Contrat AFT et premier Roland-Garros : la semaine de rêve d'Arnaud Bovy
- Publié le 02-06-2018 à 11h12
- Mis à jour le 02-06-2018 à 12h56
Le Liégeois, qui jouera son premier Grand Chelem dont le tirage du tableau juniors a lieu aujourd’hui, a tellement explosé en 6 mois que l’AFT a fini par le prendre sous son aile Du 3 au 10 juin, une bande de gamins part à l’assaut de Roland- Garros en rêvant de marcher sur les traces des Nadal et autre Federer. Le tableau junior est tiré samedi. Un seul Belge a réussi à être accueilli directement à la Porte d’Auteuil : Arnaud Bovy, un Liégeois de 17 ans.
Présent sur le circuit junior depuis un an et demi, il s’est toujours débrouillé avec sa famille pour maintenir son cap. En janvier, il a donné un sérieux coup d’accélérateur à son projet. À la suite d’une série de résultats positifs, il a bondi du Top 220 au Top 30. "En entrant dans mon premier tableau de Grand Chelem, j’ai atteint un objectif. Mais, ce n’est rien du tout", lance-t-il d’emblée pour rappeler tout le chemin qu’il devra encore parcourir avant la reconnaissance suprême.
Depuis janvier, il a goûté à ce que pourrait être sa vie dans les 15 prochaines années. "Et j’aime cette vie ! J’adore même. Je voyage avec mon entraîneur Greg Fardeau. Être éloigné durant 3 ou 4 semaines de la famille n’est pas agréable, mais j’ai un but clair. Jusqu’en 2017, je passais 7-8 tournois par an à l’étranger."
Aborder son parcours sans parler de sa famille relève du domaine de l’impossible. Fils d’un triathlète et d’une escrimeuse, Arnaud a une grande sœur Margaux (20 ans) qui figure dans le Top 600 WTA, un frère, Guillaume (16 ans), qui a fait (et arrêté) de la natation et une petite sœur, Juliette (13 ans), qui hésite encore entre le hockey (Old Club) et le tennis.
"J’imagine que le sport est dans nos gênes", rigole Arnaud qui est fier d’avoir deux parents qui ont été des compétiteurs. "En vacances, il y a toujours un terrain de tennis à proximité."
Au fond de leur jardin, un court en synthétique sablé est sorti de terre. Il y a passé des heures avec son papa Christian qui fut B-15 à sa grande heure. Aujourd’hui, il est notaire, mais il déploie une grande énergie à soutenir les défis sportifs de tous ses enfants.
Avant juin 2018, ne cherchez pas de traces d’Arnaud dans les fédérations wallonnes ou flamandes. Le Liégeois de 17 ans est un self made man qui a pu compter sur le soutien d’une famille formidable. "Au début, j’accompagnais ma sœur à son club. Un prof m’a demandé de taper la balle. Je n’en ratais pas une. Je me suis toujours accroché."
Il aurait pu dévier vers le football, mais il a barré cette voie en 4e primaire. "L’AFT m’a obligé à faire ce choix."
Pourtant, il n’a pas embrassé le chemin vers le centre de tennis-étude de Mons. "J’ai été repris dans le programme avec des entraînements les mercredis et les samedis à Huy et à Mons."
Il a été suivi et pris en charge jusqu’au jour où il a refusé d’entrer en internat à Ghlin. "Je ne me voyais pas me détacher de ma famille à 12 ans. Nous formons un bloc uni et soudé. Il était impensable que je passe 5 jours par semaine durant 6 ans loin de mes proches."
Son papa Christian a alors mis en place une structure 100 % privée. Du jour au lendemain, il a perdu tous ses avantages financiers de l’AFT. "Si je n’entrais pas au centre, je pouvais faire une croix. Mon papa a activé son réseau pour dénicher des sponsors. Mes sponsors ne couvrent pas tous les frais d’une saison. Sans leur apport, la situation est invivable. Je suis toujours à la recherche de nouveaux partenaires."
La fédé a finalement été l’un d’eux. Cinq ans plus tard, l’AFT a enfin dévié de sa trajectoire. Elle a tendu la main au meilleur espoir belge il y a quelques jours.
"Je suis le seul à être dans le Top 30 en juniors. Quand tu quittes la fédé, tu n’as plus aucun suivi. Je ne reçois pas un euro. J’attendais un petit geste", nous confiait-il il y a une dizaine de jours.
Il a été entendu. Ses résultats ont fini par charmer les pontes de l’AFT qui voient en lui une pépite. Un accord a été conclu entre le clan Bovy et l’AFT.
Arnaud pourra profiter des infrastructures et d’une aide financière significative. "L’AFT le prendra en charge pour finir sa saison junior. Il intègre officiellement le giron de l’AFT. Il pourra s’entraîner au centre", confirmait son papa.
Dans cette jungle, le Liégeois a toujours trouvé ses repères assez facilement. Son papa agit comme un manager alors qu’il a un entraîneur, un préparateur physique, un kiné et un diététicien.
"Sans mes parents, je ne serais rien", poursuit celui qui s’entraîne 18 heures par semaine, tantôt au Sart Tilman tantôt au Tennissimo.
En juin, il recevra son diplôme, mais, contrairement à ses amis d’école, il commencera un gros programme estival où il enchaînera les tournois. Après Roland-Garros, Wimbledon et l’US Open, il tentera de s’inviter dans le Top 16 ITF.
"Nadal m'inspire à crever"
Le Liégeois est candidat pour être sparring-partner de l’Espagnol
Fin 2017, il pointait à la 323e place en juniors. Quand le tableau a été vidé des juniors trop âgés, il a grimpé de 100 places. "Le stage à Abu Dhabi m’a fait beaucoup de bien", se souvient-il. "Je suis sorti en confiance. J’ai ensuite disputé un quart de finale d’un Grade 4. Puis, j’ai passé le premier tour d’un Grade 1 en battant un Top 40. Là, j’ai réalisé que je pouvais y arriver. J’ai remporté un Grade 2 qui m’a fait bondir au classement."
Il y a deux semaines, il a franchi un cap en atteignant le 3e tour du Grade A (équivalent d’un Masters 1000) en battant deux excellents joueurs asiatiques : Park (ITF 12) et Ho (ITF 26). "J’ai pris conscience que tout est possible. Mes résultats dépendent de mon attitude. J’ai multiplié les victoires en six mois. La confiance est bonne."
Il est mûr pour plonger dans son premier Grand Chelem, celui qui est chargé d’émotions pour les Belges. "Roland-Garros, c’est Rafael Nadal. Nadal, Nadal et encore Nadal ! Rafa m’inspire à crever. Il est gaucher. Il est combatif. Il fait preuve de courage face au travail. Toutes proportions gardées, j’ai le même style que lui : une filière longue de gaucher. Roland-Garros, c’est aussi de grands stades mythiques. Je n’imagine pas encore que je vais le vivre de l’intérieur. Il ne faudra pas arriver en étant impressionné. Dans les vestiaires, je serai concentré. J’y vais pour faire un bon résultat."
Le site de la Porte d’Auteuil lui est déjà familier. Il a déjà assisté à deux éditions. "J’avais vu Rafa et Sharapova."
Cette fois, c’est lui qui empruntera les mêmes chemins que ses idoles. "J’ai une balle avec quelques autographes dont Azarenka. Voir Nadal à Roland-Garros serait top. Qui sait ? Peut-être voudra-t-il un jour s’entraîner avec moi ?"