Comment Rezaei a retrouvé le sourire à Charleroi
Abattu par sa non-sélection pour le Mondial puis blessé au genou, l’attaquant iranien a vécu un été compliqué. En marquant deux buts face à Eupen, il a prouvé que cette période difficile était derrière lui. Et c’est tout Charleroi qui respire…
- Publié le 07-08-2018 à 11h01
Abattu par sa non-sélection pour le Mondial puis blessé au genou, l’attaquant iranien a vécu un été compliqué. En marquant deux buts face à Eupen, il a prouvé que cette période difficile était derrière lui. Et c’est tout Charleroi qui respire… Son sourire en dit long. Samedi, sur la pelouse d’Eupen, Kaveh Rezaei ne pouvait pas cacher sa joie après son doublé. Non seulement parce qu’il s’agissait de ses deux premiers buts de la saison mais aussi et surtout car ces réalisations arrivent à point nommé après trois mois très frustrants.
Récit…
1. UNE NON-SÉLECTION POUR LE MONDIAL QUI LUI A FAIT TRÈS MAL
20 mai 2018. Charleroi s’apprête à affronter le Standard lors du dernier match des PO1. Quelques heures avant la rencontre, la nouvelle tombe et fait l’effet d’une petite bombe : Kaveh Rezaei n’est pas sélectionné pour le Mondial. Il ne fait pas partie de la pré-liste de Carlos Queiroz, le sélectionneur de l’Iran. Dans le vestiaire carolo, avant la rencontre, c’est l’incompréhension. Les Zèbres ne conçoivent pas un Mondial sans leur équipier, révélation de la saison.
Quelques heures plus tard, sur le terrain, Kaveh Rezaei ne laisse rien transparaître et court énormément pour faire un gros pressing sur la défense liégeoise. Mais il manque de lucidité en zone de conclusion et ne marque pas. Ce qui n’empêche pas le public de scander son nom pour le soutenir, après la rencontre. L’Iranien applaudit la T4 en retour puis rentre aux vestiaires, tête baissée, avant de quitter la zone mixte sans un mot.
En conférence de presse, Felice Mazzù se montre, lui, plus prolixe. "La non-sélection de Kaveh pour le Mondial est incompréhensible" , indique le coach carolo. "Pour nous, c’était une certitude qu’il soit repris. On est catastrophé, que ce soit lui ou le club, on ne comprend pas très bien qu’un garçon qui a marqué seize buts dans son championnat passe derrière des joueurs qui en ont marqué cinq ou six. C’est injuste pour lui. Mais malgré cette bombe, il s’est débattu durant 90 minutes et a enchaîné les courses, ce qui en dit long sur son attitude et son mental."
Dans les travées du Mambourg, Mehdi Bayat n’en revient pas non plus. "Cela me fait vraiment mal au cœur", indique l’administrateur-délégué carolo. "Lorsqu’il a appris la décision, le ciel lui est carrément tombé sur la tête."
Pas d’Europe avec le Sporting et pas de Mondial : le coup est effectivement très dur à encaisser pour le joueur, qui retourne s’isoler, durant trois semaines, à Gilan-e Gharb, son village natal à l’Est de l’Iran, où il se ressource en famille. Loin de la Russie.
2. UNE PRÉPARATION CHAHUTÉE
De retour à Charleroi le 23 juin pour la reprise des entraînements, Kaveh Rezaei est présent physiquement… mais il a la tête ailleurs. L’Iran est toujours en lice pour le Mondial et malgré plusieurs prestations collectives remarquées, la Team Melli n’inscrit qu’un petit but. "Je ne peux m’empêcher de penser que Rezaei aurait apporté un plus à cette équipe", analyse Felice Mazzù, consultant dans La DH lors du Mondial russe.
Si Rezaei n’est pas concentré sur son football, c’est aussi parce que son mariage approche à grands pas. Un mariage qui avait été prévu le 7 juillet. En plein milieu de la préparation pour la nouvelle saison ? Non, lors des supposés congés post-Mondial du joueur. Des congés qu’il n’a finalement pas reçus, faute de sélection…
Compréhensif et touché par la situation de son joueur, le club carolo autorise Rezaei à retourner en Iran, du 5 au 8 juillet, pour dire oui à sa chère et tendre, Farnoosh Sheikhi (joueuse de volley professionnelle).
L’attaquant rejoint ses coéquipiers quelques jours plus tard, en stage à Mierlo, et est chaleureusement félicité par tout le groupe zébré. Dans la foulée, il prend part au match amical contre Valenciennes (victoire 1-0) mais il est gêné par une légère blessure au genou, qui l’empêche de s’entraîner durant une semaine.
Le 21 juillet, face à Nice, l’Iranien est de retour aux affaires et monte au jeu, à la 60e minute, portant son total de temps de jeu durant la préparation à… 75 petites minutes. Trop peu pour un titulaire indiscutable.
3. UN RETOUR GAGNANT À EUPEN
"On peut dire que Kaveh a connu une préparation bizarroïde", résume Felice Mazzù lors de la conférence de presse qui précède l’ouverture du championnat face aux Anversois.
Un match où Chris Bedia, meilleur buteur zébré lors de la préparation, est logiquement titularisé. L’Iranien, lui, monte au jeu à l’heure de jeu en même temps que Perbet et se crée une occasion, qu’il ne concrétise pas.
Puis le match à Eupen est arrivé. Un match lors duquel l’Iranien retrouve son rôle de titulaire, aux côtés de Benavente, et son efficacité. Il inscrit un doublé, sur des services de Gholizadeh et Grange. Deux buts sur trois occasions. Des stats de tueur. Qui sonnent comme le point final de trois mois frustrants. Et qui sont annonciateurs d’une excellente nouvelle pour le Sporting : Rezaei est de retour.
"Je suis un soldat"
L’attaquant iranien n’a pas fait une croix sur ses ambitions de sélection iranienne
Le voir s’arrêter en zone mixte n’est pas fréquent. Ne parlant pas français, Kaveh Rezaei parle rarement aux journalistes après une rencontre. Mais après son doublé, samedi, il a accepté de livrer quelques mots, en anglais. Et avec beaucoup d’humilité.
"La défaite face à l’Antwerp en ouverture de championnat nous avait fait mal et il était important de réagir directement", analysait le double buteur du soir. "Peu importe qui marque, l’important, c’est l’équipe. Elle avait besoin de cette victoire. On doit continuer de la sorte pour grandir, de match en match…"
On le comprend rapidement : Rezaei est dans un état d’esprit revanchard. "La manière dont la saison dernière s’est terminée a été une grande déception. Nous n’avons pas été assez bons. Tout le monde a encore ces moments difficiles en tête et on veut grandir à chaque match."
Grâce , en partie, au duo 100 % iranien qu’il forme avec Gholizadeh et qui est à la base du 1-2. "Ali est un grand talent et j’espère qu’il pourra nous aider cette saison" , soulignait Rezaei.
Qui semble avoir digéré sa non-sélection pour le Mondial. "Je suis heureux que l’Iran ait bien presté en Russie. J’espère que je pourrai faire partie de l’aventure lors de l’ Asian Cup (en janvier 2019). Quoi qu’il arrive, je me tiens prêt. Je suis comme un soldat et je me tiens prêt à répondre présent si je suis appelé. Tout ce que je souhaite, c’est aider mon pays."
À qui il a manqué durant le Mondial. Mais ça, Rezaei ne le dira pas.