Jan Vertonghen explique son côté “salopard” qui a énervé Mourinho et Genk : "J’irrite les fans adverses avec un seul but, qu’Anderlecht gagne"
Jan Vertonghen est plus Dries Mertens que Kevin De Bruyne dans sa chasse à la victoire : “Plus je suis un salopard, mieux je joue.”
- Publié le 20-04-2024 à 10h12
Si Anderlecht est champion, le club le devra à ses guerriers plutôt qu’à son beau jeu. Le chef de file de la tribu est le plus ancien des combattants : Jan Vertonghen, qui fête ses 37 ans mercredi prochain. Sterke Jan n’est pas seulement viril dans les duels, il est aussi rusé et vicieux. Ou, comme il l’a dit lui-même dans le podcast MidMid : “Plus je suis un salopard, mieux je joue.”
Ce samedi, il peut s’attendre à un accueil chaleureux de la part du stade qui le déteste le plus, surtout après ce penalty-gate : celui du Racing Genk, où il s’est mis tout le monde à dos au mois d’août.
Il a énervé 5 fois l’Union
Retour au match contre l’Union. À partir du 2-1 de Francis Amuzu à la 76e, notre regard se braque sur Vertonghen.
75'20” Pendant qu’Amuzu fête son but, Vertonghen fait le signe du VAR vers ses supporters, comme pour dire : “Attention, il risque encore d’annuler le but, vu qu’il a déjà exclu Debast via le VAR.” Notre consultant Alex Teklak à ce sujet : “Il n’avait pas besoin de provoquer l’arbitre au travers de ses supporters.”
77’52” Coup franc pour Anderlecht dans son propre camp. Au lieu de le donner immédiatement, le défenseur repousse le ballon vers le poteau de corner, mais le cuir ne sort pas. Il gagne quelques secondes.
84’00” Schmeichel s’apprête à ramasser un ballon, Rodriguez n’a aucune chance de l’intercepter. Malgré cela, Vertonghen tente de lui couper la route avec un fameux coup d’épaule, mais l’Équatorien évite le contact.
93’26” Sykes tente de contrôler un ballon aérien du pied et effleure la poitrine de Vertonghen, qui fait semblant d’être touché au visage. La faute est sifflée en sa faveur. Le public s’enflamme. 40 secondes de gagnées.
95’08” Amuzu est mis au tapis par Machida. Vertonghen fait un dernier sprint de 30 mètres et se met à genoux pour souffler quelque chose dans l’oreille de Ciske en pointant l’index. Son message ne peut être qu’une chose : “Reste couché le plus longtemps possible, on est dans la dernière minute de jeu.”
2e devant Balotelli, Pepe, Suarez et Zlatan
Vertonghen a appris le métier à l’Ajax. En 2012, il reçoit non seulement le Soulier d’or aux Pays-Bas (il marque 10 buts), il est aussi deuxième du classement “De Grootste Etterbak”, une enquête organisée par le magazine Voetbal International qui désigne le joueur le plus irritant au monde. Le top 6 est le suivant : 1 : le Suédois Toivonen du PSV, 2 : Vertonghen, 3 : Balotelli de Manchester City, 4 : Pepe du Real, 5 : Luis Suarez de Liverpool et 6 : Zlatan du Milan AC. Dans MidMid, Vertonghen dit à ce sujet : “Toivonen jouait au poste de '10' au PSV. Lors de chaque match entre nous deux, c’était la guerre. On s’arrachait le maillot et on s’insultait. Je sais que ce n’est pas agréable à voir pour un supporter adverse, mais cela fait partie de mon jeu. Moi aussi, je déteste des joueurs irritants.”
Clash avec Torres, Mourinho le traite de tricheur
À Tottenham, Vertonghen perfectionne son côté “renard rusé”. Après le match nul des Spurs contre Chelsea (1-1) le 28 septembre 2013, José Mourinho le descend en conférence de presse. Tout au long du match, Vertonghen s’était chamaillé avec Fernando Torres, attaquant de Chelsea. Après s’être soi-disant pris un coup dans le visage, le défenseur s’était tordu de douleur et Torres s’était pris une deuxième carte jaune. Mourinho, qui sera son coach en 2019-2020 : “It’s a disgrace, c’est une honte. On aurait dit qu’il avait la mâchoire fracturée et qu’il devait être transporté à l’hôpital. Dans certains pays, on apprécie ce genre de cinéma. Heureusement, ce n’est pas le cas en Angleterre. Il (Vertonghen) est un joueur fantastique, mais un gars spécial. Il aurait d’ailleurs dû être suspendu pour ce match. Vous avez vu comment il a déshabillé l’attaquant d’Aston Villa lors de son dernier match ? Il méritait la rouge et Villa aurait dû recevoir un penalty. (Nicklas Helenius s’était retrouvé en slip après un 'tirage de short' par Jan). Et la réaction de Torres ? Je préfère ça à la tricherie de Vertonghen envers l’arbitre.”
