Martos : "Je ne veux pas être payé pour rien"
Quand la passion le quittera, Javi Martos (35 ans) tournera la page. Mais ce n’est pas encore le cas…
- Publié le 02-03-2019 à 08h30
- Mis à jour le 02-03-2019 à 10h07
Quand la passion le quittera, Javi Martos (35 ans) tournera la page. Mais ce n’est pas encore le cas…
Pièce maîtresse de la défense de Charleroi pendant des années, Javier Martos connaît une saison 2018-2019 plus compliquée. Alors qu’il n’était quasiment jamais blessé ou absent de l’équipe de base du Sporting, l’Espagnol a souffert en novembre d’une déchirure aux ischios et a pris place depuis trois matchs sur le banc des réservistes. Une situation qui ne change rien à son professionnalisme. "Je reste discipliné sur la manière de me comporter", explique le capitaine des Zèbres. "Je travaille tout le temps pour jouer et je respecte les choix de l’entraîneur. Je suis conscient qu’il y a de la concurrence avec des joueurs d’un très bon niveau. Et comme les résultats n’ont pas toujours été bons, c’est logique qu’un entraîneur essaie d’autres solutions. Je travaille encore plus aux entraînements pour être prêt si le coach m’appelle. Je continue de montrer l’exemple. Quand une équipe est championne ou réussit des belles performances, ce n’est pas juste grâce aux onze joueurs sur le terrain, c’est aussi grâce aux mecs qui sont derrière et qui poussent les titulaires à jouer à fond."
C’est donc depuis le banc des réservistes que Javi Martos a vu les chances de Charleroi de disputer les playoffs 1 fondre comme neige au soleil.
"C’est plus difficile pour moi depuis le banc, ajoute le joueur formé au FC Barcelone. Surtout au niveau des émotions. Tu es impuissant, tu n’es pas dans l’action. Cela ne se voit pas de l’extérieur mais je suis très nerveux quand je suis réserviste. Je vois des choses et j’ai toujours envie d’aider l’équipe. J’encourage beaucoup mes équipiers et je donne des conseils. Ne pas jouer, cela change aussi mes habitudes. Quand je joue, je cours entre 10 et 12 kilomètres. Si je suis sur le banc, je ne fais rien. Donc le lendemain, je dois dire à ma femme, je m’excuse mais je dois travailler ce matin et partir courir pour garder la forme. Je ne peux pas rester deux ou trois jours sans rien faire. Sinon je vais perdre le rythme. Surtout à mon âge."
Encore sous contrat au Mambourg jusqu’en juin 2020, le défenseur de 35 ans sait que sa fin de carrière approche petit à petit. Mais le feu sacré est toujours présent.
"J’en ai parlé avec ma famille. Pour moi, chaque entraînement reste un plaisir. Chaque minute de jeu sur un terrain avec le maillot de Charleroi est un cadeau. Je ne sais pas combien de temps je vais encore jouer. Cela dépendra de mon physique, de mon cœur, de mon envie et de la volonté du club. Comme ce sont des éléments que je ne maîtrise pas, j’ai pris la décision il y a déjà quelques mois de prendre du plaisir et de travailler comme j’ai toujours fait."
Et l’Espagnol ne pense pas chaque matin quand il se lève à ce qu’il fera quand son contrat se terminera au Sporting.
"Je n’ai pas encore réfléchi à ce que je vais faire en juin 2020. Normalement à 36 ans, 90 % des joueurs, ou même plus, arrêtent leur carrière. Je veux aller au bout de mon contrat en prenant du plaisir mais surtout en continuant à donner quelque chose à Charleroi. Je ne veux pas être là pour dire d’être là. Cela veut dire quoi ? J’en reviens à la notion de plaisir. Le plaisir de jouer, de travailler mais aussi de souffrir. Car il y a des séances qui sont vraiment dures. Ce n’est pas la même chose de souffrir avec le sourire que de souffrir quand on est frustré. Pour le moment, je suis sur le banc et je pourrais même me retrouver dans la tribune. Mais à partir du moment où je me rends compte que je peux apporter des choses à mes équipiers, être important dans le vestiaire, parler avec le coach de situations tactiques, c’est cela apporter quelque chose pour moi. Si je ne me sens pas bien, que mon corps ne sait plus suivre ou qu’il n’y a plus de communication, c’est cela pour moi ne servir à rien. Je ne veux pas être payé pour rien. Sinon avec le même salaire, un autre joueur peut apporter plus au club."
Considéré comme le relais de Felice Mazzù sur le terrain, Javi Martos n’attend pas de traitement de faveur de la part du coach hennuyer.
