Saelemaekers: "Ma mère a failli tomber dans les pommes"
Alexis Saelemaekers revient au Stayen, le stade dans lequel il a joué ses premières minutes chez les pros.
- Publié le 24-11-2018 à 07h38
- Mis à jour le 24-11-2018 à 10h10
Alexis Saelemaekers revient au Stayen, le stade dans lequel il a joué ses premières minutes chez les pros. Il arbore des bouclettes sur le sommet de son crâne. Une tentative, "un nouveau truc", confie-t-il en se marrant. "Je suis dans le viseur des arbitres. Avec ma nouvelle coupe, ils ne me reconnaîtront pas."
En quelques mois, Alexis Saelemaekers s’est taillé une réputation. De bon joueur d’un côté, de gamin hargneux de l’autre. Deux côtés qu’il assume et tente de faire cohabiter.
Il est en tout cas bien loin du gamin un peu timide monté au jeu sur la pointe des pieds à Saint-Trond à la 74e minute pour remplacer Alexandru Chipciu. C’était le 16 février dernier.
Ce dimanche, il revient sur le terrain de ses premières minutes de jeu.
"Quoi, c’était à Saint-Trond ?"
Oui, vous étiez monté au jeu et vous aviez perdu 1-0...
"Juste. Mais pour moi, la vraie première, c’est ma titularisation en playoffs. Après, les premières minutes, ça compte aussi. Je pense que ça me fera bizarre de revoir ce stade. Ce coup-ci, je compte bien gagner."
Pouvez-vous décrire comment s’est déroulée cette montée au jeu ?
"J’étais souvent en tribune les semaines avant ce match. Logiquement, Karim Belhocine (le T2) vient nous annoncer avant le début du match qu’on va en tribune. Ce match-là, il n’est pas venu me voir. J’étais content, car c’était la première fois que j’étais sur le banc. Je ne m’attendais pas à rentrer. Il faisait froid, j’étais bien au chaud dans ma veste. Je pensais que j’allais regarder le match durant 90 minutes."
Quand avez-vous compris que le moment était venu ?
"Le coach m’a envoyé à l’échauffement et vers la 60e minute, il me fait juste revenir. Pas pour monter au jeu. Dans les minutes qui suivent, il y a un truc qui ne lui plaît pas sur le terrain. Il s’est retourné vers le banc et il m’a regardé pour me dire de retourner m’échauffer. Là, je me suis dit que j’avais peut-être une chance de monter. Cinq minutes après, il m’a rappelé et j’ai su que c’était le moment."
Qu’avez-vous pensé ?
"C’était un tourbillon d’émotions. J’étais stressé, puis content, puis en panique. C’était très bizarre. Une fois sur le terrain, on se rend compte qu’il faut jouer un match normal, sans pression et qu’on n’est pas là par hasard."
Il a fallu toucher un premier ballon…
"Quand tu montes sur le terrain, tu ne réalises pas trop. J’ai compris que j’étais dans la cour des grands. Ce moment reste un bon souvenir."
Malgré la défaite ?
"C’est frustrant mais tout jeune qui commence pense d’abord à sa montée, pas au résultat. C’est logique qu’on pense plus à soi qu’à l’équipe. J’avais presque oublié le résultat. Puis, quand on intègre l’équipe, on commence vraiment à réfléchir en termes de groupe et de résultat et à se mettre au service de l’équipe."
Avez-vous compté les messages reçus après le match ?
"Je peux juste dire qu’il y en avait plein ! C’est là qu’on se rend compte du soutien. Ça fait plaisir de voir autant d’engouement pour juste quelques minutes de jeu."
Quel est le témoignage de soutien qui vous a le plus marqué ?
"La joie de mes parents. Leur soutien est la chose la plus importante à mes yeux. Nous avons consenti beaucoup de sacrifices. Autant eux que moi. Voir qu’ils sont heureux et fiers, c’est le plus important."
Que vous ont-ils dit ?
"Ils m’ont expliqué comment ils ont vécu le moment. Mon père et mon frère étaient au stade. Mon père m’a dit que mon frère tremblait en tribune. Ma mère était à la maison. Elle est presque tombée dans les pommes. Ça les a touchés. Maintenant, ils sont habitués. Il n’y a plus de stress." (rires)
Et vos amis ?
"Ils ont toujours cru en moi. Ils me charriaient en me grattant des places à l’avance pour quand j’arriverai en équipe première. Maintenant, ils me rappellent que je leur dois des places. Ils ne sont pas surpris car ils ont cru en moi depuis le début. C’était presque normal pour eux. À la récré , ils m’ont toujours vu comme la star du football. Dans la cour, j’étais toujours au-dessus. Mais ils n’imaginent pas les sacrifices que nécessite le monde du football. Ça me fait plaisir de voir leur réaction mais ça ne vaut pas le bonheur de mes parents. Eux, ils savent tout ce qu’on a traversé."
Walem ne va pas tout changer pour moi
Alexis Saelemaekers veut prouver ses qualités avec les Diablotins et tenter de dépasser le Brugeois Dion Cools.
Rejoindre l’équipe espoir et s’envoler pour deux jours en Roumanie, c’est une sorte de ballon d’oxygène pour Alexis Saelemaekers. Surtout quand c’est pour une rencontre amicale.
On est loin de la pression quotidienne d’Anderlecht. "On est cool ici", sourit-il. "On doit aussi penser à l’aspect plaisir du match. Les coachs sont moins stricts mais on ne glande pas pour autant."
Saelemaekers n’en perd pas pour autant son objectif du regard. Il est arrivé sur le tard mais compte bien s’imposer et faire partie de l’aventure à l’Euro en Italie.
