Van Aert-Nuyens: le divorce finira au tribunal
"Un fait grave survenu le dernier week-end", serait la cause de la rupture de contrat décidée par le triple champion du monde de cyclo-cross.
- Publié le 18-09-2018 à 14h44
- Mis à jour le 19-09-2018 à 11h22
"Un fait grave survenu le dernier week-end", serait la cause de la rupture de contrat décidée par le triple champion du monde de cyclo-cross.
Wout van Aert a rompu lundi soir unilatéralement le contrat qui le liait avec Sniper Cycling, la société qui gère l'équipe Vérandas Willems - Crelan, dont Nick Nuyens est le manager. "Pour un fait grave survenu le dernier week-end", assurait ce mardi midi son avocat sur Sporza et VTM.
Le triple champion du monde de cyclo-cross avait encore un contrat d'un peu plus de quinze mois avec Sniper Cycling. Il y courrait depuis un peu moins de deux ans (voir photo ci-dessus, où il entouré de Niels Albert, des patrons de Crélan et de la société Charles ainsi que de Nick Nuyens). Ce mardi, Wout Van Aert s'est envolé pour les Etats-Unis où il disputera ces prochains jours les deux premières manches de la Coupe du Monde de cyclo-cross dont la saison a débuté dimanche à Grammont, au lendemain de son 24e anniversaire.
Justement, le porteur du maillot arc-en-ciel y a été victime d'un incident, chute et bris de dérailleur, alors qu'il se promenait seul en tête de la course, qui lui a coûté la victoire. Est-ce ce problème, courant en cyclo-cross, lié à un autre fait, qui est avancé pour justifier le divorce ?
Pourquoi cette rupture de contrat ?
Jusqu'à la déclaration de son avocat, qu'on verra plus loin, la cause de la rupture semblait être la relation entre le coureur et Nick Nuyens devenue impossible au fil du temps. Il n'y avait plus aucune communication entre les deux hommes. Van Aert n'a pas apprécié découvrir dans la presse l'annonce de la fusion (finalement mort-née) avec Aqua Blue puis, cinq minutes avant l'annonce officielle par un simple coup de fil, celle avec Roompot.
De plus, l'entourage du Campinois (Niels Albert, Jan Verstraeten, son soigneur personnel...) est soit parti, soit a été écarté ces derniers mois ou le fera bientôt (comme son ami Tim Merlier qui part chez Pauwels Sauzen, le 1er janvier).
Malgré une proposition de contrat revue à la hausse pour 2019, malgré les appels du pied du manager de Rompoot, Michael Zijlaard, qui était prêt à écouter et essayer de satisfaire les demandes de Van Aert, celui-ci préfère rompre directement son contrat pour retrouver sa liberté.
Est-ce légal et qu'est ce que cela va coûter à Van Aert ?
Dans tous les cas, c'est légal. Les relations de travail entre un sportif rémunéré et son employeur sont réglées par une loi spécifique, la loi sur les sportifs rémunérés. Cette loi est parfois différente de la loi générale sur les contrats de travail.
Ainsi, Wout Van Aert va être tenu de payer à Sniper Cycling une indemnité. Celle-ci est égale au montant de la rémunération restant due jusqu’au terme du contrat, soit quinze mois et demi de salaire. Il est évidemment difficile de donner un chiffre précis mais cette indemnité s'élèvera sans doute entre 5 et 600.000 euros.
Mais comme tout contrat de travail, celui-ci peut aussi être cassé pour une faute ou un fait grave. Dans ce cas, pas d'indemnité à payer et l'on peut même en exiger une en retour. C'est ce qui est invoqué par Wout Van Aert selon son avocat, Walter Van Steenbrugge.
