Les frères Makhtar et El Arfang Gueye vont s'affronter pour la première fois à l'occasion de Mouscron-Ostende: "La Belgique nous a rapprochés" (VIDEO)
À la veille de se rencontrer pour la première fois sur un terrain, les frères Gueye se confient sur leur carrière aux trajectoires opposées.
- Publié le 19-03-2021 à 00h27
- Mis à jour le 25-03-2021 à 15h48
La taille et le regard communs ne trahissent pas leurs gènes. Le parcours a été différent malgré un arbre généalogique similaire. Installés dans le salon côte à côte, les frères Gueye se démarquent par leur complicité. Ce samedi, ils seront pour la première fois adversaires même si El Arfang commencera la rencontre sur le banc.
"J’ai manqué le match aller à cause d’une suspension. C’est la première fois de ma vie que je risque de jouer contre mon petit frère", confie Makhtar. Ils auraient pu déjà s’affronter lors de leur formation au Sénégal, passée pour l’Ostendais à l’US Gorée et dans un autre club de Dakar pour le cadet sous les couleurs de l’AS Sacré-Cœur. Les deux ans qui les séparent en ont décidé autrement.
Malgré le froid, la France a changé leur destin
La valeur n’attend point le nombre des années et le benjamin de la famille a failli percer en Europe avant son grand frère lors d’un test à l’Olympique lyonnais en novembre 2017 à seulement 18 ans. "J’évoluais déjà en D1 sénégalaise quand El Arfang est parti à Lyon. Il n’était pas encore professionnel. Le jour où il est revenu à Dakar, c’était mon tour de rejoindre la France pour passer un essai au Havre. Il m’a prévenu qu’il faisait très froid dans l’Hexagone et cela me faisait rire. Je trouvais qu’il exagérait. Je n’avais plus le même discours en posant les pieds sur le sol français. Il y avait 40 degrés de différence avec le Sénégal. Je n’avais jamais connu cette sensation", se souvient le Côtier.
La France modifie leur destin. Mahktar signe finalement à Saint-Étienne tandis que El Arfang change de poste et se reconvertit comme défenseur central. "Un formateur de l’Olympique lyonnais est venu visiter l’académie car l’AS Sacré-Cœur possède un partenariat avec les Gones. J’évoluais comme ailier mais ma croissance s’est accélérée d’un seul coup. Il m’a repositionné dans l’axe de la défense. J’ai occupé ce poste pour la première fois lors de mon baptême professionnel en Coupe de la Ligue sénégalaise. J’ai réalisé une grande prestation. C’était une revanche car, quand j’étais petit, je ne jouais pas toujours à cause d’un gabarit trop frêle."
Contrairement à son frère, qui empile les buts dès son plus jeune âge. Au point d’obtenir le surnom flatteur d’Oliver Bierhoff grâce à un jeu de tête déjà prolifique. "C’était mon idole même si je ne l’ai jamais vu jouer. On m’appelait tout le temps comme cela."
Une décennie plus tard, Makhtar s’est fait son propre nom. Son premier but après six minutes de jeu pour ses débuts en Ligue 1 marque les esprits. Sa saison en Ligue 2 en prêt à Nancy ponctuée par cinq buts en vingt matchs confirme ses prédispositions.
Makhtar le grand frère
Assez pour pousser Ostende à débourser un million d’euros l’été dernier et lui permettre de retrouver son frère passé par Lille en 2018 et cédé à Mouscron cette année. "L’année passée, je ne l’ai vu qu’une fois. La Belgique nous a rapprochés. J’habite à Ostende mais je viens régulièrement surveiller le petit", sourit-il. "Cela fait du bien de l’avoir à mes côtés. C’était plus difficile sans lui", confirme le Hurlu.
Un soutien fraternel qui le réconforte dans un exercice peu évident pour lui qui est barré par la concurrence et dont la blessure au genou en début de préparation a représenté un handicap pour postuler à une place de titulaire. Son exclusion face à Courtrai n’arrange pas les choses mais le Mouscronnois peut compter sur le soutien indéfectible de son grand frère.
"Je suis rentré aux vestiaires et je l’ai appelé directement", confie-t-il. "Je regardais le match chez moi et j’ai reçu son appel. Il m’a demandé si le carton rouge était bien logique. Il y avait rouge mille fois", s’esclaffe le buteur. "Mais cela arrive et je lui ai dit d’oublier et de se concentrer sur les prochaines échéances. El Arfang est un jeune joueur et c’est normal qu’il éprouve des difficultés. Il doit apprendre et patienter comme je l’ai fait lors de mon passage à Saint-Étienne."
Dans le Forez, le longiligne avant-centre a séduit sans pour autant percer totalement. Qu’importe, il est parvenu à garder son calme pour ne pas tomber dans le piège de se disperser. Son insouciance s’est également transformée en point fort.
"Je suis quelqu’un qui ne se prend pas la tête. Quand je suis arrivé chez les Verts, ils m’ont fait jouer avec les pros. Je marque directement et, le match suivant, je ne suis plus dans le groupe. Je n’ai rien demandé et j’ai continué à travailler. Ce qui m’importait, c’était ma relation avec Jean-Louis Gasset. Il était comme un papa pour moi. Il me parlait régulièrement et c’était cela le plus important."
Une sagesse qui lui permet d’exploser définitivement cette saison et de dynamiter les défenses belges. Avec dix buts, Makhtar Gueye est l’une des forces principales de cette équipe d’Ostende qui surprend de semaine en semaine. De quoi rendre fier son petit frère. "J’adore le voir jouer. On regarde souvent ses matchs chez moi avec deux amis. Dès qu’il marque, c’est la folie. On crie de joie même si, ce samedi, il ne trouvera pas le chemin du filet", sourit El Arfang.
Une famille unie derrière eux
Ce Mouscron - Ostende sera suivi scrupuleusement au Sénégal dans la famille Gueye. Leurs parents regarderont la bataille fraternelle accompagnés de leur autre frère et de leurs deux sœurs. "Notre grand frère regarde tous nos matchs et nous donne des conseils alors qu’il n’a jamais joué au foot, contrairement à notre papa", s’amuse le défenseur.
Le patriarche, Abdou, a évolué en Tunisie et en Italie sans parvenir à passer professionnel. "Il me dit sans cesse de tirer comme s’il avait été un attaquant alors qu’il évoluait au même poste que El Arfang", se marre l’Ostendais. À défaut de pouvoir compter sur les recommandations du paternel, l’Excel peut s’appuyer sur un observateur de choix pour tenter de contrer le numéro 7 des Côtiers.
"On ne doit pas être agressif sur lui mais intelligent car il est très fort dos au but. Il n’attend que le duel", prévient l’ancien Lillois. "C’est vrai que je suis content quand je me produis contre un défenseur qui est dur sur l’homme. Le plus difficile, c’est quand ton adversaire réfléchit. Là, cela me fatigue. Odilon Kossounou est redoutable dans ce domaine. C’est lui qui m’a le plus impressionné cette saison", confirme l’homme aux dix buts.
Espérons pour les Frontaliers que Silvestre et Agouzoul soient aussi puissants que l’Ivoirien pour l’annihiler. En cas de pépin, nul doute que les Hennuyers pourront compter sur El Arfang, qui n’aspire qu’à une chose : devenir aussi grand que son frère.