Ilaimaharitra après une incroyable CAN: "Nous sommes devenus des stars pour les gens de Madagascar"
Ilaimaharitra revient sur la fabuleuse Coupe d’Afrique des Nations de son pays.
- Publié le 03-08-2019 à 07h26
- Mis à jour le 03-08-2019 à 09h54
Ilaimaharitra revient sur la fabuleuse Coupe d’Afrique des Nations de son pays. C’est avec un mois de retard sur la majorité de ses coéquipiers zébrés que Marco Ilaimaharitra a fait son grand retour au Sporting Charleroi la semaine passée. Qualifié pour la Coupe d’Afrique des Nations avec Madagascar, le métronome carolo est finalement resté plus longtemps que prévu en Égypte, le petit poucet malgache n’étant éliminé qu’en quart de finale de la compétition après un parcours héroïque.
Buteur décisif lors de la première victoire de sa sélection en Coupe d’Afrique, Ilaimaharitra retrace ce beau parcours qui a débuté peu de temps avant la frustrante dernière rencontre perdue par Charleroi à l’Antwerp en fin de saison passée…
Marco, était-il facile d’enclencher le bouton Off après cette défaite cruelle contre l’Antwerp ?
"J’ai eu deux ou trois jours de congé avant de reprendre avec la sélection. Le premier jour, je ne pensais qu’à cette défaite. Quand tu mènes 2-0 à l’extérieur, tu n’as pas le droit de te faire rattraper de cette manière… J’étais vraiment dégoûté. Une fois en sélection, j’ai fait la part des choses et je me suis reconcentré sur ça."
Quel était l’état d’esprit de la sélection malgache avant de débuter cette Can ?
"Nous étions très positifs sur ce que nous savions faire. Nous n’avions rien à perdre et tout à gagner. Nous n’avions pas de pression. Il fallait simplement prendre du plaisir."
Après un nul face à la Guinée, vous remportez votre première victoire en Coupe d’Afrique des Nations grâce à un superbe but de… Marco Ilaimaharitra !
"Ce but contre le Burundi, c’est le plus beau moment de ma carrière. Mon statut a largement changé après ce goal (sourire) . Avant cela, je ne faisais pas partie de ceux dont on retenait le nom. Mais cela ne me dérangeait pas, j’aime bien être dans mon coin. Désormais, aucun joueur ne peut faire deux mètres sans se faire marcher dessus à Madagascar. Ceux qui ont marqué, c’est encore supérieur."
En huitièmes de finale, Madagascar affronte le Congo mais vous êtes suspendu pour cette rencontre. Comment avez-vous vécu ce moment ?
"C’était l’un des pires moments de ma carrière. J’ai perdu ma voix à la fin du match tellement j’ai crié en tribunes, juste derrière le banc. C’était beaucoup trop stressant. C’était un enfer à vivre que je ne souhaite à personne (NdlR : Madagascar a finalement remporté le match aux tirs au but) ."
Vous tombez finalement contre la Tunisie en quart de finale. La marche vers les demies était trop haute ?
"Nous aurions pu passer ce tour-là. Le premier but tunisien nous a fait mal. Cela s’enchaîne ensuite et il y avait beaucoup de fatigue. Nous n’avions peut-être pas l’effectif pour faire une très grande compétition comme les équipes arrivées dans le dernier carré."
Avez-vous rapidement pris conscience d’avoir joué un rôle important dans l’histoire de Madagascar ?
"Une fois arrivé à Madagascar, j’ai compris que nous avions marqué l’Histoire. Je me suis rendu compte que les gens étaient reconnaissants de ce que nous avions fait. Avant cela, j’ai mis du temps à en prendre conscience. En Égypte, nous ne nous rendions pas bien compte de la ferveur extérieure. Une fois arrivés au pays, nous avons compris que ce que nous avions réalisé, c’était quelque chose de magnifique."
Comment s’est déroulé votre retour à Madagascar ?
"Dès que nous sommes arrivés, ils nous ont déroulé les tapis rouges. Nous devions faire une parade mais il y avait tellement de monde que l’armée était débordée. Sur une route de l’aéroport jusqu’au stade national, qui prend normalement 1 heure, nous avons fait 7 heures de parade. Nous avons ensuite passé 40 minutes sur un podium avec le Président avant de fêter cela entre nous. Le plus touchant est de voir les gens heureux. Ils n’ont pas la vie de rêve là-bas et le simple fait de nous voir leur permettait d’oublier tous leurs problèmes."
Comment gérez-vous ce nouveau statut au pays ?
"J’arrive à faire la part des choses. À Madagascar, nous sommes devenus des stars pour tous les gens du pays. La chance que j’ai, c’est que cette ferveur est à Madagascar et pas dans mon quotidien. Nous avons ce sentiment de fierté de représenter nos origines. Nous étions très sous-estimés avant ce tournoi. Nous avons réussi à faire bousculer ces préjugés. On nous prenait à la légère et c’est une fierté d’avoir pu faire changer les mentalités."
"Ma tête est à 100 % à Charleroi"
Le Malgache ne veut pas parler de transfert… pour le moment.
