Rien n’est au point entre Tadej Pogacar et ses équipiers : “Ce n’est pas de la Playstation”
Le Team UAE-Emirates de Tadej Pogacar compte déjà 13 victoires cette saison mais le rouleau compresseur qui doit propulser Tadej Pogacar est encore loin d’être au point. Milan-Sanremo et la première étape du Tour de Catalogne en sont la preuve.
- Publié le 19-03-2024 à 11h31
”J’ai foiré, j’aurais dû faire le bond sur Nick Schultz. Je pensais que quelqu’un boucherait le trou sur lui et j’ai attendu trop longtemps.” Voilà la réaction de Tadej Pogacar ce lundi soir après l’étape d’ouverture du Tour de Catalogne, où le Slovène a laissé échapper la victoire alors que son équipe avait contrôlé la course toute la journée.
Une réaction plutôt classe du champion, qui aurait aussi pu pointer du doigt le fait qu’il s’est retrouvé isolé dans un peloton d’une soixantaine de coureurs dans le final. Marc Soler et Joao Almeida, ses derniers relais, s’étaient laissés glisser en queue de groupe depuis quelques hectomètres quand Nick Schultz a placé son attaque “en facteur”, à l’approche de la flamme rouge. Complètement esseulé, Pogacar s’est retrouvé en difficulté au moment le plus important de la course alors que Sivakov, Grosschartner, Novak et Vine avaient disparu depuis longtemps.
À Milan-Sanremo, la tactique de la formation émiratie avait déjà surpris. À trop vouloir durcir la Classicissima dès les premiers Capi, les UAE-Emirates s’étaient brûlé les ailes avant même le Poggio. Covi avait explosé dans les premières pentes de la Cipressa et le jeune Del Toro avait rapidement plafonné. “Nous comptions sur Hirschi et Ulissi à la Cipressa mais ils n’étaient plus là”, expliquait Mauro Giannetti à l’arrivée du premier monument de la saison. Résultat ? Pogacar a même demandé à l’oreillette s’il ne devait pas attaquer dès cette Cipressa, quitte à bouleverser les plans de l’équipe. “Cela aurait été du suicide”, explique son directeur sportif qui a donc réussi à le raisonner.
”Il faut monter la Cipressa plus vite pour que tout le monde arrive fatigué au pied du Poggio mais ce n’est pas de la Playstation”, tranchait pour sa part Tim Wellens concernant la tactique ratée de son équipe. “J’ai dû travailler plus tôt que prévu et il m’a manqué de l’énergie pour le Poggio.” Le Belge avait en effet pris le relais d’Isaac Del Toro lorsque celui-ci n’était plus en mesure de durcir la course.
Bien loin de l’efficacité de la Visma – Lease a Bike
Pendant ce temps, Jonas Vingegaard, lui, ne rate aucune occasion de lever les bras. À chaque fois qu’il a voulu s’imposer, il y est parvenu. Que ce soit au Tour de Galice (trois étapes et le général) ou à Tirreno-Adriatico (deux étapes et le général). Sur ces deux courses, le Belge Cian Uijtdebroeks n’a d’ailleurs jamais dû se sacrifier pour son leader, s’attelant à obtenir lui-même un bon résultat. Comme si la Visma – Lease a Bike avait un homme “en trop”, là où il en manque souvent un chez sa grande rivale.
Il faut dire que le rouleau compresseur des Néerlandais est bien plus au point. Lorsqu'ils prennent les commandes, le rythme ne fait que s’accélérer progressivement, de kilomètres en kilomètres. Sans se donner la peine de faire des “à-coups” comme ceux qui ont été fatals à Soler en Catalogne ou à Del Toro à Sanremo. Dans un peloton de soixante hommes, Vingegaard a encore quatre à cinq équipiers autour de lui, là où Pogacar n’en compte plus qu’un ou deux. Pourtant, quand on voit la qualité des équipes alignées autour du Slovène, il n’y a vraiment pas de quoi rougir.
Il faut ajouter à cela les quelques énormes ratés tactiques des Emiratis depuis le début de saison : un Milan-Turin offert à Bettiol, alors que Christen, Hirschi et Ulissi prennent les 2e, 3e et 4e places après avoir oublié de la jouer collectif dans le final ; la drôle d’attitude de Nils Politt qui emmène Jan Tratnik vers la victoire sans demander le moindre relais dans le final du Nieuwsblad ; le raté de Juan Ayuso dans le final du Trofeo Laigueglia où il n’était pas moins fort que le vainqueur Lenny Martinez…
Il y a aussi eu quelques défaillances, comme celles de Brandon McNulty et Jay Vine dans la dernière étape du Tour des Émirats arabes unis, à domicile. Comme pour rappeler que cette équipe n'est vraiment au point que lorsque Tadej Pogacar est une jambe au-dessus de tout le monde et peut se permettre de placer son attaque victorieuse à plus de 80 kilomètres de l'arrivée, comme sur les Strade Bianche.
Alors certes, “ce n’est pas de la Playstation” et tous ces coureurs sont humains. Mais la réalité du duel au sommet du World Tour (et du prochain Tour de France) entre le Team UAE-Emirates et la Visma – Lease a Bike est qu’une équipe s’approche bien plus souvent que l’autre du “tableau noir” sur le plan tactique. Heureusement, il reste quelques mois à Pogacar et ses équipiers pour corriger le tir…