La cinquième vie du Prince Frankie
De 1963 à aujourd’hui, le RSCA a animé l’existence de Frankie Vercauteren.
- Publié le 03-10-2019 à 20h24
- Mis à jour le 04-10-2019 à 10h55
De 1963 à aujourd’hui, le RSCA a animé l’existence de Frankie Vercauteren. Frankie. Pas besoin d’ajouter quelque chose derrière. Comme Jef, Paul, Robbie, Pär, Vince ou quelques autres, le prénom suffit à faire frissonner les supporters d’Anderlecht. Le privilège des légendes. Et pourtant, Vercauteren préfère qu’on l’appelle Frank. Comme sur sa carte d’identité. Fans du chanteur américain Frankie Avalon, ses parents voulaient lui donner ce prénom mais l’État n’acceptait pas facilement les excentricités à la fin de l’année 1956. Ce sera donc Frank à la vie et Frankie au Parc.
1En jeunes de 1963 à 1975 : trahison familiale et banane
Été 1963. Le petit Frank n’a pas encore sept ans et il adore le football. C’est de famille. Son père et son frère sont de grands supporters du Daring mais Frankie s’affilie à Anderlecht. Drame familial. Pendant les premières semaines, son père l’empêche même d’aller s’entraîner chez le grand rival. Frankie finit par gagner : il peut jouer avec les Diablotins du RSCA. Son père le suit de près. "Il était supporter de son fils, pas du club où jouait son fils", expliquera Vercauteren, des années plus tard.
Quand au début des années 1990, Frankie terminera sa carrière au Daring, devenu le RWDM, son père n’était plus là pour le voir. Il lui dédiera d’ailleurs un but contre le RSCA avec un regard vers le ciel.
Chez les jeunes du Sporting, Vercauteren est vite repéré. C’est alors un attaquant prometteur. Jusqu’à ce que Martin Lippens en fasse un milieu gauche. Sauf que ses centres n’étaient pas assez tendus aux yeux des entraîneurs. Il mettait toujours cette trajectoire incurvée qui énervait ses coachs. Personne n’imaginait alors que les centres-bananes de Vercauteren deviendraient sa signature.
2Joueur de 1975 à 1987 : de porteur d’eau à Prince du Parc
Le Parc Astrid le découvre un soir de septembre 1975. Vercauteren, 18 ans, remplace Jean Thissen face au Racing Malines. Une première année chez les pros qui sera pourrie par les blessures, même s’il marquera son premier but en toute fin de saison. Contre qui ? Le RWDM, évidemment.
C’est grâce à l’arrivée de Raymond Goethals l’année suivante que sa carrière va vraiment décoller. Le Sorcier imagine un flanc gauche Vercauteren-Rensenbrink. Frank accepte un rôle de porteur d’eau et se sacrifie défensivement pour Robbie. Ça deviendra l’arme principale d’un Sporting qui est alors au sommet de l’Europe.
Ce n’est qu’au départ du Néerlandais que Vercauteren s’approprie réellement le flanc gauche anderlechtois. Sous les ordres de Tomislav Ivic, il explose, marque et balance les caviars. Le RSCA gagne beaucoup de trophées et Vercauteren s’offre un hat-trick : Soulier d’Or (1983), brassard de capitaine et surnom officiel. Frankie devient le Prince du Parc Astrid.
La fin de ce chapitre sera moins belle. Une histoire de contrat entre Michel Verschueren et lui. À presque 31 ans, Vercauteren voulait prolonger pour quatre ans mais le manager général voulait un bail plus court. L’époque avant l’arrêt Bosman. Au printemps 1987, il quitte Anderlecht après 24 années pour tenter l’aventure nantaise.
3Adjoint de 1998 à 2005 : il apprend dans l’ombre
Il faudra attendre un peu plus de dix ans pour revoir Vercauteren chez les Mauves. Une histoire d’ADN, déjà. Roger Vanden Stock, qui venait de succéder à son père, aimait l’idée d’avoir une légende du club comme entraîneur. Il revient à l’été 1998. D’abord chez les jeunes comme coordinateur. Puis très vite comme adjoint après le C4 précoce d’Arie Haan. Avec Jean Dockx, il formera un duo qui reste gravé dans les mémoires grâce à un come-back de la 16e place à un ticket européen. Toute ressemblance avec une situation actuelle ne serait sans doute pas fortuite…
Quand Aimé Anthuenis débarque l’année suivante, Vercauteren reste adjoint. Là aussi avec succès, les trophées en plus. Pareil avec Hugo Broos ensuite. Ensemble, ils lancent un gamin prometteur : Vincent Kompany. Le second Prince du Parc.
En février 2005, Broos reçoit son C4. Le poste de T1 est alors logiquement proposé à Vercauteren. Tout le monde s’attendait à un grand oui mais il demande un délai de réflexion. Il reviendra avec une contre-proposition : être nommé directeur sportif par la même occasion. Une sorte d’assurance-vie pour ses débuts de coach principal. Pas question d’être juste un intérimaire qu’on jette au bout de quelques semaines. Après près de sept années dans l’ombre, il arrivait dans le monde des T1 avec ambition.
4Entraîneur de 2005 à 2007 : deux titres puis une dispute
Ses débuts sont parfaits : champion en 2006 puis en 2007. Son style de jeu ne ravit pas toujours l’exigeant Parc Astrid mais les résultats sont là.
Avec Vercauteren, le Sporting passe aussi dans une nouvelle ère, celle du foot moderne comme on le connaît aujourd’hui. Il instaure les entraînements à huis clos, intègre un psy dans le staff et lance la mode du team-building en Belgique. Ses joueurs doivent danser le tango ensemble ou s’occuper d’un œuf dans une cuillère comme d’un bébé. Les moqueries fusent mais Vercauteren persiste : "Avant, le team-building n’était pas nécessaire car les gars s’amusaient ensemble dans la salle des joueurs. Il n’y a plus vraiment de salle des joueurs à l’heure actuelle et il faut travailler cet esprit de groupe d’une autre manière."
En 2007-2008, Ariël Jacobs remplace Glen De Boeck dans le rôle d’adjoint. L’alchimie ne se fait pas avec Vercauteren. Les résultats sont moins bons et le Prince du Parc Astrid est limogé le 11 novembre après une défaite au Beerschot. L’écart grandissant avec le Club Brugeois inquiétait trop la direction. Un départ compliqué, comme lors de sa période de joueur, que Vercauteren mettra du temps à digérer.
Douze ans plus tard, il est de retour pour une cinquième vie en mauve. Le club a changé de propriétaire mais Frankie retrouve Pär et Vince. Territoire et prénoms connus. Trois Souliers d’Or au chevet du Sporting.