Après sa grosse saison 2018-2019 au Sporting Charleroi suivie de ses belles performances durant la Coupe d’Afrique des Nations, Marco Ilaimaharitra pouvait logiquement rêver d’un beau transfert cet été. Mais pour le moment, il n’en est rien.
"Vous avez dû entendre qu’à part Victor Osimhen, personne ne partirait, explique le Malgache en référence à des propos de Mehdi Bayat. Je n’ai pas bougé et si cela continue comme cela, il n’y aura pas d’inquiétude à se faire car ma tête est à 100 % à Charleroi. Bien sûr, on ne sait pas ce qui peut arriver dans le football. Si je devais venir à partir, ce qui n’est pas d’actualité, je partirai. Mais pour le moment, il n’y a aucune question qui se pose à ce sujet."
Avant de rechausser ses crampons à Charleroi, Marco Ilaimaharitra a eu une discussion avec son nouveau coach mais aussi avec Mehdi Bayat qui a réussi à le convaincre de rester une saison supplémentaire.
"J’ai discuté avec Mehdi qui m’a dit qu’il avait besoin de moi, avance le Malgache. Cela fait plaisir et cela donne envie de rester. Si à un moment toutes les parties arrivent à tomber d’accord et que cela peut permettre de changer positivement le quotidien de tout le monde, cela pourrait être dur de refuser. Mais si je joue, rajouter une saison en plus à Charleroi, je le ferai sans problème."
De quoi rassurer les supporters carolos qui comptent bien sur Marco Ilaimaharitra pour mener le Sporting en playoffs 1 cette saison.
"Je n’accepterai jamais le mot ‘indéboulonnable’"
Revenu de vacances, Ilaimaharitra a été titularisé d’entrée de jeu par Belhocine.
Éliminé de la Coupe d’Afrique des Nations le 11 juillet par la Tunisie, Marco Ilaimaharitra a eu besoin de temps pour souffler. Ce n’est que deux semaines plus tard qu’il a retrouvé ses coéquipiers et le nouveau staff mis en place. "J’ai expliqué à Mehdi Bayat et à Karim Belhocine qu’il me fallait plus d’une dizaine de jours pour recharger complètement les batteries", avance le Malgache. "Ils ont été très compréhensifs. J’ai pu partir en vacances et couper complètement. J’avais besoin de me vider la tête. Une fois revenu à Charleroi, il a alors fallu relancer la machine."
Surtout que le joueur de 24 ans a été directement titularisé par Karim Belhocine face à la Gantoise, quelques jours seulement après son retour. Une marque de confiance pour ce milieu défensif qui prend de plus d’ampleur au Sporting. "Je n’accepterai jamais ce mot d’‘indéboulonnable’", répond Ilaimaharitra quand on lui demande s’il est indispensable à cette équipe. "C’est vrai que j’ai pris de l’importance dans l’équipe. Ma titularisation contre Gand, cela prouve que le coach me fait confiance. Et cela me permettra de me libérer encore plus vite car je suis quelqu’un qui fonctionne à la confiance."
Celui qui n’a donc pas participé à la préparation d’avant-saison avec son équipe a quand même réussi à s’intégrer facilement dans ce Charleroi version 2019-2020.
"Ma chance est que l’équipe n’a pas beaucoup changé par rapport à la saison dernière", avance Ilaimaharitra, qui a joué les 90 minutes face à la Gantoise. "Pour une première contre Gand, c’était vraiment encourageant. Peut-être que certaines personnes ne sont pas contentes qu’il n’y ait pas beaucoup de mouvements mais cela permet de garder une certaine stabilité. Le mercato n’est pas fini, il peut encore y avoir des arrivées. Je pense qu’on peut jouer largement les playoffs 1 avec l’équipe qu’on a."
Une équipe qui a dû s’adapter à la nouvelle philosophie du nouveau coach, différente de celle de Felice Mazzù, parti à Genk. "Notre manière de jouer sans ballon est différente", analyse le milieu de terrain zébré. "Nous travaillons beaucoup nos sorties de balle à l’entraînement. Le coach est vraiment dans l’explication, quitte à parfois couper pendant un exercice. C’est une autre méthode de travail que celle de Mazzù, qui nous montrait beaucoup avec des vidéos. Ce sont deux méthodes différentes. Et puis, Belhocine a joué au haut niveau. Quand il démontre quelque chose, tu adhères automatiquement. Je ne dis pas que ce que Mazzù disait était faux mais cela rajoute un plus du côté de Belhocine."
À l’aube de cette nouvelle saison, Marco Ilaimaharitra est donc prêt à exploser et à réaliser de meilleures statistiques que la saison passée. "Il faut se fixer quelques objectifs pour continuer d’avancer" , commente le Malgache. "Je suis milieu défensif mais j’essaye d’apporter offensivement. Je veux mettre des buts, faire des passes décisives et puis prendre moins de cartons aussi (sourire) . Être moins suspendu et accrocher l’Europe en fin de saison serait positif."
Les supporters de Charleroi ne demandent rien de mieux…