Neymar doit prendre exemple sur Hazard
Les deux joueurs sont matraqués par les défenseurs mais ils ne réagissent pas de la même façon…
- Publié le 04-07-2018 à 10h23
- Mis à jour le 04-07-2018 à 11h20
Les deux joueurs sont matraqués par les défenseurs mais ils ne réagissent pas de la même façon…
Brésil-Belgique : ce quart de finale opposera deux des plus gros favoris au titre mondial, mais aussi deux des joueurs les plus visés par les défenses adverses. Au fil du temps, Neymar et Eden Hazard sont devenus de véritables cibles pour les entraîneurs adverses, au point de donner parfois l’impression qu’un contrat a été placé sur leur tête.
Pourtant, les deux artistes ne réagissent pas de la même façon lorsque leurs chevilles sont caressées : le Diable se relève rapidement et reprend directement ses esprits, alors que Neymar propose une comédie qui ferait pratiquement passer Benoît Poelvoorde pour un jeune premier.
Cela permet à Eden Hazard de garder une grosse cote de popularité chez les supporters (il a été élu homme du match face au Japon sans avoir livré sa meilleure prestation) et d’être respecté par ses adversaires, qui apprécient sa sportivité.
Neymar est davantage controversé car ses roulades et ses incessantes rouspétances ont tendance à le décrédibiliser aux yeux du public, lassé de voir un si grand technicien tomber dans le piège de la surenchère. Il est entré dans un cercle vicieux : désormais, ses jérémiades ne sont pratiquement plus prises au sérieux et induisent le doute dans la tête des arbitres. Reste à voir quelle tactique sera la meilleure vendredi soir mais là, tout dépendra du comportement de l’arbitre…
La vie d'Hazard: être matraqué pour savoir qu'il est bon
Eden Hazard reste stoïque face aux tacles adverses, ce qui fait de lui un joueur aimé par le public
"Je bois de l’eau." Lorsqu’il doit expliquer comment son corps peut supporter un tel matraquage, Eden Hazard préfère manier l’humour.
Au fil du temps, le sujet est devenu assez récurrent tant les défenseurs prennent un malin plaisir à le plaquer au sol, seul moyen actuel pour stopper ses courses vers l’avant.
Face à l’Égypte, il n’avait fallu que trente secondes pour qu’il reçoive un solide coup de jambon et demande l’intervention des soigneurs. Contre le Panama, cela avait pris cinq minutes supplémentaires, sans pour autant l’empêcher de reprendre le match comme si de rien n’était. Ou alors motivé par l’envie d’humilier celui qui a tenté de le démolir. "Quand on me tacle sans cesse, cela prouve que je suis bien dans mon match. Cela me motive encore plus. Mais quand on me laisse tranquille, j’ai parfois l’impression de passer à côté de ma prestation", sourit-il.
Il faut dire que le numéro dix est désormais habitué à vivre avec les coups.
À vingt et un ans, il était déjà régulièrement couché au sol, au point d’être, selon des statistiques officielles, le joueur le plus taclé d’Europe avec une moyenne de 3,6 interventions fautives par match.
"C’est vrai que j’ai observé un changement d’attitude à mon égard, mais je ne vais pas changer mon style de jeu pour autant, sinon je vais perdre mon rendement sur le terrain", disait-il à l’époque.
Soutenu par son entraîneur, Rudi Garcia, qui demandait davantage de protection de la part des arbitres, Eden Hazard a toujours gardé cette même ligne de conduite : ne pas se plaindre. Cette insouciance est certainement l’une des clés de sa réussite.
Sur la pelouse, la notion de plaisir est essentielle pour lui et le jour où il perdra la maîtrise de ses nerfs, il ne sera plus le même joueur. Son déménagement de l’autre côté de la Manche lui a également permis de s’endurcir. Là-bas, les coups de jambon se succèdent aussi rapidement que les tournées de pintes dans les bars du coin. "Mais je ne pense jamais à une blessure. Y songer, c’est le meilleur moyen de se blesser", dit-il.
José Mourinho a souvent eu du mal à garder son flegme en voyant celui qui était son artiste manger trop souvent la pelouse à son goût.
"Quand on aime le football, on aime Eden Hazard. Mais quand on voit la façon dont il est agressé par les défenseurs et le manque d’assistance des arbitres, on risque de ne plus voir Eden Hazard dans notre championnat. Il subit une, deux, trois, quatre, cinq, dix fautes dangereuses par match. Ils n’arrêtent jamais de le taper mais heureusement, le gamin résiste car il est fantastique et fort physiquement", avait-il déclaré après une défaite de Chelsea à Tottenham.
