe.