Il y a 15 ans, Justine Henin remportait Roland-Garros: "J’espère que tu es fière de moi, maman…"
En 2003, Henin et Clijsters ont déclenché une vague de folie aux quatre coins d’un pays qui ne jurait plus que par le tennis.
- Publié le 25-05-2018 à 09h42
- Mis à jour le 25-05-2018 à 10h25
En 2003, Henin et Clijsters ont déclenché une vague de folie aux quatre coins d’un pays qui ne jurait plus que par le tennis. Elle n’avait que 21 ans et avait fait une promesse à sa maman trop tôt disparue. Justine Henin a tenu sa parole le samedi 7 juin 2003 à 16 h 15 en remportant le tournoi de Roland-Garros. Elle venait alors de voir le coup droit de Kim Clijsters heurter la bande du filet.
Quatrième joueuse mondiale, elle a vaincu les deux meilleures têtes de série pour signer le premier chapitre d’un best-seller qui en comptera encore six autres.
À l’aube de son arrivée à Roland-Garros, Justine Henin, qui s’était mariée six mois plus tôt, n’était pas en possession de tous ses moyens. Elle portait en elle le traumatisme de sa défaite contre Aniko Kapros au premier tour de 2002.
La Rochefortoise a d’abord évacué ses démons intérieurs avant de dégoûter ses rivales une à une. Devant une Belgique conquise par la petite balle jaune, Justine Henin a capté l’attention du monde durant son discours final empreint d’émotion.
"Je lui dédie ma victoire. Je sais qu’elle veille sur moi depuis le paradis. J’espère que tu es fière de moi, maman… "
Ces mots sont entrés dans l’histoire du sport. Devant la plupart des membres de la famille royale ainsi que les politiciens les plus en vue de l’époque, Justine Henin a repeint le court Philippe Chatrier aux couleurs belges. "Une jeune femme issue d’un milieu modeste a réalisé son rêve. C’est bien la preuve que tout le monde peut rêver", chantait à l’époque Elio Di Rupo alors que le formateur du gouvernement, Guy Verhofstadt prédisait que "dans 20 ans, on en reparlera encore".
Le lendemain, 10.000 personnes venaient sur la Grand-Place l’acclamer tandis qu’elle brandissait son trophée.
Alors que l’émotion n’était pas encore retombée, Justine Henin gardait les pieds sur terre. "Je suis convaincue que je ne suis qu’au début de mon parcours", confiait la nouvelle n°3 mondiale. "Je peux gagner d’autres levées du Grand Chelem et devenir n°1 mondiale." Comme d’habitude, son analyse était juste.
Derrière cette réussite, se cachait un homme, Carlos Rodriguez. Son fidèle coach était fier ce jour de juin 2003. "Elle a fait le match qu’il fallait contre une Kim qui n’a pas joué à son meilleur niveau. Roland est spécial pour elle. Elle m’avait même montré l’endroit où elle était assise avec sa maman en 1992. Justine aime se fixer de gros objectifs. En général, elle y arrive."
Il avait raison. Justine Henin a conquis cette première place mondiale avec autorité et a soulevé sept trophées du Grand Chelem.
Depuis qu’elle a rangé ses raquettes, Roland-Garros cherche une digne héritière à Justine Henin.
Clijsters : "Pas la fin du monde"
Kim Clijsters était déçue après sa mauvaise prestation. "Il fallait bien que quelqu’un perde. Je suis déçue car j’étais loin de mon meilleur niveau. Je félicite surtout Justine qui a mérité ce qui lui arrive. Atteindre la finale sans bien jouer est un signe positif. Justine ne m’a rien laissé. Elle a ramené beaucoup plus de balles que d’habitude. J’ai peut-être trop cherché à jouer les lignes. Ce n’est qu’un match de tennis. Ce n’est pas la fin du monde. Je suis encore jeune. J’espère bénéficier d’autres occasions."
