Les 12 temps forts de la carrière de Boonen (11/12) 9 mars 2015 : plus dure sera la chute
Durant sa carrière, Tom Boonen a connu plusieurs accidents graves dont certains auraient pu se révéler vraiment dramatiques.
- Publié le 07-04-2017 à 14h47
- Mis à jour le 07-04-2017 à 14h58
Durant sa carrière, Tom Boonen a connu plusieurs accidents graves dont certains auraient pu se révéler vraiment dramatiques. "On devient coureur en tombant et en se relevant. On reste coureur en continuant à se relever."
Le 9 mars 2015, Tom Boonen poste ce message en début de soirée sur son compte Twitter.
Quelques heures plus tôt, dans la finale de la 1re étape de Paris-Nice, l’Anversois roulait en queue de peloton quand il a touché la roue arrière de son équipier Nikolas Maes et est tombé. Groggy, Boonen reste quelques minutes sur le macadam en se tenant le bras gauche, tandis qu’Yvan Van Mol, le médecin de Quick Step, et Wilfried Peeters s’affairent autour de lui. Sa Course au Soleil se termine après 187 km. L’Anversois finit par être emmené à l’hôpital de Blois où l’on décèle une entorse de l’épaule, une luxation acromio-claviculaire gauche, qui va le contraindre à une période de convalescence plusieurs semaines et le prive surtout de la campagne des classiques.
Pour Boonen, c’est la catastrophe. Car cette blessure ligamentaire (on va déceler aussi à l’hôpital d’Herentals, où il sera opéré de l’épaule deux jours plus tard, une petite fracture du coude) est un nouveau coup dur dans une longue série.
Depuis son exceptionnelle saison 2012, l’Anversois a cumulé les ennuis. Au mois de décembre, une sévère infection intestinale l’a mené plusieurs jours à l’hôpital et comme si cela n’était pas assez, en janvier 2013, une chute en VTT dans les bois de Mol, l’a contraint à être hospitalisé en urgence pour une seconde infection importante, au coude cette fois.
Des blessures nombreuses
"C’est vrai qu’en quinze ans, il a souvent eu des problèmes physiques, mais c’est aussi inhérent à sa manière de courir et à la longueur de sa carrière, dit Yvan Van Mol. Il y a eu la blessure au genou, qu’il a fallu finalement opérer et qui lui a coûté toute la deuxième partie de la saison 2010. La même chose avec sa blessure à la selle qui l’a handicapé plusieurs saisons. Mais avec cette infection au coude, il a risqué vraiment sa vie. Il était aux urgences à l’hôpital depuis trois jours, on pensait le transférer à Louvain, quand la sévère cure d’antibiotiques qu’il recevait a commencé à faire effet. Il a échappé au pire, mais son hiver et son printemps étaient perdus."
D’autant qu’il va abandonner Milan-Sanremo, puis chuter à Gand-Wevelgem. Dans l’urgence, il décide de participer aux Trois Jours de la Panne mais tombe à nouveau, après 20 km à peine, au Tour des Flandres qu’il abandonne. Il sera arrêté dix jours et manquera Paris-Roubaix.
L’année suivante, sa préparation aux classiques se déroule idéalement. Il quitte Paris-Nice avec un moral de conquérant quand Lore, sa compagne, fait une fausse couche. Il lui faudra, avouera-t-il, trois bonnes semaines pour revenir au premier plan mentalement, ses classiques pavées sont passées…
Fin de contrat, fin de carrière ?
En 2015, pour la troisième fois de suite, donc, Tom Boonen va manquer la série des courses qui le motive le plus. Il a déjà 34 ans lorsqu’il tombe à Paris-Nice. Il est en fin de contrat et l’on finit par penser qu’il pourrait mettre un terme à sa carrière sur cet énième coup dur.
C’est mal le connaître, lui et son incroyable caractère.
"En deux secondes, avouait Tom Boonen, j’ai compris que c’était grave et que pour les classiques, c’était foutu. Ce n’est pas ce que j’espérais, j’étais prêt pour ces grands rendez-vous, mais je n’y peux rien changer, uniquement l’accepter. Me relever et repartir."
Ce que le Campinois va faire, en reprenant la compétition au Tour de Turquie, tremplin pour le Giro qu’il découvre après quatorze saisons chez les professionnels. Il gagne ensuite trois courses et se présente comme un des trois leaders, avec Philippe Gilbert et Greg Van Avermaet, de l’équipe belge au Mondial de Richmond que va dominer Peter Sagan.
En forme, Boonen prolonge sa saison au maximum. Il s’impose à Munster et part à Abu Dhabi où Guardini le devance le premier jour. Tom Boonen porte par procuration le maillot vert du classement par points au départ de la 2e étape à Abu Dhabi. Au 55e kilomètre, il va chuter avec Théo Bos et Songezo Jim. Le coureur d’Etixx-Quick Step reste au sol.
Après avoir perdu connaissance quelques instants, il sera transporté à l’hôpital Cheikh Khalifa d’Abu Dhabi.
"Les examens ont montré une fracture de l’os temporal gauche d’environ dix centimètres, explique Patrick Lefevere. Il présente aussi un hématome à l’oreille mais il est lucide et pose des questions comme, par exemple, savoir quand il va rentrer à la maison."
La visite chez le neurologue
Il devra patienter plusieurs jours au Moyen-Orient avant de revenir au pays pour entamer sa convalescence, puis de se lancer dans sa préparation hivernale, laquelle prendra des allures de contre-la-montre pour arriver en forme à temps, au printemps.
"Ce n’était pas évident, avec une telle fracture, explique le docteur Van Mol. Même s’il n’a pas eu beaucoup de symptômes visibles. C’était surtout un problème de concentration, il se sentait toujours faible, il avait des problèmes d’ouïe… Il n’a pas directement réalisé ce qui s’est passé. Les deux premières semaines, il était un peu perdu mais, après, il s’est mis directement au travail."
Un peu trop vite et fort, même.
"On a dû l’emmener chez le neurologue et faire un nouvel électro-encéphalogramme fin novembre pour le calmer car, comme il n’avait pas mal, il voulait revenir trop vite, sourit le médecin de Quick Step. Il avait eu des petites hémorragies. Cela aurait pu provoquer un désastre en cas de nouvelle chute. Il a compris et à partir de là, il a pris le temps de revenir. Dès le premier stage, début décembre, il pouvait pourtant effectuer déjà un travail considérable. Certes avec moins d’intensité que les autres. Au deuxième stage, en janvier à Calpe, Tom pouvait suivre le groupe aux entraînements. Il était déjà au même niveau que ses équipiers."
Une fois encore, l’ancien champion du Monde va revenir car finalement, pour lui, il n’a jamais été question d’arrêter sur un coup du sort, mais bien quand et où il l’aura décidé.
"Sans tous ces problèmes physiques, il aurait gagné plus encore, assure Yvan Van Mol. Deux ou trois fois, ça a été difficile pour lui de revenir. J’avais eu peur après sa chute à Paris-Nice. Tout le travail hivernal avait été réduit à néant en une seconde. La suite de la saison était longue, sans vraiment beaucoup d’autres buts et objectifs à se fixer. Il aurait été plus facile qu’il jette le gant, mais ce n’est pas dans son caractère. Tom aime la vie, il n’est jamais dépressif. Il voit toujours le verre à moitié plein, pas le vide. Il a 36 ans, il m’a toujours dit j’arrête à trente ans ou, si je continue, ce sera dans une petite équipe pour m’amuser. Mais des coureurs comme lui ne roulent pas pour s’amuser. C’est toujours pour gagner."
Eric de Falleur