La Coupe Davis face à son destin: une réforme historique qui fait polémique
La Coupe Davis va-t-elle subir un lifting fracassant ?
- Publié le 15-08-2018 à 20h14
- Mis à jour le 27-08-2018 à 11h36
La Coupe Davis va-t-elle subir un lifting fracassant ? Tremblement de terre au cœur du monde de la petite balle jaune. Créée en 1900, la Coupe Davis s’apprête à subir une refonte en profondeur, qui devrait être entérinée ce jeudi midi, à Orlando en Floride, par les instances de l’ITF (Fédération internationale du tennis). Lancé en février dernier, le projet de cette nouvelle formule (d’application dès 2019) vise à regagner l’adhésion des stars qui boudaient la compétition.
Pour ce faire , la Fédé internationale a dessiné un format copieusement raccourci, qui se révélerait aussi bien plus lucratif. Si jusqu’ici la compétition se déclinait sur quatre week-ends de trois jours (premier tour, quarts, demies, et finale), la Coupe Davis se déroulera désormais sur deux semaines, avec une phase finale regroupant dix-huit équipes, qui clôturera la saison en novembre.
Au-delà du bouleversement du calendrier, deux autres modifications majeures s’ajouteront. D’abord, le tour final se jouera sur terrain neutre (en Europe pour cette première édition), c’en serait donc fini de jouer face à son public dans une ambiance de folie. De plus, on abandonne le dispositif fondé sur quatre simples et un double au meilleur des cinq sets, pour resserrer les rencontres sur deux simples et un double en deux manches gagnantes.
Bref, un sacré chambardement, qui s’inscrit dans une logique économique : l’ITF a signé un juteux contrat avec le groupe d’investissement Kosmos, dirigé par le footballeur Gérard Picqué, pour un montant astronomique de 2,5 milliards d’euros environ sur vingt-cinq ans. Ce qui garantira une enveloppe de 17 millions d’euros annuels aux joueurs, et plus encore aux fédérations.
Qu’en pensent les Belges ? Goffin pour, Darcis contre
Voici les avis dans le clan belge à quelques heures de ce vote inédit.
Lors de l’annonce de cette nouvelle mouture en février dernier, Steve Darcis, notre Mister Coupe Davis, n’avait pas mâché ses mots. "C’est une honte !", avait-il soufflé. Pour Ruben Bemelmans, "évoluer sur un terrain neutre, ce n’est pas la Coupe Davis".
Encore un opposant donc à cette réforme dans le camp belge, aux côtés également d’André Stein, le président de la Fédération belge de Tennis, qui reste attaché à l’ancienne formule et qui s’insurge qu’aucune concertation n’ait eu lieu avec les fédérations".
De son côté, le numéro 1 belge David Goffin voit, lui, d’un bon œil ce projet car cela lui permettrait d’assouplir un agenda déjà surbooké.
Les Français et l’Australie crient au scandale
Méchamment critique, Richard Gasquet n’a pas retenu son coup sur cette réforme.
Si la Fédération française a annoncé qu’elle voterait "pour" la réforme ce jeudi, les grands noms du tennis hexagonal grincent, eux, sévèrement des dents. Après les coups de gueule de Noah, Pouille ou Mahut, même le timide Richard Gasquet y est allé d’un véhément éclat de voix. "À l’ITF, ils font les cons depuis dix ans, dix ans que les joueurs demandent des changements et dix ans qu’il n’y a aucune réforme, et là d’un coup on arrive au truc radical qu’il fallait éviter. Qui va jouer trois semaines après Bercy, je ne sais où ?" En Australie, on recence également de virulents propos, d’autant que la Fédération australienne est partenaire du projet de Coupe du monde de tennis (World Team Cup) initié par l’ATP et prévu en 2020.
Face à ce projet, la Coupe Davis 2.0 endosse désormais le rôle d’un fameux concurrent tant les similarités entre les deux compétitions sont criantes." On ne peut pas appeler ça la Coupe Davis. […] C’est une transaction financière", lâche l’ancien n°1 mondial Lleyton Hewitt.
Les conditions d’un vote complexe
Lors de ce vote historique, 144 fédérations nationales devront trancher. Et pour être adoptée, la réforme requiert une majorité des deux tiers des suffrages exprimés. Qui plus est, la valeur des voix distribuées varie en fonction des pays. Pour preuve, les quatre nations accueillant les quatre tournois du Grand Chelem, à savoir l’Australie, la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis déposeront 12 voix chacune dans l’urne. En ce qui concerne l’Espagne, l’Argentine ou la Suisse, ces pays disposent de 9 voix. Alors que la Belgique pourra en donné 5. On dénombre 459 voix au total à distribuer.
Un nouveau format, mode d’emploi
Lors du mois de février prochain, le premier tour s’opérera sous une forme "classique" disputées par 24 équipes lors d’une semaine. Les 12 nations survivantes accéderont à la phase finale et s’affronteront sur terrain neutre, ainsi que les quatre équipes demi-finalistes de ce cru 2018 (à savoir l’Espagne, la France, la Croatie et les USA) et deux pays invités.
La Fédération britannique contre le projet
Les responsables de la Fédération britannique de tennis ont annoncé mercredi soir qu'ils allaient voter contre le projet de réforme de la Coupe Davis, soumis au vote de de la Fédération internationale de tennis (ITF) jeudi.
La Lawn Tennis Association (LTA) a notamment expliqué qu'elle craignait que ces changements dissuadent les joueurs de prendre part à cette nouvelle compétition et atténue l'intérêt des supporters.
"A notre regret, nous ne sommes pas en mesure d'apporter notre soutien pour le moment à ce projet de réforme et nous nous opposerons à la résolution soumise au vote de l'ITF demain", a indiqué la fédération britannique dans un communiqué diffusé sur son site internet.
Le projet de réforme de la Coupe Davis prévoit notamment de remplacer l'habituelle compétition étalée sur quatre week-ends de trois jours, par une phase finale raccourcie regroupant 18 équipes, disputée sur une semaine en novembre sur un terrain neutre. Il divise les partisans d'un tournoi raccourci, moins contraignant et plus lucratif d'une part, et les adeptes d'un format historique souvent riche en émotions mais boudé par certaines stars du tennis.
Jeudi, quelque 144 fédérations nationales sont invitées à voter pour ou contre ce projet. La majorité des deux tiers des voix est requise pour valider le projet défendu par le patron de l'ITF qui vise à profondément réformer la mythique compétition internationale créée en 1900.
La Grande Bretagne fait partie avec l'Australie, la France, les Etats-Unis et l'Allemagne des fédérations pesant le plus dans le scrutin. La fédération australienne et plusieurs joueurs français ont déjà fait part de leur opposition à ce projet. A l'inverse, d'autres comme l'Espagne ont déjà apporté leur soutien.
La LTA émet quant à elle de nombreuses réserves, s'interrogeant notamment sur "le format proposé et son impact sur le calendrier du tennis, prolongeant la saison pour les joueurs, ce qui risque de les dissuader d'y participer et pourrait donc diminuer l'attrait des fans".
Par ailleurs, "la proposition a créé une division entre les pays membres. La force de l'ITF dans la gouvernance et le développement du tennis à travers le monde sera renforcée en rassemblant le tennis derrière une proposition unifiée et le LTA estime que nous n'avons pas encore atteint ce point", ajoute le communiqué.