Sprints pancartes, frites du dimanche et soirée de remerciements : zoom sur les jeunes années d’Arnaud De Lie
Vainqueur sortant de la Famenne Ardenne Classic, le coureur de chez Lotto Dstny fera son retour à la compétition ce dimanche sur l’épreuve organisée par son club formateur, le CC Chevigny. On a ouvert l’album à souvenirs avec deux de ses éducateurs.
- Publié le 28-04-2024 à 08h08
”N’installe pas les banderoles publicitaires à cet endroit, c’est là qu’on a prévu de placer le bus de Lotto Dstny. Pas trop loin du podium…” Vendredi midi, à 48 heures du départ de la Famenne Ardenne Classic qui marquera le retour à la compétition d’Arnaud De Lie après un début de saison contrarié par la maladie de Lyme et une chute sur le Samyn, l’ombre du dernier vainqueur de l’épreuve marchoise semblait déjà planer dans l’un des palais du Wex où se dérouleront les opérations de départ. C’est que le Taureau de Lescheret a fait toutes ses classes au sein du CC Chevigny (2014 à 2020), le club organisateur de cette course 1.1 au calendrier UCI. “Voir Arnaud avec le dossard numéro un épinglé à l’arrière de son maillot, ce sera forcément quelque chose de fort, un vrai symbole”, sourit Laurent Mars, l’une des chevilles ouvrières de la structure luxembourgeoise.
Entre une tartine rapidement avalée et le comptage des barrières Nadar, le dynamique éducateur a pris le temps de rembobiner le fil de ses souvenirs en compagnie d’Anthony Hubert, le directeur sportif de De Lie chez les cadets, qui a mis en pause le découpage des autocollants destinés aux voitures suiveuses le temps de quelques grands éclats de rire.
L’arrivée au club en 2014 : “Même à 12 ans, personne ne le battait au sprint…”
”Arnaud est arrivé chez nous en 2014 dans la catégorie des aspirants 12 ans en compagnie de son frère Axel (NdlR : de trois ans son aîné), entame Laurent Mars. Il avait fait ses premiers débuts avant cela chez les minimes à Houffalize, dans un club essentiellement orienté vers le VTT. Je connaissais bien son père Philippe et la famille puisque je suis, moi aussi, originaire de la commune de Vaux-sur-Sûre. On a très vite compris qu’on avait affaire à un petit phénomène (rires)… Lors des entraînements collectifs du mercredi après-midi, alors qu’il n’avait pourtant que 12 ans, personne n’arrivait à battre Arnaud au sprint alors qu’il y avait des jeunes âgés de trois à quatre ans de plus que lui et que certains adultes se mêlaient aussi parfois à ce petit peloton.
On tentait de mettre au point des stratégies anti-Arnaud à l'entraînement, mais pas moyen de le battre!
La dimension ludique du vélo est, à nos yeux, essentielle à cet âge-là et nous effectuions donc des sprints pancartes. Tout est dans le nom de l’exercice, c’est le premier qui passe devant un panneau marquant l’entrée ou la sortie d’un village qui a gagné (rires)… On tentait de mettre au point des stratégies anti-Arnaud en l’attaquant à tour de rôle dans l’approche des derniers hectomètres mais rien à faire, c’était toujours lui qui l’emportait avec son grand sourire accroché aux lèvres. Il ne disposait pourtant que des tout petits braquets autorisés pour sa catégorie, mais il tournait les jambes à une vitesse folle en mêlant déjà sa force à une cadence qui frôlait parfois les 140 coups de pédale par minute…”
Les années cadets : “Les autres directeurs sportifs venaient me féliciter avant l’arrivée !”
”J’ai dirigé Arnaud chez les cadets en 2017 et 2018, poursuit Anthony Hubert. Il était déjà un serial winner avant cette catégorie mais il y a aussi très souvent levé les bras, près de 25 fois en deux ans. Quand on prenait le départ d’une course avec lui, on savait qu’on avait pratiquement une chance sur deux de l’emporter. Il arrivait même régulièrement que certains de mes collègues directeurs sportifs viennent me féliciter pour la victoire avant même l’arrivée (rires)… Quand le peloton se regroupait dans la finale d’une course et que cela allait se jouer au sprint, beaucoup considéraient en effet que l’identité du vainqueur était connue.
Au retour des courses le dimanche soir, on avait pour tradition de craquer pour une portion de frites.
Au retour des courses, notre tradition était souvent de craquer pour une portion de frites, très souvent dans le même établissement sur les hauteurs de Namur. Cela ne colle sans doute pas à la philosophie des gains marginaux, mais on avait plaisir à partager ces moments en groupe, Arnaud est quelqu’un de profondément collectif, convivial et sociable. Je pense ne jamais avoir entendu un seul coureur, même parmi ses rivaux, avoir un mot négatif sur lui. Son côté gagneur n’a jamais étouffé le respect qu’il a pour ses adversaires. C’est pourtant un vrai compétiteur. Je me souviens qu’au départ d’une course à Dottignies, je lui avais glissé que son frangin Axel avait fait une superbe course quelques années plus tôt en attaquant à de nombreuses reprises pour finalement terminer deuxième. Arnaud m’a répondu avec un petit sourire qu’il ferait mieux que son frère. Et bingo, quelques heures plus tard, il levait les bras…”
Son attachement au club : “Il partage encore ses entraînements avec nos jeunes”
”Arnaud nourrit un vrai lien d’attachement avec notre club, raconte Laurent Mars. Cet hiver, il a par exemple participé à pratiquement tous nos entraînements collectifs du samedi. Un jour, il avait deux exercices spécifiques à réaliser de 45 minutes chacun entrecoupés par un quart d’heure de récupération et m’a demandé si cela ne me dérangeait pas qu’il nous accompagne au vu de l’intensité de sa séance. Je lui ai donné le feu vert et il a tracté tout notre petit peloton étiré en file indienne pendant deux heures. On est rentré à une moyenne de 34 km/h mais tout le monde avait passé un super moment. On parle d’un gars qui avait terminé la saison dernière dans le Top 15 mondial ! Je ne crois pas qu’un joueur de foot de ce niveau propose à des gamins de 15 ans d’aller taper la balle avec lui (rires)… Et il poste encore régulièrement des messages dans le groupe Messenger du club avec l’itinéraire de son entraînement en invitant ceux qui le souhaitent à partager un bout de route avec lui. On appelle parfois cela le 'bus De Lie' entre nous (rires)…
Fin 2019, Arnaud et sa famille ont conviés 60 personnes à une soirée de remerciement.
Fin 2019, pour remercier les gens qui avaient œuvré dans l’ombre, il a invité une soixantaine de personnes autour d’un hamburger dans une salle que la famille avait louée dans son village. Et ses parents m’ont déjà glissé plusieurs fois dans un sourire que la randonnée à son nom que nous organisons depuis deux ans maintenant et nous permet de lever des fonds pour le fonctionnement du club était une manière d’offrir une forme d’indemnité de formation. Une geste qui en dit sur les valeurs de ce clan. Des gens bien comme on dit tout simplement…”