Emile Mpenza: "Je revis depuis que je suis à l’Antwerp"
Disparu des radars à la fin de sa carrière, Émile Mpenza, ancien buteur du Standard, a repris du service à l’ombre du Bosuil en tant que formateur des jeunes attaquants
- Publié le 03-11-2018 à 07h44
- Mis à jour le 03-11-2018 à 13h53
Disparu des radars à la fin de sa carrière, Émile Mpenza, ancien buteur du Standard, a repris du service à l’ombre du Bosuil en tant que formateur des jeunes attaquants Ses crampons de buteur, qui l’ont emmené de Courtrai à Bakou en passant par Mouscron, le Standard, Schalke 04 ou encore Manchester City, l’ancien Diable les avait rangés en 2013 ne se doutant pas un instant que, cinq ans plus tard, un appel de son père spirituel, Lucien D’Onofrio, viendrait les dépoussiérer.
À 40 ans, Émile Mpenza, l’ancien enfant terrible du football belge, embrasse, depuis le début de la saison, une nouvelle carrière de formateur à l’Antwerp. L’ex-international a en charge les jeunes attaquants du Matricule 1.
"Je me sens revivre, les sensations enfouies en moi sont remontées à la surface."
Entretien vérité avec un homme aussi touchant que réservé, mais qui se livre sans compter.
Émile, comment avez-vous atterri à l’Antwerp ?
"J’ai assisté à Antwerp - Ostende la saison dernière et j’ai vu Lucien (D’Onofrio). On a discuté et je lui ai dit qu’il pouvait penser à moi si un poste se libérait au Bosuil. Début de saison, il m’appelait pour que je prenne en charge les jeunes attaquants du club anversois."
Vous aviez donc décidé de revenir dans le monde du foot.
"Oui, mais je n’étais pas si motivé que ça. C’était juste une proposition faite à Lucien. Aujourd’hui, la motivation ayant refait surface, le choix de l’Antwerp était bien le meilleur pour moi."
Qu’est-ce qui vous y a séduit ?
"Avant tout, la présence de Lucien, évidemment. Ensuite, les ambitions du club à mon égard. Les dirigeants anversois n’ont pas hésité un instant à me confier la direction des jeunes attaquants du club. Je ne peux que les remercier de me laisser faire ce que j’aime et ce que j’ai aimé réaliser toute ma vie."
Qu’attendent les dirigeants de l’Antwerp de vous ?
"On m’a demandé d’apporter ce qui m’a été inculqué durant ma carrière de joueur. Si les jeunes sont bien pris en charge dès leurs premiers pas en club, ça ne peut qu’être bénéfique pour la suite de leur carrière. Moi, étant jeune, je n’ai pas eu cette chance. Tout ce que je savais faire, je l’ai appris dans la rue."
De quelles catégories vous occupez-vous ?
"J’ai commencé avec les plus petits, les U9. Après trois mois, on m’a demandé de prendre en charge les jeunes espoirs, des U16 à la réserve. Ils ont jugé que mon travail était bon. Les dirigeants ne s’attendaient pas à ce que j’atteigne ce niveau si rapidement. Aujourd’hui, les jeunes attaquants me disent qu’ils veulent s’entraîner avec moi tous les jours, au moins une heure."
Comment vous y prenez-vous ?
"Je participe beaucoup. C’est important pour eux. Je vois leurs erreurs et c’est en me mêlant à eux que je peux les corriger. De la sorte, l’apprentissage est plus aisé et rapide. Ensuite, il n’y a pas de secret, c’est un travail de répétition. Personnellement, cela me permet aussi de retrouver des sensations enfouies en moi."
Parlez-vous aux jeunes de votre vécu, de vos erreurs de jeunesse ?
"Bien entendu. Je fais référence à mon expérience sur, mais aussi en dehors des terrains. Je me mets à leur place et, à l’époque, je n’avais pas forcément des gens pour m’encadrer et me dire quoi faire. Alors oui, j’ai commis des erreurs, mais qui n’étaient pas monstrueuses. Ce que j’ai fait à l’époque, c’est aujourd’hui rentré dans les mœurs…"
À quoi pensez-vous ?
"Avoir une belle et grosse voiture ou encore sortir avec une Miss Belgique. Cela ne faisait pas bon genre à l’époque. Aujourd’hui, tout le monde me dit que j’aurais davantage ma place dans le foot moderne. Mais je réponds que je suis juste allé trop vite aux yeux de certaines personnes."
Vous jouez aujourd’hui un rôle d’exemple, quels ont été les vôtres ?
"J’ai appris de tous mes coaches, de Dominique (D’Onofrio) à Eriksson en passant par Georges Leekens, qui était comme un papa pour moi."
Les jeunes Anversois qui sont sous vos ordres, que savent-ils de votre carrière de joueur ?
"À ma grande surprise, même les plus petits m’ont parlé de ma carrière, notamment chez les Diables. Ça se voit dans leurs yeux qu’ils sont contents et ça me fait chaud au cœur. Je me dis alors que je dois essayer de les aider à atteindre leurs rêves en les faisant progresser. C’est ça, mon but, qu’il y ait, un jour, un de mes joueurs qui foule la pelouse derrière nous (NdlR : il se tourne vers le terrain principal du Bosuil)."
Vous auriez aimé bénéficier d’un tel encadrement ?
"Évidemment. Durant ma carrière, Marc (Wilmots) a essayé de m’aider mais il ne pouvait pas tout faire. Aujourd’hui, les jeunes sont mis dans les meilleures conditions dès leurs débuts. Ils ont tout à disposition. Quand on voit les centres de formation qui sortent de terre aujourd’hui, un jeune ne peut que s’épanouir."
On vous sent épanoui dans ce nouveau rôle ?
"Oui, j’effectue un gros travail sur moi-même car je suis très timide. Ce job m’oblige à me lancer et à m’extérioriser. Cela m’aide également à me sentir mieux car, avant, j’intériorisais énormément et, aujourd’hui, je donne plus qu’avant. Au niveau physique également, cela me fait du bien car j’ai perdu 14 kilos depuis que je suis arrivé à l’Antwerp. Tout a changé pour moi. Je veux vraiment montrer le bon exemple aux jeunes que j’entraîne."
De quoi vous donner envie de rechausser les crampons ?
"Vous rigolez, mais on m’a demandé si je ne voulais pas jouer avec la réserve (rires). Mais qu’on laisse mes genoux tranquilles (rires)."
À terme, allez-vous intégrer le staff pro ?
"Non, il n’y a pas de plan, et ce malgré le lobbying effectué par Vedran (Runje) auprès du coach Bölöni. Il me dit toujours : ‘Je vais convaincre le coach, tu vas venir t’asseoir à côté de moi sur le banc.’ Je lui réponds toujours de me laisser le temps. Aujourd’hui, j’apprends avec la réserve et les équipes d’âge. C’est ça qui va me faire avancer."
Vous n’ambitionnez pas de devenir coach principal un jour ?
"Pas du tout. Déjà, ce que je fais actuellement, je n’aurais jamais imaginé le réaliser un jour. Mais, T1, c’est trop pour moi. Je suis formateur, pas entraîneur. La tactique, ce n’est pas mon fort. Si ça ne tenait qu’à moi, on jouerait tout le temps en 4-4-2 en se projetant rapidement vers l’avant (rires)."