Eupen relégué : ces 6 raisons qui expliquent la descente aux enfers des Pandas
C’est fait : Eupen ne jouera plus en D1A dès la saison 2024-2025. C’est officiel depuis ce 5 mai, mais cette relégation ne s’explique évidemment pas via la seule déroute de dimanche à Courtrai. Analyse.
- Publié le 06-05-2024 à 19h58
- Mis à jour le 09-05-2024 à 16h26
Huit ans après, Eupen quitte la D1A, c’est officiel et mathématique depuis la défaite à Courtrai de ce dimanche 5 mai 2024 en avant dernière journée des play-down.
Le club a réagi dans la foulée via communiqué, expliquant "qu’une multitude de causes dans les domaines les plus divers que le club va traiter en interne, ont contribué à ce résultat. La direction discutera de cette analyse avec le comité directeur de l’AS dans le but de poser les jalons nécessaires à un avenir sportif durable et à nouveau couronné de succès pour notre club en Jupiler Pro League." Des explications qui sont multiples. Analyse en 6 points.
1. Le désengagement partiel d’Aspire
C’est le nerf de la guerre: l’argent n’a plus coulé à flots du côté d’Eupen ces dernières années. Le propriétaire qatari du club, l’Aspire Academy, reste le principal pilier du club, mais se contente du strict minimum depuis 2021. Et ça, pour un club de la taille d’Eupen qui n’a jamais trouvé d’alternative ou de complément financier ailleurs, c’est un vrai problème… qui s’est avéré chaque fois plus imposant au fil du temps.
2. Un noyau trop faible
En 2020, Eupen construisait une armada à renforts de multiples transferts. Même l’ex-défenseur du Barça Adriano signait au Kehrweg. Incroyable. Après cette saison de toutes les dépenses ponctuée d’une place dans le ventre mou du classement, Aspire a décidé que la fête était terminée. Petit à petit, on a dégraissé, laissant chaque fois partir les différents cadres au terme de leurs contrats respectifs. Le hic, c’est que derrière, on les a remplacés par des éléments d’expérience et de qualité moindre(s), voire des paris hasardeux sur l’avenir. Mais à force de tirer sur la corde, l’Alliance a pris part au championnat 2023-2024 avec le noyau le plus faible de ces 10 dernières années.
3. Les décideurs sportifs
Sans réel directeur sportif depuis le départ de Jordi Condom, Eupen fonctionne avec un recruteur nommé Siggi Marti et l’aval du directeur général Christoph Henkel. L’Allemand Siggi Marti est sorti de l’ombre pour poser plusieurs choix en accord avec la direction générale. Cette saison, après avoir nommé l’Allemand Florian Kohfeldt à la tête de l’équipe, il lui a également autorisé plusieurs gros transferts. Milos Pantovic, Kevin Mohwald et Bartosz Bialek ont ainsi rejoint le club germanophone à renforts de juteux contrats. Verdict: les deux premiers n’ont jamais presté au niveau attendu et le 3e s’est blessé avant même l’entame du championnat. Il a été remplacé par le fantomatique Finnbogason. Il n’y avait vraiment pas d’autre offensif à signer ? Renaud Emond un peu plus tôt, par exemple ?
4. Le fantasme allemand
C’est devenu un gros fantasme qui revenait de manière cyclique ces dernières années: opter pour un entraîneur allemand à Eupen. À croire que les Pandas devaient s’armer au mieux pour la Bundesliga et pas la Pro League belge. Résultat: aucun Teuton n’a su faire oublier le regretté Wolfgang Frank. Stefan Kramer, Bernd Storck et Florian Kohfeldt se sont cassé les dents avant d’être limogés. Sauf pour Kohfeldt, qui a courageusement quitté le navire quand la noyade lui semblait inévitable. C’était à la mi-mars.
5. Une direction trop passive
Alors qu’Eupen s’enlisait, la direction n’a jamais osé remettre en question le rôle de l’entraîneur. S’il n’avait pas démissionné, il y a fort à croire que Kohfeldt aurait été maintenu jusqu’au bout de cette saison cauchemardesque. Les autres clubs concernés par le maintien ont, eux, réagi plus vite. Même Charleroi a acté le douloureux divorce avec le fidèle Mazzu, rappelant que la priorité était de sortir la tête hors de l’eau. Peu importe comment, peu importe avec qui. Chez les Noir et Blanc de l’est du pays, on a cherché un coach sans succès (et… Mazzu a refusé la mission), avant de confier le destin de l’équipe à un régional, Kristoffer Andersen, T2 qui n’était donc pas le premier choix du club mais qui a fait ce qu’il a pu dans un contexte très difficile.
Dans ses indécisions et son immobilisme, la direction du club doit, aussi, tirer les conclusions qui s’imposent.
6. Une identité qui se perd
En D1A, Eupen était le petit club d’une petite ville. Certains l’ont parfois oublié. D’autant que ce côté sympathique et atypique aurait pu être un atout. En cadenassant la communication, en transférant d’illustres inconnus et en oubliant parfois les nombreux francophones qui soutiennent l’AS, les décideurs se sont peu à peu perdus en chemin. Comment expliquer qu’un club comme Eupen soit le moins couvert médiatiquement de toute la D1A ? Comment se permettre de snober les journalistes, en ne donnant plus d’informations sur le noyau ou en n’envoyant plus de joueurs en conférence de presse d’avant-match alors que celles-ci ne séduisent plus grand monde ? Force est de constater que tout ça n’a servi à rien. Et que la fréquentation du stade continue d’être tristement faible.
Côté noyau et côté staff, il était possible de recruter du belge (si pas du régional) et de tenter de forger une réelle identité bilingue (français-allemand) au sein du club et de ses supporters. Aujourd’hui, le petit club de la petite ville tente vainement de séduire sur les réseaux sociaux en anglais, en visant une communauté artificielle qui ne suivra pas en Challenger Pro League, le nouveau nom de la D1B…
Bref, il y a du travail à Eupen et, surtout, un réel besoin de renouer avec l’identité du club, celle qui le rendait charmant et intéressant il n’y a pas si longtemps que ça.