Trois ex-champions livrent les secrets de Genk: "Chaque fois qu'ils sont champions, c’est en bloc et par surprise"
Trois anciens cadres pour trois titres : David Hubert (2011), Jan Moons (2002) et Marc Hendrikx (1999) jugent Genk et racontent leurs souvenirs.
- Publié le 16-05-2019 à 06h50
- Mis à jour le 16-05-2019 à 09h53
Trois anciens cadres pour trois titres : David Hubert (2011), Jan Moons (2002) et Marc Hendrikx (1999) jugent Genk et racontent leurs souvenirs. La génération actuelle de Genk pourrait succéder aux trois autres qui l’ont précédée. Des équipes qui ont marqué l’histoire du club en décrochant le titre. Trois anciens Genkois, un par titre, racontent leurs aventures de l’époque, en espérant que l’équipe actuelle connaisse la même gloire qu’eux.
1. GENK REMPORTERA-T-IL LE TITRE ?
David Hubert : "Clairement. Il leur suffit d’un 4 sur 6 pour être certains du titre. Ils ont démontré qu’ils sont le champion mérité. Ils ont supporté la pression. On pensait qu’ils allaient connaître une période difficile en playoffs et malgré tout, ils ont produit du beau football. Cette équipe est mûre pour le titre."
Jan Moons : "Je pense qu’ils le seront. Ils ont réussi à me convaincre sur les quelques matchs que j’ai vus. La réorganisation suite au départ de Pozuelo m’a impressionné."
Marc Hendrikx : "Oui, bien sûr. Avec cette avance, tu sens qu’ils ne vont plus rien lâcher."
2. COMMENT FAUT-IL GÉRER UNE FIN DE SAISON AUSSI SERRÉE ?
Jan Moons : "Chacun gère cela différemment. L’entraîneur peut essayer de dégager la pression. Clement est déjà en train de mettre une certaine distance."
David Hubert : "Ils font comme nous à l’époque : parler un minimum du titre. C’est la récompense du travail fourni et elle ne viendra qu’en bossant bien. Ils savent qu’avec une victoire et un nul, ils seront champions. Ils doivent juste penser à cela."
Marc Hendrikx : "J’ai toujours réussi en me concentrant sur moi et mon équipe, pas sur les autres. Ils sont assez pros pour tous taper sur le même clou."
3. PENSEZ-VOUS QU’ON PEUT QUALIFIER GENK DE BEAU CHAMPION ?
Marc Hendrikx : "Genk sera un beau champion mérité. J’ai vu beaucoup de matchs et la manière de jouer des Limbourgeois m’a impressionné."
David Hubert : "Et avec une équipe relativement jeune. Personne dans ce groupe n’a joué pour un titre avant. Le groupe a été plus important que les individualités. Au long de la saison, des gars différents ont fait la différence. L’absence d’Anderlecht et du Standard dans la course au titre a aussi été une clé. Il y a une saveur un peu différente car Genk est moins une surprise qu’à l’époque. Bruges n’en reste pas moins une machine. Finir devant elle, n’est pas un mince exploit."
Jan Moons : "On a eu de moins beaux champions ces dernières années mais Genk a réussi à faire une belle saison d’un bout à l’autre. C’est rare."
4. CETTE GÉNÉRATION EST-ELLE PLUS BELLE QUE LA VÔTRE ?
Jan Moons : "Le football a trop changé. Il y a plus de puissance, plus de professionnalisme. Mais la ressemblance principale est que nous avions un bon groupe avec de bonnes individualités. Zokora, Sonck, Skoko, Dagano, ce sont de bons joueurs mais qui se fondaient dans un gros collectif. Notre titre était peut-être encore plus inattendu que le leur."
Marc Hendrikx : "Nous étions plus agressifs et bagarreurs. Le football de la génération actuelle est bien plus tactique et technique. Nous nous basions sur du power play."
David Hubert : "Certains ont arrêté mais d’autres ont fait des carrières folles comme De Bruyne et Courtois qui ont tout explosé. On avait cinq joueurs issus du centre de formation. Ils sont moins nombreux maintenant. Nous avions peut-être encore plus de jeunes joueurs mais il y a un fort potentiel dans l’équipe de cette saison. Pour le reste, c’est assez similaire : un bon bloc, quelques grands talents et beaucoup de porteurs d’eau qui se sont sublimés."
5. QUELLE EST L’INFLUENCE DE PHILIPPE CLEMENT SUR CE GROUPE ?
David Hubert : "Vercauteren a prouvé au football belge qu’il pouvait faire le job ailleurs qu’à Anderlecht. Clement est un peu pareil. Il n’a pas eu sa chance à Bruges et veut prouver sa valeur. Ce sont deux coachs assez similaires qui ont bien géré leur groupe. Les échos des joueurs et du staff au sujet de Clement sont uniquement positifs. C’est un travailleur qui connaît le football et qui sait gérer un groupe et les situations qui vont avec. Il a avoué avoir perdu de l’énergie avec le cas Pozuelo. Il l’a dit a posteriori et pas durant les négociations car il cherche les solutions au lieu de se plaindre des problèmes."
Jan Moons : "J’aime beaucoup ce qu’il fait. Même à l’interview, je le trouve très intéressant. Je le connais bien pour l’avoir croisé sur les terrains. Philippe est un gars aimable qui a de véritables qualités. Il a tout pour devenir un grand entraîneur."
