Bruno Venanzi, le patron qui apporte son énergie dans le foot
Le vice-président du Standard de Liège revient sur la polémique du tifo montrant Steven Defour décapité. Bruno Venanzi évoque aussi la fin du mercato et son rôle dans le club. Le co-fondateur de fournisseur d’énergie Lampiris analyse ensuite les disfonctionnements du marché énergétique belge.
- Publié le 31-01-2015 à 12h00
- Mis à jour le 31-01-2015 à 11h59
Le vice-président du Standard de Liège revient sur la polémique du tifo montrant Steven Defour décapité. Bruno Venanzi évoque aussi la fin du mercato et son rôle dans le club.
Le co-fondateur de fournisseur d’énergie Lampiris analyse ensuite les disfonctionnements du marché énergétique belge. Bruno Venanzi est l’Invité du samedi de LaLibre.be
Commençons par ce qui a fait polémique en début de semaine, le fameux tifo (grande banderole de supporters) avec Steven Defour décapité. Pourquoi n’êtes-vous pas intervenu dès qu’il a été dévoilé dans le stade ?
La banderole est restée visible une minute, et cela, juste avant le coup d’envoi. Le temps d’intervenir, elle était de toute façon retirée. On n’aurait pas pu faire plus vite, le temps de la voir et elle n’était plus là. Une minute, mais c’était déjà une minute de trop. Dans le contexte actuel, ce tifo n’avait évidemment pas sa place dans une tribune du Standard.
Suite à cet incident, la liberté d’expression des supporters rouches a vécu ?
On a toujours prôné une certaine forme de liberté d’expression, en laissant par exemple des tifo critiquer la direction du club. On avait des relations de confiance avec tous les groupes de supporters. Mais aujourd’hui on constate que cette confiance a été brisée, certainement par le fait qu’ils avaient envoyé le visuel d’une autre banderole au Standard et à d’autres groupes de supporters. On ne peut pas tolérer cela. Maintenant, nous devons prendre des mesures coercitives.
Combien de personnes seront interdites de stade et pour combien de temps ?
Les premières interdictions de stade seront envoyées cette semaine. L’enquête des services de l’ordre est en cours. Il y a déjà eu des identifications, parmi lesquelles figurent évidemment ceux qui nous ont envoyé le faux visuel. Ce samedi, nous avons aussi une réunion avec le bourgmestre de Liège. En attendant, les supporters ultras sont interdits de déplacements avec le club jusqu’à nouvel ordre.
En tant qu’entrepreneur et patron de Lampiris, quel apport pouvez-vous amener au Standard ?
Tout d’abord mon cœur de supporter du Standard. Je suis profondément supporter depuis de nombreuses années et je pense pouvoir apporter cette âme de supporter au sein de la direction. J’espère pouvoir mieux coordonner l’amont, c'est-à-dire les relations entre les supporters, les journalistes et le club.
Vous avez l’intention de vous impliquer dans les choix sportifs ?
Actuellement oui, on travaille sur les aspects sportifs avec la cellule de scouting, le conseiller sportif Axel Lawarée (photo plus bas), Roland Duchâtelet et moi-même. Il est clair que nous sommes tous impliqués dans les négociations en cours. J’espère que mon expérience en négociation pour les prix de l’énergie sera aussi utile au Standard de Liège qu’elle l’a été à Lampiris.
Votre duo avec Roland Duchâtelet ne risque-t-il pas de donner l’image d’un club géré par des financiers ?
Non, ceux qui me connaissent savent que je ne suis aucunement un financier. Dans mon duo avec Bruno Vanderschueren chez Lampiris, c’est toujours lui qui a pris cette compétence sous son aile. Je n’apporte pas du tout une culture de financier au Standard.
L’image d’un patron (Roland Duchâtelet) qui achète un club pour le revendre avec une plus-value, est-ce pour vous une image tronquée par les supporters ou les médias ?
Moi qui connais bien Roland Duchâtelet et pour le fréquenter énormément ces dernières semaines, je peux vous assurer que sa première ambition, c’est d’être champion avec le Standard.
On est en fin de mercato. Comment un club tente-t-il d’attirer les bons joueurs ? Cela se fait-il uniquement à l’aide d’arguments financiers ?
Il est certain que le financier joue un rôle très important dans ce type de négociations. Mais, indépendamment des faits intervenus dimanche face à Anderlecht, il est certain que le Standard est un club de passion, avec des supporters chauds qui encouragent leur équipe. Il est évident que pour un joueur, évoluer au Standard, ce n’est pas la même chose que de jouer dans un autre club au niveau de l’ambiance et de l’accueil des supporters. Côté infrastructures, il y a peu de clubs belges ou européens qui ont une académie comme la nôtre destinée aux jeunes et aux professionnels. Ce centre est connu en Europe et attire également les footballeurs. Enfin, le Standard offre plus de visibilité que de nombreux clubs. C’est une façon pour nos joueurs de mieux se mettre en valeur.
Comment le Standard s’organise-t-il pour partir à la recherche de jeunes talents ?
