Ruud Vormer se confie avant le "Topper": "Anderlecht n’a pas de pression ? C’est du bluff !"
Ruud Vormer est persuadé qu’une victoire dimanche est synonyme de titre.
- Publié le 05-05-2018 à 11h33
- Mis à jour le 05-05-2018 à 11h34
Ruud Vormer est persuadé qu’une victoire dimanche est synonyme de titre. "Ruud, c’est la salle d’interview des stars."
Kirsten Willem, l’attaché de presse du Club Bruges, se marre. Ruud Vormer, lui, a du mal à suivre la conversation qui mêle français et néerlandais.
"On fait ça en néerlandais", le rassure-t-on. "Heureusement", répond-il en se marrant. "Car je n’ai rien compris."
Sous ses airs de gars sûr de lui, Ruud Vormer laisse parler son côté sympathique. Il rit, blague et prend la pose sans même toucher à une de ses mèches ultra-gominées. Le capitaine Brugeois peut sourire : son Club trône en tête du classement et a largement dominé la saison.
Les playoffs sont moins bons que prévu. Huit points sur 18, ce n’est pas brillant.
"On n’a pris que deux points sur les deux derniers matches mais je ne panique pas car on a bien joué. En y repensant, ce sont deux bons points. Avec un peu de chance ils nous serviront de réveil pour la suite des événements."
Bruges n’a-t-il pas trop de difficultés à la finition ?
"Clairement. Quand on voit nos opportunités contre Gand et Anderlecht, on aurait pu réclamer mieux."
C’est une question de fatigue ?
"Non, nous sommes frais. Personne ne peut toutefois jouer à haut niveau tout le temps. Tu sais qu’il y aura un creux à un moment. Nous l’avons eu en fin de saison régulière. C’est notre chance. Depuis, le niveau ne fait qu’augmenter."
Quelle importance revêt le match de ce week-end ?
"Le match est crucial mais nous ne ressentons pas de pression supplémentaire. Nous sommes à la maison. Ça va être la folie ici. Le public sera dingue. Nous devons gagner."
Vous tablez sur un nouveau 5-0 ?
"1-0, ça me convient bien (sourire) ."
Vous serez alors en bonne position pour gagner le titre…
"Si nous gagnons, nous sommes champions. Il nous restera trois matches pour prendre un point. Sauf si le Standard gagne tout mais je ne pense pas que ce soit possible."
Quelle est la différence entre Bruges et des équipes comme le Standard et Anderlecht ?
"Ils ont plus de qualités individuelles. Nous nous basons davantage sur notre groupe. Il y a deux ans, nous avions Izquierdo qui pouvait faire la différence seul. C’est terminé. C’est le collectif qui a fait prendre des points."
Allez-vous jouer pour un point samedi ?
"Nous allons jouer notre football, jouer offensivement. Pour gagner. Un match nul, ça ne me convient pas."
Hein Vanhaezebrouck a dit que Bruges avait la pression sur ses épaules…
"C’est une tactique. Il ne faut pas croire cela. Anderlecht sera aussi sous pression. Peut-être plus que nous. Ils veulent aussi devenir champions."
Et quand ils disent uniquement viser la deuxième place ?
"C’est du bluff. OK, ils doivent venir ici mais ils voudront gagner pour croire au titre."
Pieter Gerkens a dit qu’Anderlecht n’avait que 40 % de chances de gagner à l’aller. C’est la preuve qu’ils ont peur de vous ?
"Au Jan Breydelstadion, ils ont peur de nous, oui. Rappelons que la dernière fois qu’ils sont venus ici, ils ont perdu 5-0..."
Ce traumatisme joue-t-il en votre faveur ?
"Cela pèse dans la tête. Certains joueurs pourraient être d’autant plus motivés pour prendre leur revanche. Je vais prévenir le groupe de ne rien lâcher."
"Essayez de défendre sur moi... C'est duur!"
Ruud Vormer revient sur sa saison : "Je me suis relâché après le Soulier d’Or"
"Mes playoffs ?"
Ruud Vormer grimace. Le Soulier d’Or sait qu’il a eu un peu de mal à l’allumage. Au fil des rencontres, il retrouve toutefois les sensations qui ont fait de lui le meilleur joueur de l’année 2017. "Je sens que je suis sur la pente ascendante."
C’est aussi lié au fait que Lior Refaelov n’est plus aligné devant vous. Vous êtes plus libre et ne devez plus défendre sur la droite…
"Avec Refa , on a un gars en plus dans l’entrejeu. C’est une solution mais je dois alors courir différemment et défendre en me décalant. J’ai besoin de liberté. J’ai besoin de pouvoir aller de l’avant. C’est comme ça que je suis le plus fort. Je suis arrivé à Bruges pour jouer numéro 6 mais Michel Preud’homme m’a dit : ‘Tu seras numéro 8 et tu y vas, hein !’ Quand je peux jouer comme ça, je suis très difficile à tenir. Que ce soit pour le médian ou pour le défenseur. Essayez de défendre sur moi pour voir… (rire) "
C’est un peu comme Arjen Robben, on sait ce que vous allez faire mais pas quand ni comment…
"Ouais, c’est un peu ça avec moins de technique balle aux pieds (rires) . Personne ne sait prévoir quand j’arrive dans le rectangle. Je le fais purement à l’instinct. Il faut sentir quand il faut monter. Si je le fais à chaque fois, je ne surprends plus."