Marc Hendrikx : "Clement est la nouvelle version d’Anthuenis. Un vrai people manager. C’est une qualité cruciale. Nous tirions tous dans le même sens. Même ceux qui jouaient moins. Clement fait pareil. C’est un exemple pour ceux qui veulent devenir coach."
6. QUEL SOUVENIR GARDEZ-VOUS DE VOTRE TITRE AVEC GENK ?
Marc Hendrikx : "Ce que j’ai préféré, c’est que nous étions totalement inattendus vu que nous étions en D1 depuis peu. Nous étions un beau champion qui n’avait aucune chance à la base."
David Hubert : "J’ai du mal à pointer un moment. Le scénario du dernier match à la maison face au Standard a eu son lot d’émotions. Plus fou, c’est difficile. C’était l’aboutissement de toute une saison de gros travail."
Jan Moons : "J’étais deuxième gardien lors de mon premier titre avec le Lierse (1997). J’étais arrivé à Genk un an avant et je vivais ma première vraie saison en tant que titulaire. Je n’ai jamais connu un autre exercice de ce niveau par la suite. L’accomplissement personnel était énorme."
7. COMMENT AVIEZ-VOUS FAIT LA DIFFÉRENCE À L’ÉPOQUE ?
Jan Moons : "Vergoosen, notre entraîneur, était un facteur important de notre titre. Il savait motiver le groupe, garder tout le monde éveillé. On avait deux joueurs pour chaque poste. Tout le monde connaissait ses tâches et faisait le boulot."
Marc Hendrikx : "Nous avions un très bon mix de joueurs avec de la qualité partout sur le terrain. Tactiquement, nous mettions tout le monde hors course. Personne n’a jamais su trouver une réponse à notre 3-5-2 et notre pressing très haut. C’était une approche très différente de ce qui se faisait à l’époque."
David Hubert : "Notre groupe s’autorégulait. Si un gars marchait de travers, c’est tout le groupe qui le secouait. On gérait pour viser notre objectif sans jamais voir trop loin. Cela nous a permis d’avoir une constance, contrairement au Standard qui a fait des playoffs magistraux après avoir manqué de constance."
8. À QUEL POINT LES ASPECTS MENTAUX ET PSYCHOLOGIQUES ONT JOUÉ DANS LA COURSE AU TITRE ?
David Hubert : "Quand le Standard est revenu sur nous, il a fallu être costaud pour ne pas flancher. Heureusement, on pouvait compter sur l’expérience de gars comme Barda Toszer ou Joao Carlos en début de saison. Heureusement, le groupe était taillé pour le titre. J’aurais pu faire le capitaine et décider de tout mais nous avions plusieurs leaders dans l’équipe. On pouvait compter les uns sur les autres."
Marc Hendrikx : "Tu n’es pas champion sans grosse mentalité et une belle solidarité."
Jan Moons : "Ma force est d’avoir toujours su relativiser. Pour moi, ce n’était que du football. Le stress peut te faire descendre très bas, alors je tentais de l’éviter. Après, en fin de saison, tu ne peux pas éviter la pression. Surtout que les 15 millions de la Champions League, c’est énorme pour un club comme Genk."
9. QUEL JOUEUR AVAIT FAIT LA DIFFÉRENCE ?
Jan Moons : "Tout le monde a été important mais Sonck et Dagano étaient dingues en pointe de l’attaque. Ils jouaient très bien à deux. Derrière eux, Skoko évoluait en numéro 10 mais bossait comme un fou en perte de balle. Et encore derrière, il y avait Bernd Thijs qui arrachait des ballons. Il y avait aussi Zokora, etc. Du beau monde !"
David Hubert : "Je ne peux pas sortir un homme clé. Je manquerais de tact si je le faisais. De prime abord, on pense à Courtois, De Bruyne ou Vossen mais il y avait aussi d’autres joueurs tout aussi phénoménaux cette année-là. Comme dans la génération actuelle."
Marc Hendrikx : "Tout le monde a joué à son meilleur niveau cette année-là. Strupar ? Les attaquants sont toujours mis en avant, mais on ne se résumait pas à lui."
10. QUELS CONSEILS LEUR DONNERIEZ-VOUS POUR BIEN FÊTER LE TITRE ?
Jan Moons : "Ils n’ont pas besoin de mes conseils. Ils savent faire la fête dans le Limbourg (rires). La fête avait été gigantesque en 2002. Nous sommes revenus de Westerlo et c’était déjà la grosse fête dans le bus avant de finir avec les supporters."
Marc Hendrikx : "Ils n’auront pas besoin de coach ou d’anciens champions pour leur apprendre à faire la fête. Je me souviens que nous avions vraiment célébré tous ensemble. À l’image de notre saison."
David Hubert : "Pour bien fêter ça, il faut faire le job avant. Ensuite, ils doivent profiter du moment. On n’en profite jamais assez. J’aurais davantage dû me rendre compte de ce qu’on venait de faire. En tant que sportif, tu en veux toujours plus. J’étais déjà trop focalisé sur la suite. C’est le boulot des dirigeants de penser à la saison d’après. Il y aura des départs mais je suis persuadé que Genk a déjà les joueurs pour pallier les transferts sortants."