Comment s’est déroulée l’intégration dans un groupe déjà bien formé ?
"Je connaissais beaucoup de gars avec qui j’ai déjà joué. Dimata m’a intégré dans le groupe. Personne n’a mis de barrière. Je suis vraiment cool quand je viens ici."
Et vous êtes tombé à pic…
"Je suis arrivé au bon moment. C’était le moment sérieux où le groupe devait se souder pour accrocher des victoires."
N’est-ce pas difficile pour vous d’arriver avec l’étiquette de remplaçant de Dion Cools alors que vous êtes devenu un cadre à Anderlecht ?
"C’est un peu difficile mais après je comprends que le groupe est déjà soudé et le coach a déjà sa composition en tête depuis longtemps. Il ne va pas tout changer du jour au lendemain parce que je suis là. Je comprends tout à fait Johan Walem."
Espérez-vous tout de même jouer de plus en plus régulièrement ?
"Je suis là si Johan Walem a besoin de moi et j’espère vivre de belles expériences et aller à l’Euro avec ce groupe."
Vous avez tout de même acquis un certain statut en Belgique…
"On est tous des talents du foot belge. Il n’y a pas de statut différent. Chacun a sa place et fait le boulot dans l’équipe. Ce n’est pas parce que je suis titulaire à Anderlecht que je dois avoir ma place directement. Il y a des étapes à franchir et je ne les brûle pas."
Johan Walem vous a-t-il demandé de concurrencer Dion Cools, de le mettre sous pression pour qu’il se batte pour sa place ?
"Il ne me l’a pas dit clairement mais je sais qu’il est content d’avoir doublé le poste à droite car quand un joueur n’a pas de concurrence à son poste, ça peut le faire courir à sa perte. Tu donnes plus quand tu as un concurrent. Depuis que je suis là, Dion doit être plus costaud en match. Ça le fait progresser et moi aussi. Moi, je dois essayer d’être meilleur que lui."
Il se confie sur...
... Son évolution "Avant, j’étais mort après 50 minutes"
En huit mois, Alexis Saelemaekers a enchaîné les matchs et a gagné en maturité. Notamment dans la gestion de l’effort. Ce qui lui a permis de gonfler son volume de jeu et son endurance.
"J’ai pris beaucoup d’expérience au fil des rencontres. Au début, j’étais mort après 50 minutes. Je courais partout sans calculer. J’ai ensuite commencé à gérer mes matchs et mes efforts. Je réfléchis davantage à ce que je fais. Je sens de mieux en mieux le jeu. J’ai pris de la maturité footballistique."
Il a également évolué tactiquement au contact de ses équipiers. "J’ai beaucoup appris au niveau du positionnement. Je ne suis pas un défenseur de formation et ça se voit encore trop. J’ai beaucoup bossé physiquement cet été pour pouvoir me battre avec des adultes. Il y a un monde de différence entre moi et l’Alexis d’il y a six mois. J’ai toutefois encore du progrès à faire."
... sa relation avec Adrien Trebel: "les autres disent que Trebel est mon père
“Adri (Trebel) m’a dit que si je continuais, je ferais un long chemin. C’est motivant quand ça vient d’un grand joueur d’Anderlecht.”
Alexis Saelemaekers et Adrien Trebel se trouvent les yeux fermés sur le terrain. Ils sont également extrêmement proches en dehors du terrain. Au point de voir les autres joueurs du groupe leur donner des surnoms.
“Sambi (Lokonga), quand Adri n’est pas là, il me demande où est mon père. Il le voit comme ça. (rires) On a une relation fusionnelle. Il m’a pris sous son aile depuis que je suis en A. Je me repose sur lui. C’est mon pilier. Il me calme, il m’engueule. C’est un point de repère. Adrien est un gars super pour les jeunes. Je ne pouvais pas rêver meilleur guide. C’est un gars honnête. Il ne me dira jamais que mon match était bon quand j’ai mal joué. Il dit clairement ce qu’il pense.”
... son caractère: Du trash-talking dès son premier match
Alexis Saelemaekers est réputé pour son fort caractère. Dès son premier match, à Saint-Trond (lire ci-dessus), il a provoqué son adversaire direct. “C’était De Norre (NdlR : le latéral gauche qui joue avec lui chez les Diablotins) de l’autre côté. On n’a plus reparlé de ce match depuis. On avait eu un différend sur le terrain (rires). Je suis comme ça. Je l’avais cherché car il traînait pour donner le ballon alors qu’on perdait. Ça m’a énervé et je lui ai un peu parlé.”
Au coup de sifflet final, tout était réglé entre les deux hommes. “Il est venu me voir et il m’a dit qu’il avait entendu parler de moi et que ce qui s’est passé sur le terrain reste sur le terrain. Il m’a encouragé à fond. Ça m’avait fait plaisir car c’est un gars avec du talent.”
... Son retour sur le banc: “Je n’étais pas bon ces derniers temps”
Alexis Saelemaekers n’a pas été mis une seule fois par Hein Vanhaezebrouck sur le banc des réservistes cette saison… Avant la réception de La Gantoise lors de la dernière journée de championnat avant la trêve internationale. Une déception qu’il comprend et assume.
“Chaque jeune joueur a besoin de retourner sur le banc des réservistes à un moment pour prendre du recul. Cela arrive au bon moment. Je n’étais pas bon ces derniers temps après un bon début de saison. Il faut retomber pour franchir de nouveaux paliers par la suite. Ce n’est pas grave d’être sur le banc. Je dois travailler plus dur et être plus concentré au quotidien. Rien n’est acquis. Je vais bosser pour retrouver ma place dans l’équipe.”