”Jamais autant sifflé qu’à Genk”
Le côté vicieux de Vertonghen refait surface lors du sixième match de cette saison, à Genk (1-1). Pour rappel : Bonsu Baah se prend une première jaune après que le défenseur lui a sauté dessus à la suite d'un coup franc pour Anderlecht. Vertonghen : “Genk avait joué un match européen, on s’était mis d’accord de jouer à un haut rythme dès le début du match. Je voulais donc vite avoir le ballon.” Le Diable se prend une jaune, mais Bonsu Baah s’en prend une deuxième six minutes plus tard. L’Anderlechtois célèbre l’exclusion en faisant un “high five” avec un coéquipier. Se justifiant ensuite : “Cette rouge était sa propre faute, pas la mienne. Je ne voulais pas lui faire prendre une deuxième jaune, mais je recherche toujours des moments qui peuvent faire basculer le match.” En seconde mi-temps, Vertonghen se moque de Cuesta et Galarza après un duel et se laisse tomber quand Cuesta fait un geste du bras. L’arbitre ne bronche pas, mais le stade hue Vertonghen à chaque touche de balle. “Je pouvais comprendre les fans. Jamais, dans ma carrière, un stade ne s’est retourné contre moi comme lors de ce match à Genk.” Lors de son retour au vestiaire, il y a le clash avec le directeur technique de Genk, Dimitri De Condé. Les deux hommes s’échangent des mots peu amicaux, Vertonghen part au vestiaire en repoussant le patron sportif des Limbourgeois.
Excuses et crainte pour sa Fondation
Anderlecht ramène un point de Genk mais Vertonghen se sent mal dans sa peau. “Beaucoup de choses se sont passées sous l’émotion pendant et après le match, et n’auraient pas dû avoir lieu, aussi de mon côté”, s’excuse-t-il sur X, l’ancien Twitter. Le lendemain, il appelle De Condé pendant 20 minutes et les deux aplanissent leur différend. Dans MidMid, il ajoute : “Cette affaire m’a poursuivi pendant longtemps. Je ne voulais pas qu’on ait une telle image de moi en Belgique. C’est une des raisons pour lesquelles je ne voulais pas revenir en Belgique. Je voulais qu’on se souvienne de moi comme 'Jan des Diables' et pas 'Jan d’Anderlecht' ou d’un autre club.'” Le joueur craint surtout que sa Fondation (qui aide des enfants porteurs de handicap, malades et dans le besoin) en soit la victime. “Quelques jours avant ce match à Genk, j’avais eu un excellent entretien à Lanaken avec huit communes limbourgeoises par rapport à un partenariat. Puis, il y a eu ce match tumultueux où je me suis fait traiter de tous les noms d’oiseaux. Finalement, tout s’est arrangé et on a collecté beaucoup d’argent.”
”Avec Ilenikhena mais pas avec Janssen”
Dans ce même MidMid, Vertonghen s’est livré quant à son côté salopard. “J’ai constaté que j’ai besoin d’être comme cela pour être un meilleur footballeur. Lors de ma dernière saison à Tottenham et à Benfica, j’avais quelque peu perdu ce côté irritant qui m’aide à tout vouloir faire pour gagner un match. Oui, j’agace l’arbitre et j’essaie de déstabiliser mon adversaire. Mais je ne peux pas m’excuser pour cela, parce que mon seul objectif est de faire gagner Anderlecht. Burgess fait la même chose et Van Bommel était aussi un joueur comme cela, je ne l’aimais pas en tant qu’adversaire. J’ai d’ailleurs tenté de perturber Ilenikhena lors d’Antwerp – Anderlecht en décembre, ce que je n’aurais pas fait avec mon ami Vincent Janssen. George avait à peine 17 ans, je me suis demandé ce qu’il ferait si je le tirais par terre. Il a réagi et on s’est pris une jaune tous les deux. Mais s’il m’avait poussé dans le visage, il se serait pris une rouge et on aurait pu jouer à onze contre dix. Je sais que ce n’est pas fair-play et je sais que c’est la meilleure équipe qui mérite de gagner, mais je m’en fiche à ce moment. Or, dès que l’arbitre siffle la fin du match, ce côté salopard disparaît.”
”Quand Mertens a traité Dembélé de 'bête type'…”
Vertonghen ne se comporte pas seulement ainsi à Anderlecht : son attitude est la même en sélection. Et là, il n’est pas le seul. “Dries Mertens me ressemble fort. Dans des petits matchs à l’entraînement, on était comme chien et chat. Après l’entraînement, on est les meilleurs amis du monde.” Sauf quand ils jouaient des jeux de société. “Au Mondial 2014, Dries, Mousa (Dembele), Kevin (De Bruyne) et moi avions joué aux Colons de Catane. C’est un jeu où il faut beaucoup négocier et où on peut se piquer des cartes. Kevin était le seul qui était le moins compétitif. On voulait tous que Kevin gagne pour ne pas que les deux autres l’emportent ! À l’Euro 2016, cela a mal tourné quand Dries a soudainement dit à Mousa : 'Tu es un bête type.' Vous auriez dû voir la rage dans les yeux de Mousa ! On a dû arrêter, sinon notre amitié aurait été en danger. On a essayé de rejouer au Mondial 2018, mais on a dû remettre le jeu au placard. Et à Anderlecht, j’ai tenté de jouer avec Thorgan, Flips et un quatrième, mais je sentais que là aussi, il fallait que je me retire, pour éviter des conflits. Et pourtant, je n’aime jouer à des jeux pareils – comme aux cartes – qu’avec des gars qui veulent vraiment gagner, comme Dries et Yannick (Carrasco). Quand je joue à la maison et qu’on me dit : 'Bravo, bien joué !', je pète un câble. Non ! Il faut avoir la même haine que moi. Il faut me détester et m’insulter !”