Malines envoyé en enfer, Waasland-Beveren blanchi à la surprise générale: tentons d'y voir plus clair
Malines est le grand perdant du premier jugement dans le Foogate tandis que Waasland-Beveren est blanchi. Lokeren pleure, le Beerschot et les Européens rient. Mais l’histoire n’est pas encore terminée.
- Publié le 03-06-2019 à 06h51
- Mis à jour le 21-06-2019 à 15h55
Malines est le grand perdant du premier jugement dans le Foogate tandis que Waasland-Beveren est blanchi. Lokeren pleure, le Beerschot et les Européens rient. Mais l’histoire n’est pas encore terminée.
Le premier verdict est tombé mais le Footgate n’en est pas encore à son épilogue, loin de là.
Samedi, la commission des litiges d’appel pour le football professionnel a lourdement puni le FC Malines dans son jugement : pas de montée en D1A, pas de Coupe d’Europe malgré son succès en Coupe de Belgique, pas de Croky Cup pendant un an et un retrait de 12 points en D1B la saison prochaine, hypothéquant déjà pratiquement les chances de promotion du KaVé avant, au mieux, 2021. "On ne peut retenir aucune circonstance atténuante pour Malines", a écrit la commission. Malines échappe juste à la descente en D1 amateurs, ce que Tubize réclamait selon un point du règlement.
C’est la sanction la plus spectaculaire d’un jugement qui tient sur 225 pages et qui concerne treize personnes, Malines mais aussi Waasland-Beveren, blanchi à la surprise générale des observateurs du procès. Tentons d’y voir plus clair.
1. Pourquoi Malines est puni et pas Beveren ?
Le jugement a clairement reconnu la culpabilité de Malines : le club a tenté d’acheter le match du 11 mars 2018 contre Waasland-Beveren lors de la dernière journée de la phase classique qui avait tout de même vu le KaVé descendre en D1B.
De son côté, le club de Beveren a été blanchi. Seuls deux de ses dirigeants (le président Dirk Huyck et le directeur financier Olivier Swolfs) ont été punis, assez légèrement, pour ne pas avoir alerté l’Union belge quand Malines a tenté son coup.
Il y a donc eu un corrupteur mais pas de corrompu. Pourquoi ? Beveren peut remercier son président Huyck dont le plaidoyer a fait impression auprès de la commission. "Il a reconnu avoir fait une erreur en n’alertant pas l’Union belge mais il n’était pas au courant qu’il s’agissait d’une obligation", est-il écrit dans le jugement.
La commission des litiges n’a pas pu prouver que la direction beverenoise avait accepté le deal proposé par Malines. Et ce, malgré l’épisode tragi-comique de la cuisine.
Cinq jours avant le fameux match, l’agent Dejan Veljkovic s’était rendu au magasin de cuisine détenu par l’épouse du président de Beveren. Une heure plus tard, il avait téléphoné au directeur financier de Malines en lui disant : "Tout est en ordre, la cuisine est commandée." Un message codé pour valider la corruption ? Les enquêteurs le pensaient mais les preuves n’ont pas été suffisantes. En tout cas pas pour le jugement de l’Union belge.
Rappelons que, de son côté, la justice civile enquête toujours sur le Footgate et pourra utiliser toutes les révélations du repenti Veljkovic. Ce dont l’enquête de l’Union belge n’a pas pu bénéficier.
2. Que va tenter Malines pour se sauver ?
La direction de Malines n’a laissé planer aucun suspense : le club ira en appel de ce jugement. Un appel qui se fera devant la CBAS. "Nous ne comprenons pas ce jugement. Nous sommes innocents. Nous allons nous préparer au mieux pour l’appel", a déclaré un membre du KaVé.
Selon un avocat qui a participé au procès, Malines déposera l’appel le plus tard possible, soit au bout des sept jours légaux. Pourquoi ? Pour embêter la CBAS en jouant la montre.