Son parcours
1er tour Patricia Wartusch (Aut) 6-3, 7-5
Opposée à une Autrichienne de 24 ans qui avait déjà remporté deux titres (Bogota et Casablanca), Justine Henin a livré un match typique d’un premier tour. Elle a dominé une joueuse qui n’avait pas grand-chose à perdre et qui a joué son va-tout. Le jeu de Justine était irrégulier, mais nettement supérieur à celui de l’Autrichienne. Cette bataille était surtout mentale. "Mon objectif était d’abord de gagner ce premier match", confiait Henin en rappelant que douze mois plus tôt, elle avait été éliminée dès le premier tour par la modeste Hongroise Aniko Kapros (WTA 179). "Ce fut une terrible déception. Mais elle m’a rendue encore plus forte, plus déterminée."
2e tour Jelena Kostanic (Cro) 6-2, 6-2
"Je suis encore loin de mon meilleur niveau, mais j’ai progressé par rapport à mon premier match", confiait Henin sur ce deuxième tour à sens unique. Un service efficace, une nervosité maîtrisée et un plaisir retrouvé étaient les ingrédients de ce succès.
3e tour Dally Randriantefy (Mad) 6-1, 6-1
La chaleur était accablante. Justine Henin a expédié les affaires courantes en 50 minutes. Elle pestait encore contre son revers, mais son jeu se mettait en place de plus en plus naturellement.
Huitièmes de finale Patty Schnyder (Sui/n°19) 6-3, 2-6, 6-2
La Suissesse est une joueuse capable de tout. Henin n’aime pas l’affronter. Le jour de son 21e anniversaire, elle a sorti le grand jeu. La chaleur était oppressante. Après un premier set énergivore, Henin décompressait dans le second. Menant 3-0 dans la manche décisive, elle a bouclé l’affaire en 1 h 50 avec un grand soulagement.
Quarts de finale Chanda Rubin (USA/n°8) 6-3, 6-2
La nervosité était revenue, notamment sur son service (45 % de première balle). Malgré son stress, Henin survolait le match en signant quatre breaks. Elle venait d’accomplir son job. Dorénavant, elle n’était plus favorite pour les deux derniers matches.
Demi-finale Serena Williams (USA/n°1) 6-2, 4-6, 7-5
Serena Williams n’avait plus perdu depuis 33 matches en Grand Chelem. En variant son jeu, Henin remportait un premier set grâce à un toucher exceptionnel. Elle galérait ensuite pour contrôler ses émotions et perdait quelques points clefs. Dans le set décisif, Serena Williams s’envolait vers la victoire (4-2, 30-0). Serena se déconcentrait alors sur un service litigieux. Alors qu’Henin avait levé la main, Serena avait servi out. L’arbitre annonçait une deuxième balle de service. "Je ne voyais pas de raison de lui offrir deux services alors qu’elle avait vu ma main", se défendait la Rochefortoise. Henin se retrouvait à 5-4, service à suivre. "Je me retrouve en position de gagner. Je n’étais pas psychologiquement préparée à cela. Je joue d’ailleurs un très mauvais jeu : deux doubles fautes, un coup droit aux fraises et un revers nul. J’ai tout à me reprocher. Je me retourne vers mon clan et je leur lance un petit sourire. Je me dis, voilà, c’est 5-5… Je prends alors les choses avec beaucoup de recul. Je ne fais pas la tronche. Je vis au ralenti, point par point et je breake à nouveau Serena, après avoir sauvé une balle de 6-5. Et là, je suis prête."
Finale Kim Clijsters (Bel/n°2) 6-0, 6-4
La Belgique avait déjà la certitude de remporter son premier titre en Grand Chelem avant même le début du match. Régulière, Henin ne laissait aucune chance à Clijsters qui s’avouait vaincue après 1 h 07. Justine a réussi 11 points gagnants contre seulement 2 pour Kim. Breakant à 1 partout, Justine Henin-Hardenne a en effet toujours fait la course en tête lors de cette finale. Ensuite, à 4-3, Kim Clijsters, combative, a essayé de sortir la tête de l’eau. Elle a empoché, sur un jeu blanc, le service de son adversaire, mais a concédé le sien dans la foulée… Kim a surtout manqué un nombre incroyable de balles de break (1 balle de break convertie sur 9, dont deux jeux à 0/40 au premier set) et d’autres occasions de revenir dans le match au second set. "Je voudrais surtout dédier cette victoire à ma maman qui veille sur moi depuis le paradis et j’espère qu’elle est très fière de moi."