Celui-ci s'est expliqué sur Sporza et VTM, ce mardi. "Cette rupture intervient à la suite d'incident grave qui s'est produit le week-end dernier, ce qui rend toute coopération impossible à l'avenir", a dit le conseil de Wout Van Aert. "Cet incident, sur lequel on ne va pas s'épancher dans la presse, nous l'avons clairement décrit dans la lettre envoyé à Sniper Cycling. C'est grave. Si cela se produisait dans une relation «employeur-employé» normale, les syndicats seraient choqués. Un employé a droit à un engagement complet de son employeur et ce n'est pas le cas en l'espèce. C'est aussi le point d'orgue de tout ce qui s'est produit auparavant. Maintenant, il faut voir si la direction de Sniper Cycling accepte nos arguments, sinon, ce sera au Tribunal du Travail de rendre une décision."
Quelles conséquences sportives et financières?
D'un point de vue sportif, Van Aert n'a pas besoin d'une équipe en cyclo-cross. Sa structure privée lui convient suffisamment, avec son épouse, Sarah, ses parents, ses beaux-parents, ainsi que ses amis le mécanicien Kristof Cop et le soigneur Wesley Theunis. Il est aussi entraîné par Marc Lambrechts et dispose d'un psychologue en la personne de Rudy Heylen, qui a travaillé avec le FC Bruges et le fait désormais avec le Standard.
Son avocat a expliqué qu'il aller courir en individuel les prochains cross.
D'un point de vue financier, Wout Van Aert est libre de s'engager dès maintenant avec un autre employeur ou d'autres sponsors. Il dispose d'ailleurs déjà depuis plusieurs mois en Red Bull d'un partenaire personnel. Ses rentrées sont assurées par des contrats de sponsors matériel, par ses primes d'engagements dans les cyclo-cross qu'il va disputer cet hiver et les prix qu'il y remportera.
Il a aussi lancé sa ligne de vêtements sportifs sur internet, "La collection WVA", qui présentera dès le 1er octobre, ses nouveaux produits.
Surtout, l'Anversois s'est engagé avec la formation néerlandaise Jumbo à partir du 1er janvier 2020. Il va sans doute la rejoindre plus tôt que prévu.
"Nous respectons le contrat qu'il a, mais si Van Aert venait à se libérer, nous avons l'argent pour le prendre directement dans l'équipe en 2019", confiait durant le Tour de France Richard Plugge, le manager du Team Lotto Nl-Jumbo. De manière prémonitoire ?
Quel avenir pour la fusion avec Roompot et pour l'équipe de Nuyens?
Depuis le 1er janvier 2016, la banque Crélan est le sponsor de Wout Van Aert. L'organisme financier, qui a autrefois suivi Sven Nys, est surtout intéressé par la publicité que l'Anversois lui procure dans le cyclo-cross. Sa présence dans l'équipe de route, dont Vérandas Willems était le commanditaire principal, n'est que secondaire et sans le porteur du maillot arc-en-ciel, elle va sans doute vouloir et pouvoir se désolidariser du contrat qui la lie avec Sniper Cycling, elle aussi.
La même chose prévaut vraisemblablement pour le co-sponsor de l'équipe durant l'hiver, la firme Charles (viandes en gros). Ces deux sponsors pourront ensuite retrouver éventuellement Van Aert. Avec ou avant les grands magasins Jumbo ?
Sans Van Aert, peut-être sans Crelan et/ou sans Charles, Nick Nuyens n'a quasi plus rien à mettre dans la corbeille de mariage avec Roompot même si l'ancien vainqueur du Tour des Flandres affirme toujours dans le communiqué qui a annoncé la rupture de contrat de Van Aert que : "… dans tous les cas, nous serons actifs en 2019 en tant qu'équipe procontinentale".
Nuyens dispose évidemment de quelques partenaires et co-sponsors, mais il n'a pu, avec Van Aert, trouver de candidats au remplacement de Vérandas Willems, on le voit mal en trouver maintenant.
Six coureurs sont encore sous contrat avec Sniper Cycling pour 2019, Sean De Bie, Mathias De Witte, Huub Duijn, Senne Leysen, Arjen Livyns et Stijn Steels.
Dans tous les cas, cette affaire est loin d'être finie et elle aura des suites juridiques qui pourraient se prolonger.