L’Union belge avait promis que le verdict de la commission des litiges et celui de la CBAS en cas d’appel seraient connus avant le 30 juin, histoire de pouvoir organiser sereinement la prochaine saison sportive. En retardant au maximum la procédure, Malines veut donc mettre la CBAS sous pression. Au lieu des quatre semaines potentielles pour apporter son jugement, la Cour belge d’arbitrage pour le sport n’en aura que trois…
Et si le verdict de la CBAS confirme la punition de Malines ? Le club ne baisserait pas les bras et pourrait tenter de se sauver par la justice civile. C’est ce que laissent déjà entendre les dirigeants, off the record.
Malines pourrait d’abord tenter un recours en référé mais ça n’a encore jamais fonctionné dans l’histoire du football belge.
Ensuite, Malines pourrait contester la compétence ou l’intégrité de la CBAS devant le tribunal de première instance. Sauf que le règlement de l’Union belge et de la Pro League est clair à ce sujet : un club qui attaque ses propres instances risque la radiation pure et simple !
Un point de règlement que Malines conteste déjà. Selon les dirigeants, ce n’est pas honnête d’obliger les clubs à signer ce règlement sous peine de ne pas pouvoir participer aux championnats professionnels en Belgique.
Reste à savoir si les dirigeants malinois prendront vraiment le risque d’aller contester ce règlement au civil en cas de jugement négatif à la CBAS.
3. Beveren est-il absolument certain de rester en D1A ?
Toutes les personnes condamnées par le jugement de la commission des litiges samedi ont le droit d’aller en appel. Mais c’est aussi valable pour le procureur de l’Union belge, Kris Wagner.
S’il estime que le jugement n’est pas assez sévère pour une personne ou un club, il peut, lui aussi, demander un nouveau procès, devant la CBAS donc. Dimanche soir, Wagner ne savait toujours pas s’il irait en appel ou pas.
S’il va en appel, le club de Waasland-Beveren pourrait donc à nouveau devoir s’inquiéter de son sort.
Le club de Lokeren, qui est condamné à descendre en D1B par le maintien de Beveren, peut, lui aussi, aller en appel. Selon nos sources, ça devrait d’ailleurs être le cas.
Cela suffira-t-il pour modifier le jugement ? Selon plusieurs observateurs proches du procès, c’est peu probable. Le jugement de la commission des litiges est un bijou d’argumentation. Selon eux, il sera très difficile à contrer devant la CBAS.
Ce serait une bonne nouvelle pour le Beerschot, club hors du Footgate, qui profite le plus de jugement. Sauf modification du jugement, les gars du Kiel, perdants de la finale en D1B mi-mars, vont remplacer Malines en D1A. Une cinquième montée pour le club qui jouait encore en première provinciale en 2013-2014.
4. Comment ça se passera à la CBAS ?
Malines, l’agent Walter Mortelmans (qui veut aussi aller au civil) et sans doute Lokeren avant d’autres peut-être : il y aura bien un appel de ce jugement devant la CBAS.
Une fois l’appel acté officiellement au bout des sept jours légaux maximum, trois arbitres seront alors désignés pour rendre un verdict. Chaque partie peut choisir un arbitre parmi une liste. Le troisième arbitre, lui, doit être désigné par les deux parties ensemble.
Les verdicts
Aperçu des sanctions infligées par la haute cour d’appel de la Commission des litiges de l’URBSFA dans le cadre du dossier disciplinaire relatif au match FC Malines-Waasland-Beveren du 11 mars 2018.
Le FC Malines et 4 de ses administrateurs sont condamnés pour falsification de la compétition. 10 ans de suspension de toutes activités au sein de l’Union belge pour Olivier Somers (plus interdiction de réaffiliation), actionnaire principal, Johan Timmermans, membre du conseil d’administration et ancien président, et Thierry Steemans, directeur financier ; 7 ans pour Stefaan Vanroy, directeur sportif.
Waasland-Beveren est acquité, mais 2 de ses administrateurs (le président Dirk Huyck et le directeur financier Olivier Swolfs) sont condamnés à un an de suspension (avec sursis pour Huyck) pour ne pas avoir satisfait au devoir d’information.
3 agents de joueurs sont coupables pour des faits de falsification de la compétition. Dejan Veljkovic est suspendu 10 ans de toutes activités au sein de l’Union belge et interdit de réaffiliation ; Walter Mortelmans et Thomas Troch sont suspendus un an.
Le joueur Olivier Myny (ex-Waasland) est acquitté.