”Cet immeuble était prévu pour deux logements, il a été divisé en 39 chambres”, un dossier de marchand de sommeil au tribunal
Un homme gestionnaire d’une société se comportant comme un marchand de sommeil était appelé à la barre ce mardi.
- Publié le 24-04-2024 à 19h45
Fin avril 2022, un homme descend dans un immeuble dont son entreprise est propriétaire et sa fille gestionnaire, situé rue des Coteaux à Schaerbeek. À l’aide d’une masse, il casse tout. Murs, portes, installations, tout y passe. C’est en tout cas le récit porté par onze plaignants au tribunal ce mardi. Ils accusent l’entrepreneur d’être un marchand de sommeil. Ce dernier était à la barre ce mardi avec son ex-femme et sa fille (absente pour raisons médicales) et, en guise de personne morale, sa société de nettoyage.
À la fin des années 2010, son entreprise débourse 1 125 000 euros pour s’offrir cet imposant immeuble. “C’était un immeuble prévu pour deux logements, mais il a été divisé en 39 chambres”, note le juge. Les accusés l’assurent, c’était déjà le cas au moment de l’achat, bien que l’ex-femme du propriétaire, elle, n’a “aucune idée” du nombre de cuisine dans le bien. Il n’y en avait qu’une. “C’est à partir de 2020 que nous n’avons plus eu la possibilité de gestion dans cet immeuble”, avancent les accusés, qui estiment que la crise sanitaire a transformé le lieu en un squat. La femme, censée gérer les comptes, ignore si des loyers continuent de rentrer dans le compte de la société, et dit que leur homme de main censé récupérer les autres loyers en cash a disparu. Pourtant, les relevés bancaires montrent bien que les paiements ont lieu, et dans une déposition de police, sa fille raconte qu’elle va elle-même avec sa mère chercher l’argent en cash. Un loyer qui s’élevait à hauteur de 350 à 400 euros par mois par chambre.
Une inspection qui fait mal
Fin avril 2022 donc, le bâtiment est ravagé à coups de masse, le plongeant un peu plus dans une insalubrité grave déjà constatée dans un rapport de la Dirl (Direction de l’Inspection Régionale du Logement). Cette dernière menace le propriétaire de lourdes sanctions. Ce serait ce qui l’aurait mis en colère, estime l’avocate des parties civiles, Selma Benkhelifa. Lui, assure pourtant que c’est impossible, il a fait un AVC dans le passé et ne serait pas capable d’un tel exercice physique, il nie donc. Les parties civiles (qui n’ont pas été amenées à s’exprimer pendant le procès car trop nombreuses selon le juge) l’ont pourtant reconnu.
Le ministère Public a requis deux ans de prison pour l’homme, un an pour son ex-femme et sa fille qui répondent bien aux critères pénaux du marchand de sommeil : à savoir tirer un profit anormal en louant un bien contraire à la dignité humaine, tout en profitant de la vulnérabilité des locataires. Il demande également que chacun d’entre eux, ainsi que l’entreprise, verse 2 000 euros à chaque victime identifiée, ainsi que la confiscation d’une partie de la recette du bâtiment, vendu depuis. Verdict le 18 juin.