"C’est une relation coach-joueur mais on doit y ajouter un contexte émotionnel vu notre long passé ensemble au club. Et cela, que je sois sur le terrain ou sur le banc, cela ne change pas. Je respecte son travail et je sais que ce n’est pas facile de faire des choix. Et je sais que ses choix sont dictés par le désir de faire ce qui est le mieux pour l’équipe. On est 25 dans le groupe et lui, c’est le responsable qui doit faire les choix. J’ai une très bonne communication avec Felice. Par exemple, quand je suis sur le banc, si je vois quelque chose au niveau tactique et que je pense que cela peut aider le coach, je lui dis. Mais de manière discrète car je ne veux pas envoyer un mauvais message aux autres joueurs."
"Ma femme a tout quitté pour me suivre"
Quand sa carrière sera terminée, l’Espagnol retournera au pays…
Pour Javi Martos, la vie ne tourne pas qu’autour du ballon rond. Depuis plusieurs années, l’Espagnol a repris des études et suit un cursus à distance en sciences de l’activité physique et du sport.
"Je suis en troisième année sur les quatre prévues. Mais cela va me prendre encore deux ans pour finir car j’étale mes cours. Je fais cela car cela me procure du plaisir. Je suis quelqu’un de très actif donc en rentrant chez moi après le football, je ne me vois pas rester pendant des heures devant la télévision. Je me fixe des objectifs à atteindre. Les choses étudiées sont très utiles dans mon quotidien de joueur. Je vois le football d’une manière différente. Après ces études, je vais peut-être suivre les cours pour devenir entraîneur ou manager sportif. Cela va m’aider à comprendre une profession différente avec une vision plus générale, pas seulement celle d’un joueur."
Et le défenseur central du Sporting ne se voit pas encore dans la peau d’un futur entraîneur. "Pour le moment, je ne ressens pas cette envie. Mais j’adore le monde du football. Quand ma carrière sera terminée et que mon diplôme sera en poche, je vais faire une petite pause, laisser un peu le football sur le côté et profiter de ma famille. Cela fait des années que j’ai quitté l’Espagne. Et si après je sens que le football me manque, ce sera le bon moment pour démarrer quelque chose de neuf. Tout sera une question de passion."
Mais ce qui est certain dans l’esprit du capitaine zébré, c’est qu’il retournera dans son pays une fois sa carrière de joueur terminée.
"Pour moi et pour ma famille. Quand j’ai quitté mon pays, mon frère avait 10 ans, maintenant il en a 23. Je le vois parfois en Belgique ou lors des vacances mais ce n’est pas la même chose qu’une vraie relation. Pour mes parents et ceux de ma femme, ce n’est pas facile non plus. Ma femme, qui avait une bonne place dans une agence de marketing, a tout abandonné pour me suivre, pour que je puisse réaliser mon rêve. Je ne peux pas être égoïste. Elle a aussi le droit de profiter de sa vie professionnelle. En Belgique, elle a appris le français et elle a suivi des cours de nutrition. On retournera en Espagne et on verra comment cela se passe. J’ai besoin de me reconnecter avec ma famille. Ce sera une nouvelle vie à construire."
Mais pas question pour lui d’oublier la Belgique et surtout Charleroi : "La Belgique aura toujours une place spéciale dans mon cœur. Ma fille, elle est carolo, elle est née à côté du stade. Elle a la double nationalité car je la possède aussi."
"Un manque de régularité"
Le capitaine des Zèbres évoque aussi un changement de style de jeu.
Javi Martos est conscient que Charleroi devra certainement jouer les PO2 cette saison. Mais ce n’est pas une raison pour lâcher la pression. "Nos chances de PO1 sont très minces. Si je dis autre chose, je passe pour un con. Mais on doit jouer ces trois derniers matchs à 100 %. Si au final il y a un miracle, c’est top. Si on n’y arrive pas, on sera prêt pour les PO2. On ne peut pas lâcher. Car si tu le fais, tu ne pourras pas redémarrer la machine pour les PO2. On ne peut rien abandonner. Vous imaginez qu’on gagne contre Genk et que les autres résultats soient favorables. On pourrait encore y croire…"
Mais pour vivre un tel miracle, Charleroi devra afficher une régularité peu présente cette saison.
"On travaille pour maîtriser un style différent . Avant, on avait Rezaei et Benavente qui possèdent des profils différents de nos offensifs actuels. Sur les flancs aussi. Ce n’est pas la même chose de mettre un ballon dans la profondeur pour Tainmont que de jouer avec Bruno qui veut plus le cuir dans les pieds. C’est aussi une question de maturité. Victor a 19-20 ans, Younes, vient d’arriver et il a 18 ans, Ali, il est jeune, Bruno aussi n’est pas très âgé finalement. Tous ces joueurs ne sont pas au club depuis longtemps. Ce sont des éléments importants mais il faut s’adapter à leur style. On a des jeunes avec un talent impressionnant. Mais en foot, ce n’est pas le seul critère. Il y a l’expérience, la maturité. Et c’est là qu’on doit travailler. Car si on n’a pas eu de la régularité cette saison, c’est parce qu’on a mal géré certains moments de matchs."