Jambes: à Basse-Enhaive, le sentiment d’être délaissés mais pas résignés
Des parents d’élèves de l’école de Basse-Enhaive, conjointement avec le comité de quartier, se lancent dans la récolte de signatures. Une pétition en réaction à la décision de la Ville de ne pas leur fournir une nouvelle école, comme promis.
- Publié le 18-04-2024 à 09h48
Mardi soir, le collège communal a répondu en long et en large aux questions des conseillers pour justifier son rétropédalage dans le dossier de l’école de Basse-Enhaive. Le président du CPAS, Philippe Noël (Écolo), a dévoilé les projets qui seront développés dans le futur bâtiment construit et financé par Thomas & Piron, de l’autre côté de l’avenue Prince de Liège: à savoir une crèche et une école d’alphabétisation. Et non plus une nouvelle école.
Dans l’assemblée, des parents d’élèves et des membres du comité de quartier ont écouté attentivement les échanges et pris connaissance, eux aussi, des derniers rebondissements dans le dossier. Au lendemain des débats, ils espèrent encore faire fléchir le politique afin que celui-ci revienne sur sa décision et honore la promesse faite en 2020. Celle de reconstruire un établissement scolaire à destination des enfants du quartier après avoir ordonné la démolition de l’implantation initiale, pour raisons sanitaires. Et c’est en nombre qu’ils veulent user de leur pouvoir d’influence. Une pétition est sur les rails. "On ne comprend pas la décision. On a l’impression d’être relégués au second plan", déplore Valérie Collard, présidente du comité des parents d’élèves de l’école de Basse-Enhaive.
La Ville a en effet expliqué avoir revu ses priorités en fonction des besoins rencontrés dans d’autres écoles du réseau communal. "Les travaux à Bouge-Centenaire auraient très bien pu attendre un an. Peut-être pensent-ils qu’il s’agit d’un meilleur quartier. On se sent délaissés", commente Valérie Collard.
Des arguments qui ne convainquent pas
Dans son argumentaire, l’échevine de l’Enseignement, Christine Halut (Écolo), a évoqué la baisse de fréquentation scolaire depuis la relocalisation temporaire au sein de l’école de Froidebise, conjuguée à de nombreuses places vacantes dans les écoles environnantes. Une situation qui rend peu opportune la création d’un nouvel établissement dans le quartier, selon la majorité.
Mais d’après la représentante du comité de parents, ce sont les contraintes liées au déménagement, et le manque de souplesse organisationnelle, qui ont entraîné l’érosion du nombre d’élèves en provenance de Basse-Enhaive. "Si je veux profiter des navettes mises en place par la Ville, je suis obligée de récupérer mon fils à 15 h 45. Il n’y a pas d’étude à Froidebise. Une garderie est organisée à Belle-Vue mais c’est mon mari qui doit s’y rendre. Il est alors passé 18h quand mon enfant rentre de l’école."
Inscrire celui-ci dans un établissement voisin, comme le suggère la Ville, ne rencontre pas les attentes de Valérie Collard, qui défend une école accessible à pied pour les gens du quartier. "J’habite près du Brico. Aller à l’école d’Erpent-Village, c’est long et hyper dangereux. Et on sait qu’à ces heures-là, les bus sont bondés et il arrive qu’ils ne s’arrêtent même pas."
L’école, lieu de rencontre
Ces parents en colère reçoivent le plein soutien du comité de quartier de Basse-Enhaive. Sa présidente, Donatienne Gautier, rappelle que la présence d’une école est génératrice de lien social, même pour les personnes qui n’y ont pas d’enfant inscrit. "Il y avait pas mal d’activités qui se déroulaient dans l’ancien bâtiment. C’était le seul et unique lieu où elles pouvaient s’organiser. Elles ont aujourd’hui disparu ou ont été déplacées. Beaucoup ne sont plus accessibles aux personnes à mobilité réduite", commente notre interlocutrice. Elle ajoute: "On a aussi perdu un endroit propice aux rencontres. Basse-Enhaive est un quartier avec une énorme mixité sociale. Il y a certaines personnes qu’on ne rencontre que lorsqu’elles conduisent leurs enfants à l’école."
La perspective d’avoir une implantation scolaire au cœur d’un nouveau lotissement enchantait ces habitants du bord de Meuse qui espéraient ainsi retrouver une dynamique de quartier. Ils y croient encore… un peu.
Un bâtiment plus petit
À défaut d’une école fondamentale, c’est désormais une crèche couplée à une école d’alphabétisation qui sera construite dans le nouveau quartier créé par Thomas & Piron. Le président du CPAS Philippe Noël confirmant au conseil communal de mardi que la charge d’urbanisme imposée au promoteur sera bel et bien maintenue. Au lendemain de la séance, celui-ci nous a toutefois précisé que le bâtiment serait d’un gabarit moindre que prévu.
Si la présidente du comité de parents d’élèves, Valérie Collard, ne voit pas d’un mauvais œil l’implantation d’une crèche, elle se questionne sur la méthode. "Ça donne l’impression que la Ville essaye de faire rentrer le projet dans les clous en ce qui concerne les charges d’urbanisme. Mais dans le permis unique octroyé à Thomas & Piron, il est bien précisé que c’est une école qui doit être construite et pas une crèche, développe-t-elle. Je ne veux pas parler à la place du promoteur mais on peut imaginer que celui-ci comptait miser sur la présence d’une école pour vendre ses logements. Peut-être que certains clients ont d’ailleurs déjà acheté pour cette raison-là."
La démolition toujours contestée
La fermeture de l’école de Basse-Enhaive en 2019, en raison de la présence d’un champignon toxique dans la structure du bâtiment, et la démolition qui a suivi quelques mois plus tard, ne passent toujours pas dans le quartier. "Mon aîné a fait toute sa scolarité à cet endroit. Tous les ans, il fallait nettoyer les murs parce qu’il y avait de l’humidité. Et on nous a fait croire par après que personne n’était au courant ?" s’indigne Valérie Collard, persuadée qu’il y avait des solutions moins radicales que la démolition.