Comment expliquez-vous votre baisse de régime après votre Soulier d’Or ?
"Dès que tu gagnes ce prix, tu penses qu’on en attend plus de ta part. Automatiquement, tu te dis que tu dois en faire plus. Puis, il y avait tant d’attention médiatique. C’était trop. Puis, je me suis relâché. Je ne cache pas cette décompression. Jusqu’au trophée, t’y vas à fond et quand tu l’as pouf, tu es un peu plus tranquille. C’est mal, mais c’est naturel. Tous ceux qui ont reçu le trophée ont connu ce phénomène."
Avez-vous cru en la malédiction du Soulier d’Or ?
"J’aurais pu croire que c’était ça mais je n’y ai jamais pensé. Il a fallu que je me relance mentalement. J’ai beaucoup parlé avec ma femme, mes parents, le coach. Puis, j’ai bossé comme un fou. C’est un peu cliché mais c’est la vérité. J’ai réussi à garder confiance en moi."
C’était choquant de passer de tout à rien ?
"Je me sentais moins important pour l’équipe. J’ai vite compris que je jouais moins bien. J’étais peut-être trop décisif à un moment. Tout venait tout seul et, d’un coup, ça s’est complexifié. Mais je savais que ce moment allait arriver. Je ne pouvais pas donner un assist à chaque match durant toute l’année."
Vous en êtes à 12 buts et 18 assists en Pro League.
"C’est la meilleure saison de ma vie. C’est énorme pour moi. Mais j’ai aussi la chance que dès que je fais une bonne passe, un équipier est là pour mettre la balle dans le but. On me demande pourquoi cela arrive maintenant alors que j’ai 30 ans mais j’étais déjà important ces dernières saisons. Sauf que je n’avais pas de telles statistiques."
Le Club Bruges est-il dépendant de votre état de forme ?
"Peut-être bien, oui. Mais c’est aussi parce que j’amène un surplus mentalement. Je parle toujours avant les matches et tente de trouver les mots pour booster les joueurs. Je change souvent."
Vous arrive-t-il d’être négatif ? Même quand vous perdez, votre discours est positif…
"Je le suis toujours, même après une défaite. C’est mon image vis-à-vis de l’extérieur. Dans le groupe, je dis les choses. Je critique s’il le faut."$
"Le Standard et Anderlecht ont des techniciens. Nous, nous n’avons que Limbombe"
La saison régulière de Bruges a été complètement folle. "C’est simple, il y avait tout", sourit Ruud Vormer. "Du bon football, de l’intensité, de la solidité défensive. Nous avons aussi su prendre des points quand ça allait moins bien dans le jeu. C’est la preuve de notre force mentale. C’est une force avec notre collectif. Nous collons vraiment à la philosophie du Club."
S’il doit souligner un atout de son équipe, c’est le bloc qu’elle forme. Il prend la force de frappe offensive du Club en exemple. "Le danger vient de tous les côtés chez nous. Chaque joueur a ses moments. Nous n’avons pas un gars à 30 buts."
Il assume d’ailleurs qu’au niveau de la qualité intrinsèque, le Club n’est peut-être pas la meilleure équipe du pays. "C’est juste, mais nous avons plein de joueurs utiles pour le collectif. C’est clair qu’au Standard ou à Gand, il y a plein de gars qui savent faire une action : Edmilson, Carcela, Simon, Kalu, c’est du costaud. Nous, nous avons juste Limbombe qui est capable de faire la différence seul. Il faut donc que le danger vienne d’ailleurs. Donc je vais m’infiltrer, Diaby va se démarquer, Vanaken va se faire oublier. On est difficile à contrer."
Vu des Pays-Bas "La Pro League est meilleure que l’ Eredivisie "
Un Néerlandais qui ne jouait plus à Feyenoord qui se retrouve meilleur joueur du championnat de Belgique, cela a fait jaser outre-Moerdijk. "Aux Pays-Bas, j’ai eu beaucoup de réactions positives à mon Soulier d’Or mais certains ont dit que la compétition belge ne valait rien. Ils ont encore l’image du joueur que j’étais quand j’étais en Eredivisie . Et selon moi, la Pro League est meilleure que la D1 néerlandaise. Ici, c’est davantage un football d’hommes."
Son trophée a débouché sur une sélection en équipe nationale qu’il n’a pas pu honorer. "Je traînais un souci à la cheville depuis deux mois. On verra si j’y retourne un jour. Ce n’est pas mon but premier. Je veux être champion et réussir en club avant tout. Puis, il n’y a pas de Coupe du Monde avec les Pays-Bas."
Il sent que le vent a tourné et que la Belgique est redevenue un championnat intéressant pour nos voisins bataves. "J’ai pas mal de gens qui me demandent si c’est bien de jouer en Belgique. Je ne peux que leur conseiller de venir. Le niveau des deux compétitions est proche et je ne vois pas pourquoi de bons Néerlandais ne pourraient pas venir."