Van Uytvanck, une famille modeste loin du star system
À 20 ans, Alison Van Uytvanck est l’embellie dans le ciel sombre depuis les arrêts de Kim et de Justine. A la découverte des Van Uytvanck.
- Publié le 30-07-2014 à 07h17
- Mis à jour le 30-07-2014 à 07h18
À 20 ans, Alison Van Uytvanck est l’embellie dans le ciel sombre depuis les arrêts de Kim et de Justine Alison Van Uytvanck a pris une excellente habitude en 2014. L’une des belles promesses du tennis belge s’invite à chaque levée du Grand Chelem. À la fin du mois d’août, elle accédera directement à son premier US Open. Elle a déjà pris part à l’Australian Open, à Roland-Garros et à Wimbledon où elle avait carrément signé sa première victoire en Major. Pas mal pour la jeune rouquine qui n’avait jamais pris part à l’un des plus importants rendez-vous de l’année.
La native de Vilvorde n’a jamais traîné en chemin depuis ses premiers pas chez les pros en 2011, elle a pris du galon avec régularité. Il y trois ans, elle remportait ses premiers matches sur le circuit WTA.
En 2012, elle a atteint les quarts de finale de l’Open de Bruxelles en s’offrant deux joueuses du Top 50 et en honorant ses premiers matches de Fed Cup.
Son ascension n’attend pas le poids des ans. En 2013, elle s’adjugea tout simplement son premier titre WTA en battant son amie Yanina Wickmayer en finale à l’Open de Taïwan. Conséquence logique de ses beaux résultats, elle s’est invitée parmi les 100 meilleures joueuses de la planète.
Cette saison, elle a franchi le cap suivant en découvrant les quatre levées du Grand Chelem, à 20 ans. À Wimbledon, elle ne s’est inclinée que 8-6 au set décisif du 2e tour face à Dominika Cibulkova.
Discrète, voire timide, elle témoigne déjà d’un grand professionnalisme, notamment, grâce à l’éducation inculquée par ses parents. Ses origines modestes expliquent autant sa détermination que son équilibre. La jeune femme veut prouver à ses parents qu’ils ne se sont pas trompés en sacrifiant une partie de leur vie pour Alison, l’un de leurs trois enfants.
Au lieu d'une maison, René Van Uytvanck investit sur sa fille
Papa d’une famille nombreuse, René Van Uytvanck a pris tous les risques et également accepté tous les sacrifices.
Aujourd’hui, avec Alison, il récolte les bons grains semés.
Quand avez-vous compris qu’elle deviendrait une véritable pro ?
"Le déclic s’est opéré il y a trois ans quand elle a commencé à remporter des 10.000 dollars. À l’époque, je l’accompagnais sur les tournois car nous ne pouvions pas nous attacher les services d’un coach."
Encore fallait-il que votre employeur accepte ces horaires chamboulés…
"Le patron de l’agence Copper a accepté de me ménager un horaire sur mesure."
Comment avez-vous assumé sur le plan financier ?
"J’ai eu de la chance d’avoir mis de côté de l’argent chaque année. Je ne suis pas un grand dépensier. Je laisse aux autres les grosses voitures. Jusqu’en 2010, sa carrière m’a coûté énormément d’argent. J’aurais pu acheter une grosse maison, mais j’ai préféré investir sur ma fille. D’autres joueuses du circuit voient de l’argent qui coule à flots à la maison. Certains riches dépensent des sommes folles pour un enfant qui ne percera jamais. La roue a tourné à la suite de ses succès en 2010."
Est-ce que vous l’accompagnez encore souvent sur le circuit ?
"Mon plus long voyage fut la Fed Cup au Japon. Sinon, je me suis rendu à Roland-Garros et à Wimbledon. Je l’accompagne quand les tournois ne se jouent pas trop loin de la Belgique."
Un solide budget…
"Non, je surfe beaucoup sur Internet afin de trouver de bons filons. J’essaie également de réserver longtemps à l’avance. Alison reçoit les meilleurs vols sans escale avec un horaire confortable. Moi, je ne dois pas être en forme une fois arrivé à destination. Sincèrement, sur place, le luxe ne m’attire pas."
Êtes-vous un papa rassuré aujourd’hui ?
"Oui, le tennis belge, en effervescence à l’époque des carrières de Kim Clijsters et de Justine Henin, s’est bien calmé. Le climat est plus favorable pour faire une carrière."
