"Yari Verschaeren est le plus bel exemple de réussite des débuts du projet Future"
La Belgique fait office de précurseur en termes de prise en compte de la maturité dans ses équipes de jeunes.
- Publié le 22-07-2019 à 08h05
- Mis à jour le 22-07-2019 à 12h31
La Belgique fait office de précurseur en termes de prise en compte de la maturité dans ses équipes de jeunes. "Si l’on se basait sur les critères actuels, j’aurais été rejeté. À 15 ans, je n’étais pas capable de frapper une balle du gauche à 15 mètres et peut-être à 20 mètres du droit." Ces mots de Johan Cruijff ont été utilisés par le staff de l’Union belge pour illustrer les soucis dans la détection de talent.
Leur exemple favori est celui de Dries Mertens. Le Diable rouge a eu la chance de finalement percer sans avoir été encadré par la fédération. "Tout le monde savait qu’il était phénoménal mais, à un moment, on ne pouvait plus l’aligner, car les coachs doivent gagner et Dries ne pouvait pas suivre tant sa croissance a été tardive", dit Bob Browaeys, formateur à l’UB. Malgré ses 199 cm et sa carrière hors norme, Thibaut Courtois a également connu une croissance tardive. À 15 ans, Koen Casteels le dépassait d’une tête et était à sa place dans les buts.
Même cas de figure pour Yannick Carrasco, qui n’avait pas reçu de contrat à Genk car il ne s’était pas assez rapidement développé. "Heureusement pour lui, il faisait partie des équipes nationales Future et il a été repéré par Monaco lors d’un de nos matchs face au Luxembourg", se souvient Browaeys. Le coach qui a vu défiler les plus grands talents belges est à la base de ce projet Future. "Nous l’avons lancé il y a dix ans en partant d’un constat : certains jeunes joueurs sont assez talentueux pour percer, mais pas assez loin dans leur développement physique pour prester."
La différence entre certains est criante. Dans une équipe de U15, on peut avoir des joueurs de 1,50 m et de 1,80 m. "L’écart entre un jeune né en début d’année qui s’est développé rapidement et un autre né en fin d’année et qui a une maturité tardive est en fait de trois ans", expose Philippe Rosier, Performance Manager à l’Union belge. "Et trois ans à cette période de la vie, cela peut signifier 20 kilos et 20 centimètres de différence."
Les chiffres attestent d’ailleurs d’une domination des joueurs nés en début d’année dans les équipes nationales d’âge : 69 % des équipes sont composées de joueurs nés durant les six premiers mois de l’année. Ils ne sont que 13 % à être nés en octobre-novembre-décembre.
Ils ont donc considéré qu’il n’était pas possible pour ces jeunes de se développer de manière idéale dans ce contexte. Une partie du budget pour les sélections classiques a été allouée aux équipes Future afin d’offrir la même chance de réussir à tout le monde.
La sélection des Diablotins à l’Euro en Italie prouve la réussite de ce projet. Plus d’un quart de l’équipe (6 sur 23) a dû un jour passer par cette équipe nationale B pour faire ses armes.
Yari Verschaeren est certainement le plus bel exemple vu sa fin de saison avec Anderlecht et sa sélection avec les U21 alors qu’il était encore en U17 Future l’année dernière. Samuel Bastien, Bryan Heynen, Casper De Norre, Jur Schryvers et Alexis Saelemaekers sont les cinq autres.
Pionnière en la matière, la Belgique s’est longtemps contentée de rencontres face au Luxembourg ("Ils avaient le physique, nous avions la qualité", explique Browaeys) avant de voir la Suède, le Danemark et la République tchèque les imiter. "Nous pouvons désormais organiser des compétitions avec eux. Les Pays-Bas et la Suisse développent également un projet similaire."
Des pays avec un potentiel plus ou moins similaire au nôtre qui ont compris tout l’intérêt de ne fermer la porte à aucun joueur talentueux. "Nous ne pouvons pas nous permettre de louper un joueur à fort potentiel. Les grands pays le peuvent, mais pas la Belgique", dit Browaeys. "Et, honnêtement, quand je vois nos équipes Future jouer, c’est le Barça."
Un projet spécial pour les plus grands talents
Avec le Comité olympique, la fédé belge aide depuis un an ses meilleurs joueurs à maturité tardive.
La Belgique veut continuer d’innover et le fait bien. Depuis septembre, un peu moins de 20 jeunes footballeurs à maturité tardive sont sous contrat Be Gold. Ce projet soutenu par le Comité olympique (COIB), la fédération de football, la Loterie nationale et les trois communautés a déjà aidé pas mal d’athlètes dans leur quête du rêve olympique. Il s’étend désormais au football.
Sous l’égide du coordinateur du projet, David Penneman, des joueurs divisés en deux groupes (U16/17 et U18/19) reçoivent un suivi plus poussé. "Nous les considérons comme les plus gros potentiels des équipes Future", dit Penneman. "Ils travaillent encore avec leur équipe nationale et leur club, mais nous les voyons deux fois l’an pour des rassemblements spéciaux. Ils sont, par exemple, allés en stage à Mulhouse."
Le travail de Penneman est de ne louper aucun des plus gros talents chez les jeunes et de convaincre toutes les parties de collaborer à leur développement. "Je rencontre les clubs, les parents et même les écoles pour leur faire prendre conscience du potentiel du jeune. Ils doivent comprendre que son développement physique tardif a un impact sur son football. Parfois, grâce à cette discussion, les clubs changent radicalement d’avis au sujet d’un gamin ou parfois ce sont les clubs qui envoient un signal fort."
En plus de cet encadrement sportif de haut niveau, le projet Be Gold offre un suivi scientifique qui permet de travailler avec une grande précision avec les joueurs. "Nous n’effectuons plus simplement un scan du poignet, mais une batterie de tests visant à déterminer le plus objectivement leur potentiel physique", explique Philippe Rosier, Performance Manager de l’Union belge.
Selon lui , comprendre le chemin parcouru et celui qui s’offre au joueur est la base du travail. "C’est pour cela que nous avons développé des collaborations avec l’Université de Gand pour analyser aussi bien la maturité, le potentiel physique, mais aussi les capacités mentales des jeunes du programme. Nous pouvons ainsi aller chercher le potentiel total du jeune."
Le bilan après un an est plus que convaincant. "Plusieurs joueurs ont explosé, comme Hugo Siquet du Standard, qui a signé un contrat pro et joué l’Euro U17, Maarten Tresignie, qui est passé de jeune inconnu à joueur du noyau pro à Tubize, ou encore Dylan Mbayo, qui a fait ses débuts avec les A de Lokeren ", liste Penneman. "Mais Yari Verschaeren est le plus bel exemple de réussite globale des débuts du projet Future."