Roublard, le technicien portugais avait pourtant utilisé cette même recette, il y a un an et demi, pour stopper le même Eden Hazard qui était devenu son adversaire. À un point tel qu’Antonio Conte avait pété les plombs lors de la conférence de presse qui avait suivi la rencontre. "L’arbitre doit protéger des joueurs comme lui. Nous voulions jouer au foot mais c’était impossible pour Eden en début de match. Il était sans cesse arrêté fautivement. Peut-être était-ce une tactique de Manchester United", sous-entendait le coach italien.
Lors de la défunte saison, le Diable Rouge a été le quatrième joueur le plus fauché de Premier League (82), derrière Richarlison (95, Watford), Jordan Ayew (87, Swansea) et Dele Alli (84). Mais avec moins de temps de jeu au compteur que ces trois autres joueurs, il était, en moyenne, le joueur le plus souvent fauché de Premier League (une faute toutes les 30 minutes). Au moins, cela prouve qu’il est bien dans ses matches, comme il le dirait s’il était confronté à cette statistique…
Trop comédien pour être aimé comme Messi
Sa propension à en faire des tonnes ne permet pas à Neymar d’être apprécié à sa juste valeur
Le Brésilien représente l’archétype du joueur que les défenseurs aiment matraquer : rapide, technique et dangereux. Mais, surtout, il dégage une arrogance qui aiguise l’appétit des bouchers. Son regard noir et son sens de la provocation font de Neymar l’un des joueurs les plus clivants du paysage footballistique mondial.
"C’est normal qu’il soit à ce point agressé. C’est très difficile pour un joueur d’aller au duel avec lui car il est tellement fort qu’on est pratiquement obligé de faire une faute pour le stopper", disait Thiago Silva après la qualification de la Seleçao face au Mexique.
La star du Paris Saint-Germain est désormais devenue l’homme à abattre. Le terme est à peine exagéré car lundi après-midi, les Mexicains ont distribué les coups avec une certaine générosité. Miguel Layun lui a même broyé la cheville intentionnellement, lassé par les provocations techniques incessantes de son opposant direct. Neymar ne fait jamais dans la demi-mesure et cherche sans cesse à humilier son adversaire au gré d’un geste technique sensationnel.
Il ne connaît pas la solution de facilité et aime aller dans le duel en un contre un, quitte à en subir les conséquences physiques. "Il est intelligent, il sait comment gérer ce genre de situation", le défendait son désormais ancien entraîneur, Unai Emery.
C’est pourtant bien là que se situe le problème. Les roulades incessantes du Brésil au moindre contact finissent par lasser le public. Sur les réseaux sociaux, ses réactions démesurées font l’objet de parodies particulièrement amusantes (il remplace une boule de bowling lors d’un strike, notamment) et permettent à d’anciennes gloires du football de sortir leurs plus beaux jeux de mots.
"On la touche à peine et elle peut tourner pendant des heures", a même imagé Eric Cantona, comparant Neymar à une valise jaune. "Tu es un grand joueur… et un grand acteur. Mais attention aux erreurs de logique. Si on te touche à l’épaule droite, tu ne peux pas hurler de douleur en te tenant la joue gauche."
Pourtant, le Brésilien est bien matraqué. Le sélectionneur suisse avait même reconnu qu’il s’agissait d’une stratégie établie avant la rencontre. Résultat : Neymar avait subi dix fautes, un record en Coupe du Monde depuis l’édition 1998 et les onze fautes commises sur Alan Shearer face à la Tunisie.
"Il n’y a pas eu de faute grave et je pense que l’équipe a défendu proprement. La plupart des duels ont été corrects. Il y avait un homme placé en marquage sur lui et c’était l’une des clés pour le neutraliser", déclarait Vladimir Petkovic. Cette conception du jeu est partagée par la majorité des entraîneurs de Ligue 1.
Son arrivée fracassante dans le Championnat de France a braqué tous les projecteurs sur sa seule personne. Les défenseurs de l’Hexagone avaient déjà la réputation d’être virils et la star parisienne l’a appris à ses dépens.
Au total, il a été plaqué au sol à 104 reprises, et occupe la 2e place de ce classement spécifique derrière Nabil Fekir (106) qui a toutefois disputé plus de matches. "Si je devais donner un conseil à Neymar ? Il ne faut pas qu’il aille jouer en Angleterre", souriait Dimitri Payet, son rival à Marseille. "Il n’est pas le seul joueur à être souvent taclé. Flo Thauvin et Nabil Fekir peuvent en témoigner. Tous les joueurs qui dribblent et provoquent sont amenés à prendre des coups."
Mais tous ne réagissent pas de la même manière. C’est peut-être cela qui sépare encore Neymar du Ballon d’Or… "S’il veut être autant aimé que Lionel Messi, il vaut mieux qu’il arrête la comédie. C’est dommage car c’est un joueur fantastique", disait le défenseur du Celtic Mikael Lustig juste après l’avoir affronté en Ligue des Champions. Le message est passé…