"Un coach russe a bouleversé sa vie"
À l’aube du premier tournoi en Grand Chelem d’Alison Van Uytvanck, nous avions rencontré son papa René dans un café en face de l’église de Grimbergen. L’homme pousse discrètement la porte et s’installe sans faire de vague. Même si sa fille est sur le point d’avoir disputé toutes les levées du Grand Chelem, même si sa fille a déjà remporté un tournoi WTA, même si sa fille s’est déjà hissée à la 80e place mondiale, il n’a pas changé ses habitudes. Il a sué pour que sa fille touche le Graal. Homme simple, il connaît la valeur de l’argent. Tapis dans l’ombre, il ne perd pas une miette de son ascension. Père et fille communiquent quotidiennement par SMS, skype, GSM et autres canaux de com. Cet agent immobilier, dont l’épouse travaille au service des achats de produits laitiers dans une grande surface, s’est livré sur la carrière de l’un de ses trois enfants. Amateur de volley-ball, il a dû découvrir un autre univers.
René Van Uytvanck, quel genre de papa êtes-vous ? Quel rôle jouez-vous dans la carrière de votre fille ?
"N’étant pas un grand connaisseur de tennis, je ne jouerai jamais un rôle sportif. Par le passé, je la conseillais un peu. Sans plus. Très vite, j’ai remis son destin entre les mains d’experts. Moi, je gère les paramètres extrasportifs afin qu’elle soit dans les meilleures conditions. Je veux qu’elle ne se soucie que de son jeu. Je réserve les avions et les hôtels. Je m’occupe de ses comptes. Je complète ses whereabouts. Si elle doit prendre une décision, on en parle. Toutes ses décisions passent par moi."
Votre épouse, Krista Laemers, a-t-elle un passé de sportive ?
"Non."
Comment Alison a-t-elle été placée dans cette sphère de sportive de haut niveau ?
"Elle est montée sur un court grâce à son frère Sean qui est Série B. De quatre ans son aîné, il participait à des compétitions régionales. Alison venait le voir. Un jour, elle a pris une raquette. Elle ne l’a plus jamais lâchée. En plus, elle a réalisé ses premiers pas en pleine période de gloire de Clijsters et de Henin. Elles ont été une source d’inspiration."
Où a-t-elle appris le métier ?
"Elle est entrée au club des Trois-Fontaines de Daphné van de Sande à Bruxelles. D’emblée, elle a remarqué qu’Alison avait un toucher de balle spécial. Elle a découvert là-bas le plaisir de jouer au tennis."
Puis, elle a croisé la route d’un homme qui a bouleversé sa vie : Alexandre Katsnelson…
"Jusqu’à 11 ans, elle a été sous la protection de cet entraîneur russe. Il l’a accueillie dans son Top Tennis Team de Dilbeek et de Ternat. Elle a grandi avec des B-15.4 et des Séries A. De tous ses élèves, elle est la seule qui a percé au plus haut niveau. Il avait été recruté par la VTV pour repérer les talents régionaux. Durant 4 à 5 heures par semaine, il exerçait un groupe de garçons alors qu’Alison était la seule fille. Il est à la base de tout le jeu de ma fille."
Ensuite, elle a vécu une année sombre. Pourquoi son premier passage à la VTV fut-il un tel échec ?
"Je regrette qu’elle soit restée durant un an là-bas. Non seulement elle s’est souvent blessée, mais elle n’a jamais trouvé ses repères à la VTV. À l’époque, le centre de formation n’avait qu’une vision de l’apprentissage. Qu’on soit frêle ou costaud, on apprenait le même type de jeu. Je l’ai vite sortie de là. Elle est alors revenue dans la structure d’Alexandre Katnelson durant 6 ans. Il fut exceptionnel avec elle. Alison a exploité au maximum cette collaboration."
Finalement, en août 2013, elle est revenue à la VTV. Un aveu de faiblesse ?
"Pas du tout. En six ans, la VTV a fort changé. Un nouveau staff a débarqué avec une vision plus ouverte. Avec Ann Devries, elle a trouvé une excellente coach. Les parents peuvent s’exprimer. On dispose de tous les services nécessaires. La semaine, elle était à la VTV. Le week-end, elle retournait chez Katnelson."