Nous avons une cellule de scouting, soit un groupe de personnes qui sillonnent les tournois en Belgique et à l’étranger, tant pour les jeunes que les moins jeunes. Ils font des rapports. Cela ne se limite pas aux matches, puisque nos recruteurs observent également la motivation et l’attitude des joueurs aux entraînements et en dehors des terrains. C’est un élément important qui vise à renforcer la dynamique que l’on veut mettre en place.
Le mercato prendra fin lundi à minuit. D’ici-là, peut-on s’attendre à de nouvelles surprises au Standard ?
Effectivement, on travaille actuellement encore à des transferts. On espère qu’ils pourront se concrétiser d’ici lundi soir.
Bruno Vanderschueren et Bruno Venanzi, les deux fondateurs et CEO de Lampiris
Passons à votre deuxième casquette, celle de co-CEO du fournisseur d’énergie Lampiris. La société a décroché un achat groupé de 174.000 clients en France. Comment faites-vous pour y proposer des réductions d’environ 16% sur le gaz et l’électricité ?
Le marché français est un marché encore très peu libéralisé, avec peu de changements de fournisseurs et une position forte d’EDF et de GDF Suez, deux sociétés où l’Etat français est un actionnaire majoritaire. Les prix restent très élevés, car le marché n’est toujours pas réellement ouvert à la concurrence, comme c’était aussi le cas en Belgique il y a quelques années.
Justement, par le passé vous étiez très critique par rapport à la libéralisation du marché de l’énergie chez nous et à la position dominante d’Electrabel. Aujourd’hui, vous trouvez que le marché belge est réellement mature et concurrentiel ?
Au niveau du consommateur final oui ! Le marché n’est peut-être pas encore totalement mûr, mais il est libéralisé. Les acteurs historiques ayant vu leurs parts de marché se réduire fortement, ils ont réagi il y a deux ans en proposant de fortes baisses de prix pour enrayer la perte de clients. Comme quoi, ils étaient capables de le faire ! Je pense qu’on observera cela en France dans quelques années. Aujourd’hui, la concurrence sur le marché belge se fait de plus en plus sur les services que l’on peut offrir au client final.
Après la Belgique et la France, vous attaquerez-vous à d’autres marchés européens ?
Non, ce n’est pas du tout à l’ordre du jour. Nous nous concentrons uniquement sur la Belgique, la France et les nouveaux services que nous pouvons proposer.
Risque de délestage, manque d’investisseurs privés, centrales vieillissantes,… Pourquoi le marché énergétique belge ne fonctionne-t-il pas ?
Je pense qu’il n’y a jamais eu de politique énergétique à long terme en Belgique. On a dit qu’on allait fermer des centrales, sans déterminer la marche à suivre pour la suite. Le précédent ministre de l’Energie, Melchior Wathelet, s’est réveillé lorsque le problème de délestage est survenu. Depuis et au-delà des déclarations d’intentions, on attend de voir ce que ses successeurs vont concrètement décider à moyen et long termes. Décider de poursuivre Doel 1 et 2 sans plan pour la suite, c’est une erreur. Les investisseurs privés ont besoin d’un cadre rassurant et clair pour l’investissement et non pas des changements fréquents, comme on a par exemple pu le regretter avec le photovoltaïque en Région wallonne. Nous demandons aux politiques qu’ils analysent les conséquences de leurs décisions à long terme. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’on aura un retour des investissements privés dans le secteur.
Vu le nombre de polémiques en Wallonie et l’opposition de nombreuses localités, l’éolien a-t-il un réel potentiel en Belgique ?
Je suis convaincu qu’il y a encore un potentiel pour l’éolien en Belgique. Maintenant, il faudra que cela se fasse dans le respect des différentes normes et des populations directement concernées par de telles implantations. Je crois qu’il y a encore quelques sites inexploités en Belgique, et donc du potentiel.
L’idée de la ministre Marie-Christine Marghem de créer une réserve stratégique de 2.650 MW pour limiter les risques de pénuries l’hiver prochain vous semble-t-elle réaliste ?
Il faut étudier toutes les possibilités, y compris celle de la réserve stratégique ou de l’interconnexion avec les pays étrangers. Chez Lampiris, on a étudié la faisabilité de demander par sms à des clients de réduire leur consommation, c’est aussi une piste à suivre… Même si une telle mesure peut déranger le secteur traditionnel qu’est celui de l’énergie, on a vu que quand 100.000 citoyens faisaient un effort sur leur consommation, c’est l’équivalent d’une demi-centrale nucléaire économisée en heure de pointe. Dans la réflexion, il faut tenir compte du fait que le citoyen peut apporter sa pierre à l’édifice.
Qu’un fournisseur d’énergie appelle ses clients à réduire leurs consommations, c’est paradoxal !
Pour diminuer le risque de black-out, on demande déjà à nos clients de faire attention à la consommation ou d’entreprendre des travaux d’isolation. Cela peut en effet sembler paradoxal, mais il faut vraiment voir – ici aussi – les choses à long terme. Pour un fournisseur, le fait d’aider activement ses clients à réduire leurs factures, c’est la meilleure façon de les fidéliser. Pour une entreprise, trouver le moyen de fidéliser ses clients est quelque-chose de rentable à long terme.